La dépénalisation du Droit des Affaires et le cas Didier PINEAU VALENCIENNE

Publié le par Alexandre Anizy

A l’université d’été du MEDEF, le Président ubiquiste SARKOZY DE NAGY BOCSA a déclaré : « La pénalisation de notre Droit des Affaires est une grave erreur. Comment faire un calcul économique (…) quand le risque financier lié à l’incertitude juridique se double de plus en plus d’un risque pénal ? »

Il existerait donc d’honorables hommes d’affaires qui feraient des calculs économiques en sachant que leurs projets comporteraient un risque pénal, autrement dit qu’ils seraient partiellement ou totalement délictueux ?
Chacun appréciera la moralité de tels citoyens.

Le chef de l’Etat poursuit : « Les juges doivent jouer le jeu » et « ne pas se laisser aller à devenir les arbitres de la politique et à juger de la manière dont les chefs d’entreprise font leur métier ».
Il importerait donc que les patrons puissent faire leurs petites affaires sans avoir à supporter un risque pénal, i.e. l’ire d’un juge zélé qui se mêlerait des méthodes employées pour le bien de l’entreprise (et donc de ses salariés, n’est-ce pas ?) : nous vous épargnons les réactions des syndicats des magistrats.   

 
C’est pourquoi la Chancellerie va attaquer le chantier de la dépénalisation du Droit des Affaires.
Sérieusement, ce nouveau chantier juridique est-il vraiment nécessaire ?

 
A la lumière du cas Didier PINEAU VALENCIENNE, non.
Résumons l’affaire belge.
Après 10 ans d’enquête et un procès de 13 mois, un jugement fut rendu le 31mars 2006. Le tribunal a retenu les faux et l’escroquerie dans le cadre de la gestion de 2 filiales belges du groupe SCHNEIDER, Cofibel et Cofimines. Dans le cadre d’une OPA sur ces sociétés, les actionnaires minoritaires ont été sciemment mis en erreur par SCHNEIDER : la valeur des titres a été diminuée par des informations incorrectes validées par le PDG Didier PINEAU VALENCIENNE. Contre ce grand patron français (accusé aussi d’avoir siphonné les filiales belges au profit de la maison - mère, le juge Laurence MASSART a dit que son implication concrète n’a pas été prouvée), le ministère public avait demandé 4 ans de prison avec sursis : reconnu coupable, Didier PINEAU VALENCIENNE a été dispensé de peine en raison de l’ancienneté des faits qui lui étaient reprochés.

Coupable, mais pas condamné. Après 10 ans d’enquête et un procès de 13 mois.

 
A notre avis, cette affaire pointe les grands perdants, en l’espèce les contribuables belges, parce que des enquêteurs, des fonctionnaires de l’administration judiciaire, ont passé beaucoup de temps pour en arriver à ce jugement surprenant (il y a d’autres décisions « remarquables » dans ce jugement), et les grands gagnants, en l’espèce les cabinets d’avocats qui ont travaillé sur ce dossier.
En dépénalisant le droit des affaires, voudrait-on diminuer le revenu de la profession des avocats ?

 
Pour nous, la leçon du cas PINEAU VALENCIENNE est la suivante : les chefs d’entreprise peuvent échapper au risque pénal en mettant dans la balance les moyens à la hauteur de l’enjeu ; ceux qui ne peuvent pas échapper aux sanctions, dont le cas PINEAU VALENCIENNE donne une idée de la pénibilité, sont purement et simplement des délinquants.

 
Alexandre Anizy

Publié dans Notes générales

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