La mondialisation selon Pierre-Noël GIRAUD (IV)

Publié le par Alexandre Anizy

Dans son livre « la mondialisation. Emergences et Fragmentations » (Sciences Humaines éditions, 4ème trimestre 2008, 158 pages, 10 €), Pierre-Noël GIRAUD dresse un état du processus de mondialisation. Le chapitre 6 traite de la fragmentation interne aux pays riches.

 

« Un rapport de l’OCDE d’octobre 2008 le confirme (…) les inégalités de revenu ont augmenté depuis les années 80 dans presque tous les pays riches. » (p.93) Le revenu du dernier décile a progressé fortement, et pour les 1 % des plus riches ce fut exceptionnel. « En revanche, les quintiles intermédiaires ont vu leur revenu croître moins vite que la moyenne. Il s’agit donc d’un appauvrissement relatif des classes moyennes. » (p.93) P-N. GIRAUD rappelle qu’en 1996 il concluait déjà à un laminage des classes moyennes ainsi qu’à la polarisation des sociétés entre un groupe restreint de compétitifs de plus en plus riches et une masse de protégés.

 

Pour autant, « il n’y aura pas de retour massif au protectionnisme, tout au plus des ajustements à la marge » (p.98), mais c’est une option concevable, bien que difficilement praticable, au niveau des grandes zones comme l’Union Européenne. Mais « les firmes globales n’ont aucun intérêt au retour du protectionnisme, elles le combattront » (p.99) : ainsi, si on ne peut l’exclure, « c’est simplement très improbable ».

Alors que faire, comme disait LéNINE :

  • Pas de retour en arrière pour les marchandises ;
  • Supprimer les subventions agricoles ;
  • Revoir le système des droits de propriété intellectuelle ;
  • Ne pas militer pour l’ouverture totale des frontières, mais régulariser les immigrés sans papier ;
  • Stabiliser les grandes monnaies, grâce à une coordination internationale des politiques macroéconomiques et monétaires ; « Est-ce à l’ordre du jour ? On peut en douter (…) la position du cavalier seul est encore parfaitement jouable pendant un certain temps par certains des acteurs concernés. » (p.102) Lesquels ? on ne saura pas.

 

Comment remédier à la hausse des inégalités dans les pays riches ? Le modèle de P-N. GIRAUD montre 2 voies : accroître le nombre des compétitifs et augmenter le rapport qualité/prix des choses protégées, ce qui engendre une croissance endogène.

Pour la 1ère voie, il convient pour l’essentiel d’investir dans la formation et la recherche, ce que dit déjà le pouvoir oligarchique. Cela nécessite une profonde réforme de l’Université (on y est déjà, n’est-ce pas ?) où « il faudra sans doute se résigner à ce que, au moins (ndAA : c’est nous qui soulignons) pour la 1ère année de réception des étudiants étrangers, ces universités enseignent en anglais. » (p.104) P-N. GIRAUD ne comprend pas que l’abandon de la langue serait la 1ère étape de la débâcle à venir.

Pour la 2ème voie, « (…) on pourrait par exemple imaginer de supprimer toute TVA sur les biens et services protégés et de la reporter entièrement sur les biens et services compétitifs. » (p.105) Mais ce ne serait pas très sérieux, si on se réfère au diktat européen sur la question de TVA, notamment pour la restauration. Alors ? Les Etats des pays riches peuvent lutter contre les inégalités internes, mais ils doivent obtenir l’accord des compétitifs de leurs territoires respectifs : or, « En brisant les cercles vertueux des croissances sociale-démocrates autocentrées, la mondialisation a détruit les solidarités économiques objectives au sein d’un territoire. (…) Rappelons une fois de plus que la pauvreté des protégés améliore la compétitivité des compétitifs. » (p.106)

 

P-N. GIRAUD nous dit qu’il maintient en 2008 son pronostic : « (…) augmentation de l’inégalité économique (…) renforcée et pérennisée par des inégalités institutionnelles, par le fait que les Etats sont de moins en moins des Etats « pour tous ». » (p.107)

 

Alexandre ANIZY