Attendre l'heure avec Alice McDermott
Le prix Femina étranger a honoré Alice McDermott pour un roman de qualité : La neuvième heure (Quai Voltaire / La Table ronde, 2018, en livrel).
Soeur Illuminata humidifia la nappe. Ces temps-ci, elle utilisait une vieille bouteille de Coca-Cola avec un bouchon en caoutchouc perforé. Elle lécha le bout de son doigt abîmé et vérifia la température du fer. Puis s'attaqua à la nappe avec d'amples mouvements de bras, actionnant son coude comme un soufflet. « Tous les matins, nous envoyons des soeurs immaculées de par les rues, n'est-ce pas ? Un tissu propre à appliquer sur le monde souffrant. (p.107/287)
Nous avons pioché au hasard cet extrait pour montrer en quoi ce livre est important : un style exceptionnel, différent de celui de James Salter (ici) bien sûr, mais aussi remarquable (saluons au passage la traduction de Cécile Arnaud).
Alice McDermott dit avoir une grande admiration pour Charles Dickens, notamment pour ses romans sociaux (1). Si nous voyons l'influence dans ce roman, la question demeure : n'y aurait-il pas de misère dans l'Amérique profonde d'aujourd'hui ?
Quoiqu'il en soit, nous aimerions tant que des milliers d'enfants écoutent leurs mères lisant La neuvième heure plutôt que Le Figaro Magazine ou Paris-Match.
Alexandre Anizy