Ce que cache la pseudo démission de Daniel BOUTON
Comme vous le savez, il paraît que le Président de la Société Générale Daniel BOUTON a remis sa démission au Conseil d’Administration, mais ni vous, ni nous, n’avons vu une copie de cette « démission ».
Quelles questions pouvons-nous alors poser ?
Sommes-nous en esclavage ?
Il nous semble que la France est un Etat de Droit où, par exemple, les personnes morales (comme la Société Générale) établit des relations contractuelles avec des personnes physiques (comme Daniel BOUTON, ses salariés). Dans ce cadre-là, si une démission en bonne et due forme est remise, elle ne peut pas être refusée, car sinon, cela signifierait qu’une personne morale peut contraindre une personne physique à travailler pour elle contre son gré : cette situation s’appelle de l’esclavage.
Comme la Société Générale respecte le droit et qu’elle n’a jamais fait l’apologie de l’esclavagisme à notre connaissance, il faut en déduire que son Conseil d’Administration a refusé une proposition de démission de la part de Daniel BOUTON.
Aux Etats-Unis, le Président placé dans la situation de Daniel BOUTON aurait démissionné ou aurait été viré de suite par le Conseil d’Administration ; au Japon, le Président aurait démissionné et se serait flagellé moralement en public voire imposé un hara-kiri (pour les cas les plus imprégnés d’absolu) ; en Chine, le Président, étant aussi membre de la Direction du PC chinois, aurait été démis sur le champ de ses fonctions et exécuté dans les plus brefs délais pour exonérer le Parti, en vertu de la justice expéditive, que Marie-Ségolène ROYAL la madone Déate trouve efficace, qui sévit dans l’Empire du Milieu ; en France, le Président Daniel BOUTON a sans doute proposé sa démission, ce qui n’est pas du tout la même chose.
Ce que pense Jacques ATTALI de « l’affaire SG » ? « (…) un trader trop audacieux, un patron protégé par un conseil d’administration où certains sont suspectés de délits d’initiés (…). (…). Elle [la crise ouverte par l’affaire de la Générale] jette l’opprobre sur un système capitaliste où les patrons sont rémunérés de façon exorbitante, sous prétexte des risques qu’ils courent, et qui s’accrochent à leurs fauteuils malgré des erreurs pour lesquelles ils auraient licencié en dix minutes n’importe lequel de leurs subordonnés. » (Express 31 janvier 2008)
Bien dit, monsieur ATTALI.
Pourquoi le Conseil d’ Administration de la Société Générale a-t-il refusé ce qu’il faut appeler la proposition de démission de Daniel BOUTON ?
Si le conseil avait accepté cette proposition, il lui aurait fallu nommer sur le champ un nouveau Président pour gérer la crise. Comme il ne l’a pas fait, nous pouvons avancer quelques hypothèses :
- Aucun administrateur ne se sentait à la hauteur d’une telle situation ;
- Aucun administrateur ne pouvait se libérer immédiatement de ses autres obligations ;
- Aucun administrateur n’avait la compétence et l’expérience de banquier pour être adoubé par ses pairs comme par l’ensemble de la communauté financière.
D’autres hypothèses sont sans doute plausibles.
Mais ces 3 hypothèses formulées ne sont peut-être pas dues au hasard : dans le « capitalisme des copains » qui règne en France, le Président a le Conseil d’ Administration qu’il mérite et qui lui sied. La Société Générale ne doit pas faire exception à cette loi d’airain.
Le Conseil d’ Administration de la Société Générale pratique-t-il la bonne gouvernance ?
Dans une banque de cette envergure, le conseil d’administration doit mettre en place un dispositif : un collège alternatif au Président, capable de se substituer à lui en cas de pépin (et pas seulement boursier).
Les grandes banques américaines se sont dotées de ce dispositif.
La Société Générale a failli à son obligation de bonne gouvernance.
Quant à Daniel BOUTON, il aurait commis une sorte de péché, puisqu’il est l’auteur du fameux rapport « Pour un meilleur gouvernement des entreprises cotées ».
Un bel exemple du « Faites ce que je dis, etc. ».
Alexandre Anizy