La mondialisation selon Pierre-Noël GIRAUD (V)

Publié le par Alexandre Anizy

Dans son livre « la mondialisation. Emergences et Fragmentations » (Sciences Humaines éditions, 4ème trimestre 2008, 158 pages, 10 €), Pierre-Noël GIRAUD dresse un état du processus de mondialisation. Le chapitre 8 traite de la finance globale et de l’instabilité consubstantielle.

 

P-N. GIRAUD met d’emblée les pieds dans le plat : « Tous ceux qui considèrent la finance comme une superstructure parasitant une économie de marché (…) sont des Saint-simoniens attardés. (…) Un capitalisme sans monopoles, sans externalités, sans finance, sans spéculation (…) est une pure chimère. » (p.124) Quant à nous, nous ajoutons que toute économie est réelle : la crise résulte d’une perversion de l’administration familiale (l’économie au sens premier du terme ; ARISTOTE, « les politiques »), puisque les ménages empruntaient réellement de l’argent sur une augmentation virtuelle du prix de leur maison.

La finance collecte l’épargne de certains agents économiques et crée ex nihilo de la monnaie : pour maximiser la croissance, une proportion de projets non rentables sont financés. « Ces promesses de revenus futurs [« Un titre financier n’est jamais qu’une promesse de revenus futurs (…) » p.125)] impossibles à tenir, c’est ce que j’ai appelé le mistigri. (…) Dès lors, la purge de ce mistigri est nécessaire et ceci, quel que soit le système financier. (p.128)

Comment purger ? Avant 1980, c’est l’inflation. Après cette date, c’est le krach sur un marché (actions, immobilier, changes, matières premières), suivi d’une crise bancaire plus ou moins localisée et profonde. Mais le système financier actuel transmet son instabilité à l’ensemble de l’économie : « En bref, c’est une démocratie de renards libres dans un poulailler libre. (…) qui va finalement subir les pertes (…) A coup sûr, les investisseurs les plus mal informés, par conséquent les petits investisseurs, puis si cela ne suffit pas, en seconde ligne, l’ensemble des contribuables. » (p.131) Nous en sommes là.

 

Concernant les déséquilibres des balances de paiement et l’instabilité des changes, « (…) l’Europe est aujourd’hui l’otage des choix de politique économique des Américains et des Chinois. Il en résulte de fortes fluctuations de l’euro. » (p.137) Seule une coordination des politiques économiques entre l’Union Européenne, les Etats-Unis et les puissances asiatiques peut y remédier. Rêver n’est pas interdit …

 

On peut envisager une réforme radicale : contrôle des mouvements de capitaux et cloisonnement de la finance. Si la libre circulation des capitaux est quasiment intouchable, une séparation totale entre les activités bancaires  et les activités de marché n’est pas impossible : « Dans ce système cloisonné, la totalité des risques étant confiné sur les bourses et les marchés dérivés, ces marchés deviendraient extraordinairement volatils et le grand public n’échapperait pas totalement aux fluctuations macroéconomiques engendrées par cette instabilité. » (p.139)

Mais il n’y a personne pour soutenir cette réforme radicale.

 

Le consensus actuel maintient le principe d’une finance décloisonnée en appelant à un renforcement des réglementations, avec parfois de surcroît « le ridicule de prôner plus de transparence ». Comme le fait remarquer à juste titre P-N. GIRAUD, ces réformes « seront très probablement assez cosmétiques, une fois passé le plus gros de la crise ». (p.140)

 

Alexandre ANIZY