L'Allemagne trace sa route en Europe
Depuis le déclenchement de la crise financière grecque, l'Allemagne n'a pas changé d'un iota sa positon orthodoxe : non à la solidarité européenne, oui aux crédits bilatéraux ... associés à une aide du FMI. Comme Mutti Merkel a horreur du désordre sur les marchés et des réunions qui s'éternisent, elle vient de rappeler que « l'aide financière à la Grèce ne sera pas à l'agenda de la réunion jeudi, car la Grèce elle-même a dit qu'elle n'avait pas besoin d'aide. (…) il ne faut pas provoquer des turbulences sur les marchés en suscitant de fausses attentes du Conseil européen de jeudi ».
Par ailleurs, la populiste Mutti Merkel n'hésite pas à flatter le sentiment de supériorité des vertueux Allemands, qui ne voient que paresse et corruption dans la Grèce contemporaine. Il est vrai qu'elle est en campagne électorale en Rhénanie : pour la coalition au pouvoir à Berlin, une défaite provoquerait la perte de la majorité au Bundesrat (2ème chambre du Parlement allemand).
Ajoutons que si l'Allemagne prône l'orthodoxie financière pour l'Union Européenne en général et la Grèce en particulier, elle s'autorise dans le même temps un déficit record de 80 milliards d'euros. Sans commentaire.
L'Allemagne trace sa route en Europe : quelle que soit la question posée, Berlin y répond en fonction des intérêts strictement allemands. C'est tout à l'honneur des hommes politiques allemands. C'est aussi pourquoi les beaux esprits français, comme l'économiste Thomas Piketty, nous font bien rire avec leur appel à un fédéralisme économique et financier (« En Europe, il faut inventer le chemin menant au fédéralisme budgétaire. Qui ne passe pas par le FMI, mais bien plutôt par l'émission d'obligations européennes. » Piketty, Libération 23 mars 2010).
Par aveuglement, par conformisme, par intérêt, des gens instruits et intelligents peuvent se comporter comme des imbéciles.
La Grèce finira sans doute par se tourner vers le FMI, d'une façon ou d'une autre. Que faut-il en penser ? Le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, affirme que l'intervention du FMI dans le « sauvetage financier » de la Grèce constituerait un échec de l'Union européenne.
C'est un Allemand. En matière de realpolitik, c'est du sérieux.
Alexandre Anizy