Milan Kundera est un garnement

Publié le par Alexandre Anizy

            On sait que Milan Kundera a soigneusement contrôlé l'édition de son œuvre dans la collection de la Pléiade (Gallimard, en 2011), parachevant ainsi son travail d'écrivain. Et voilà qu'il sort de son chapeau une nouvelle fugue romanesque titrée La fête de l'insignifiance (Gallimard, mars 2014, 142 pages, 15,90 €). Que faut-il en penser ?

 

            D'une part, nous y voyons comme un pied-de-nez à son éditeur français (1) et au milieu littéraire qui l'avait déjà enterré : Milan est resté un garnement qui rit sous cape de son audace relative. Au soir de sa vie, Kundera veut montrer qu'il fut et qu'il demeure à jamais un homme libre.

 

            D'autre part, cet opus inespéré n'est pas sans importance, puisqu'on y trouve à la fin cette approche philosophique :

« L'insignifiance, mon ami, c'est l'essence de l'existence. Elle est avec nous partout et toujours. (...) il faut l'aimer, l'insignifiance, il faut apprendre à l'aimer. (...) Respirez, D'Ardelo, mon ami, respirez cette insignifiance qui nous entoure, elle est la clé de la sagesse, elle est la clé de la bonne humeur... » (p.139)

Parce que le monde ne serait qu'un chaos, qu'il serait stupide de prendre au sérieux.

            Pour autant, l'homme libre doit-il accepter la représentation du monde imposée à tous par la volonté agglomérée de seulement 1 % de la population ? Pour autant, faut-il excuser l'attitude des collabos de 1942, ou bien celle des mouchard de la Guépéou ?

 

 

            Finalement, dans notre monde paradoxal, il n'est pas étonnant que le vieux monsieur grognon que nous avons salué un matin d'été au Touquet soit l'auteur de cette juvénile plaisanterie, qui n'est pas une sottie.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

(1) Il semble que Gallimard ait modérément apprécié puisque, ayant inscrit La fête de l'insignifiance dans la bibliographie de ce livre, il a commis une erreur (volontaire ?) lorsqu'il précisa que « Tous ces livres sont publiés en deux tomes dans la Bibliothèque de la pléiade, avec préface et biographies des oeuvres par François Ricard ».

 

Publié dans Notes culturelles

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