Cela renvoie à la question d’un manque originel.
Dans Poèmes non assemblés, Fernando Pessoa écrit :
La confondante réalité des choses
Est ma découverte de tous les jours.
Chaque chose est ce qu'elle est
Et il est difficile d'expliquer à quiconque à quel point cela me réjouit,
Et à quel point cela me suffit.
Il suffit d'exister pour être complet.
(Pessoa, Pléiade, Oeuvres poétiques)
Si "chaque chose est ce qu'elle est", pourquoi est-ce l'existence qui rend "complet" ? Y aurait-il un manque originel ? On peut le penser en reprenant Pessoa lui-même :
Suis-je seul ? Je ne veux pas l'être.
Entouré ? Je veux être seul.
Autrement dit, je veux toujours
Etre autrement que je ne suis.
Etre heureux, c'est être tel autre,
Et cet autre n'est pas heureux,
Car il pense au fond de lui-même,
Non au fond de qui j'ai voulu.
Nous faisons ce que nous voulons
De tout ce qui n'est rien, mais sans
Cette entreprise c'est l'échec,
Nous restons perdus sur la route.
Qu'est-ce qui nous plaît, somme toute ?
(Pessoa, ibidem)
Concernant l'espèce humaine, on peut apprécier la réponse de René Girard.
Alexandre Anizy