Affaires : une méthode de l'Empire chinois
Dans notre note du 27 novembre 2007, dans laquelle nous évoquions un moyen d’appropriation, nous faisions le pronostic qu’« en Chine Airbus se fera dépouiller ». Aujourd’hui, plus que jamais, il n’est pas bon de prendre l’Empire chinois pour un laquais du capitalisme global : le géant minier Rio Tinto l’apprend à ses dépens.
Début 2009, Rio Tinto connaissait des difficultés financières, notamment à cause de l’effondrement de la demande de minerai : il obtenait de la part de Chinalco un apport de plusieurs milliards d’euros, dont la contrepartie était une participation portée à 19 % du capital de Rio Tinto. Sans doute fort de cet accord, le géant anglo-australien finissait par conclure en juin un autre accord avec son rival BHP Billiton, et il réussissait à lever 15 milliards de dollars en Bourse : dans la foulée, Rio Tinto annulait l’accord avec Chinalco.
Chinalco et les autorités chinoises (dans « l’économie communiste de marché » (1), c’est la même chose) n’ont pas apprécié du tout.
Début juillet, 4 cadres de Rio Tinto ont été arrêtés et emprisonnés pour corruption et espionnage.
Début août, un responsable de l’Empire du Milieu accuse Rio Tinto, BHP Billiton et Vale d’avoir porté préjudice à la sidérurgie chinoise depuis 2002 en augmentant le prix du minerai de fer, soit un montant estimé à 102 milliards de dollars (coïncidence ? c’est à peu près la valeur boursière de Rio Tinto). Or 1 des 4 cadres accusés d’espionnage, Stern Hu, était un négociateur ... qui aurait espionné les comptes et soudoyé des acheteurs.
De plus, l’Administration nationale pour la protection des secrets d’Etat (Napss) écrit dans son rapport sur Rio Tinto que «dans les dernières années, plusieurs espions industriels dans notre pays ont acquis des technologies de pointe (…) qui ont causé d’importants dommages à l’économie chinoise ». A bon entendeur …
Voilà donc une autre méthode de coercition.
Seuls les Occidentaux cupides peuvent croire que l’Empire du Milieu connaît la pondération dans sa marche vers l’hégémonie.
Alexandre Anizy
(1) : lire notre note du 2 février 2008 pour découvrir ce concept baroque.