Après l'attentat de Nice : contre l'opération Sentinelle et pour la détention en prison militaire

Publié le par Alexandre Anizy

L'opération Sentinelle est à notre sens une aberration, comme l'a dit le général Vincent Desportes, et le gouvernement n'apporte pas de réponse satisfaisante au problème de la contamination en milieu carcéral.

Sur son territoire, la France n'est pas en guerre. Elle fait face au terrorisme, qui est un mode d'action. Pour assurer la protection des résidents, l'Etat dispose de moyens spécifiques : police, CRS, gendarmerie. Alors pourquoi l'armée ? Rappelons d'abord des faits en donnant des chiffres, grâce à l'amiral Hervé de Bonnaventure (1).

En janvier 2015, au moment des assassinats à Charlie Hebdo, le plan Vigipirates était activé et employait déjà 1010 militaires. Suite aux décisions immédiates du gouvernement, l'effectif militaire est porté à 3.000 en 2 jours, et il atteindra 10.000 hommes le 14 janvier. Comment a-t-on réussi ce tour de force ? En novembre, l'exercice pour le plan Neptune, conçu pour les catastrophes naturelles et prévoyant le déploiement de 10.000 militaires, venait d'avoir lieu : l'Etat-major, notamment en Ile-de-France, était donc particulièrement préparé. Mais la durée normale du plan Neptune est de 1 à 2 mois...

En avril, le Conseil de Défense décide de descendre à 7.000 hommes l'effectif militaire, dans la durée (il sera remonté à 10.000 pour l'événement sportif de l'Euro), et de recruter 11.000 militaires d'ici la fin 2017 parce que, compte tenu de certaines règles, il faut une force opérationnelle de 77.000 hommes pour atteindre cet objectif.

Avec l'opération Sentinelle, que se passe-t-il concrètement pour les forces opérationnelles ? Selon Vincent Desportes, l'emploi du temps du soldat opérationnel se décompose ainsi, en moyenne : avant Sentinelle, 15 % en opérations extérieures et 5 % en opérations intérieures ; avec Sentinelle, toujours 15 % pour les opex, mais entre 40 et 50 % en opérations intérieures. Il y a donc une baisse importante de son entraînement individuel, mais aussi collectif.

De plus, pour monter Sentinelle il a fallu restreindre les forces de souveraineté (i.e. celles en territoires outre-mer) et, quoi qu'on en dise, accélérer la fin de l'opération Sangaris.

In fine, l'opération Sentinelle ne permet pas de régénérer correctement les forces opérationnelles et elle diminue les forces de souveraineté ; elle a un impact négatif sur le moral des troupes, qui se sentent comme des supplétifs utilisés par défaut.

« Cette utilisation des forces armées n'apporte pas de plus-value sécuritaire. (...) Face à une rupture stratégique, parce qu'il s'agit bien de cela, on utilise une solution, qui n'en est pas une d'ailleurs, mais du niveau cosmétique. » (V. Desportes)

Le terrorisme doit être combattu dans le cadre d'un système global de sécurité - défense, qui fait cruellement défaut aujourd'hui.

Concluons sur ce premier point avec François Géré :

« Dans son principe même, l'opération Sentinelle constitue un contresens stratégique complet qui n'apporte rien d'autre que de distraire des forces dont nous aurions besoin sur les véritables théâtres de guerre. »

Un examen attentif des faits montre l'importance de la contamination idéologique en prison : entrés en petits délinquants, ils en sont sortis en terroristes. A ce jour, force est de constater que les réponses apportées pour la stopper sont d'ordre curatif (la déradicalisation) : la prolifération va donc perdurer, ce qui n'est pas acceptable.

Pour nous, les terroristes doivent être séparés du reste de la population carcérale. Si on ne peut pas leur accorder pleinement le statut de combattants, puisqu'ils ne font pas partie d'une armée régulière, on ne peut pas non plus les traiter comme de simples délinquants, puisqu'ils revendiquent eux-mêmes le caractère politique de leurs actions. C'est pourquoi nous proposons qu'ils soient détenus dans des prisons militaires.

Cette mesure présentent 2 avantages :

  • arrêt de la contamination ;
  • solution immédiate et à moindre coût du débat entre "prison spécifique" et "quartiers réservés au sein des prisons".

Après l'attentat de Nice, il convient d'inscrire la lutte contre le terrorisme dans un continuum sécurité - défense : l'arrêt de l'opération Sentinelle et l'enfermement des terroristes dans des prisons militaires en sont les 2 premières mesures concrètes.

Alexandre Anizy

(1) Toutes les citations et informations de ce billet proviennent du Colloque "Quelle mobilisation de la Nation face au terrorisme international" (20 juin 2016 à l'Assemblée Nationale)

Publié dans Notes politiques

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