Manotti & Doa ou comment gâcher un bon ouvrage
Deux auteurs de polars, Dominique Manotti et Doa, dont nous avons déjà évoqué les qualités indéniables, ont écrit à 4 mains « l'honorable société » (Gallimard, collection Série Noire, bouquinel de 332 pages), en plaçant en exergue cette citation de Karl Marx :
« Toute classe qui aspire à la domination doit conquérir d'abord le pouvoir politique pour représenter à son tour son intérêt propre comme étant l'intérêt général. » L'idéologie allemande
Force est de constater qu'ils étaient ambitieux.
Ils racontent une histoire qui débute par un cambriolage, qui vire au meurtre sous les yeux horrifiés de pirates informatiques mal intentionnés pour la bonne cause, une action ordinaire des luttes économiques impitoyables, surtout quand elles tournent autour du nucléaire puisque la raison d’État s'en mêle, quand la France est en train de succomber aux postures putassières d'un candidat – qui n'a jamais beaucoup travaillé, lui – à l'élection présidentielle.
L'intrigue est habile et le style se veut mordant, efficace (à l'américaine ?).
« Le studio est grand, aéré, au dernier étage d'un vieil immeuble parisien, au fond d'une cour. Les deux fenêtres sont ouvertes. Dehors, les toits et, ici et là, les échos de télés en sourdine. (…) Trois jeunes sont là. » (p.7)
Mais patatras ! La fin, du fait de son improbabilité (l'ex future Première Dame en amour avec le flic raté sur la plage ensoleillée … du grand n'importe quoi !), disqualifie le projet d'une peinture sociale sous-jacente.
Manotti & Doa, ou l'art de s'autodétruire dans la chute.
Alexandre Anizy