De Kimi Cunningham Grant
Sur le conseil d’une amie, nous découvrîmes les deux romans de Kimi Cunningham Grant.
Commençons par Le silence des repentis (poche 10/18, avril 2023). La qualité du style, la finesse psychologique et la trame du récit emportent sans difficulté le lecteur jusqu’au bout de l’histoire.
« Bien sûr il débarque, plus tard dans l’après-midi, au moment où je suis occupé à déblayer, de nouveau, un chemin pour rejoindre la remise. Il est équipé d’une paire de raquettes qui ont l’air d’avoir une centaine d’années, et cette fois, dans le silence ouaté, j’entends le frou-frou de ses pieds dans la neige. Je l’aperçois de loin. C’est la première fois qu’il ne me prend pas au dépourvu, qu’il ne précipite pas les battements de mon cœur. » (p.217)
La nouveauté du printemps 2023, c’est Les rancœurs et la terre (Buchet.Chastel), dans lequel l’autrice porte encore plus son attention à la psychologie des personnages. Son dispositif narratif ̶ un va-et-vient systématique entre le présent et passé ̶ pourrait être lassant si le livre faisait 500 pages, et si l’autrice n’avait pas pris soin d’ajuster les longueurs des chapitres qui, chez elle, ne s’éternisent pas. Kimi Cunningham Grant tient le rythme adapté au récit, comme le style, toujours perlé.
« Red était assis sur sa galerie, devant chez lui, dans le noir. Les grillons rugissaient, les lucioles clignotaient dans le jardin et jouaient une douce mélodie lumineuse. Dans une autre vie, il avait regardé Sue et Junior courir pieds nus dans l’herbe une nuit d’été, mains tendues devant eux, dans l’obscurité, pour les attraper. Sue était revenue vers lui pour le serrer contre elle, ses cheveux étaient chauds et doux contre la joue de Red. Ils avaient perforé le couvercle métallique d’un bocal avec un clou et autorisé Junior à les garder dan sa chambre pour la nuit. Une "veilleuse en lucioles", avait-il dit. » (p.163/235)
Du bel ouvrage.
Alexandre Anizy