Faire monter la cote de Sophie Divry sans condition
Dans la déferlante littéraire de la rentrée, La condition pavillonnaire de Sophie Divry (Noir sur blanc, avril 2014, livrel à 11,99 € - trop cher !) a retenu notre attention, puisque l'excellent titre suggérait une vision similaire à celle recouvrant notre formule : le ghetto cadre.
L'auteur, qui travaille par ailleurs dans un mensuel sympathique quoique dogmatique, ne nous a pas déçu. Ayant opté pour une écriture sèche - pas de gras, pas de joliesse dans ces lignes au cordeau -, de celle qui plombe d'ennui le lecteur tant le verbe ascétique finit généralement en pauvreté langagière, Divry réussit à tenir la distance. C'était un pari difficile de raconter ainsi une vie grattée jusqu'à l'os.
« Bientôt tu seras protégée de toute cette vulgarité. Tu viens d'avoir le bac. Mention bien. Aussi dépasses-tu tes parents, prends-tu une voie qu'eux-mêmes n'ont pas pu prendre dans leur jeunesse ; eux qui n'ont travaillé que dans le secrétariat et le petit patronat, qui ont mis de l'argent de côté pour toi et conçu un unique enfant en souvenir de la pauvreté : cette enfant va monter d'un cran. Ils le voient dans ton regard, ce filet de mépris lié à ton ambition. » (chapitre 1)
Cafardeux et dépressifs, passez votre chemin ! Quant aux autres humains, imprégnez-vous de cette noirceur pour relativiser votre spleenétique condition.
Divry est d'ici (et maintenant).
Alexandre Anizy