Allemagne et France vus par Peter SLOTERDIJK (V)
(Suite des 4 notes précédentes)
La normalisation de l’Allemagne
Ce pays « peut commencer à récolter les fruits de ses efforts métanoiétiques. Il a regagné la confiance de ses voisins – si l’on fait abstraction de quelques dépôts toxiques en Angleterre et en Pologne où se reproduisent obstinément, comme sous vide, les affects antiallemands (…) » (p.60) L’élection d’un pape allemand (Joseph RATZINGER) le 19 avril 2005 est une expression de la « ratification du processus politico-moral » et un patronyme allemand peut dorénavant être le symbole de l’intégrité (tenons pour insignifiante la corruption au sein des groupes Siemens et Volkswagen : n’est-ce pas une règle commune des affaires mondialisées ?).
Peter SLOTERDIJK met en exergue le cas de Martin WALSER, parce qu’il parla le premier dans les années 1980 de la réunification allemande comme d’une option souhaitable, et parce qu’il affirma en 1998 que l’Allemagne pouvait « prendre de la distance avec certains rituels pseudo-métanoiétiques extériorisés » (comme le rappel de la Shoah utilisée comme une « massue morale »).
De fait, aujourd’hui, l’Allemagne est entrée dans une phase de normalisation : « l’idiot de la famille européenne » évolue vers l’égoïsme politique normal, dont la France est un exemple.
Il demeure un point sensible : la redéfinition des fonctions militaires. Parce qu’ils ont commis des crimes, les Allemands auraient une « prétention supérieure à vivre dans un monde sans guerre. Il en résulte un syndrome de la faiblesse arrogante qui ne pourra pas résister aux épreuves à venir. » (p.76)
« Dans ce segment basique du réajustement du decorum culturel », la normalisation pourra-t-elle survenir, s’interroge Peter SLOTERDIJK.
Alexandre ANIZY