Un Djian sans incidence
Comme il y avait longtemps que nous n'avions pas pris une dose de style par l'entremise de Philippe Djian, nous décidâmes d'avaler la dernière œuvre de ce romancier talentueux.
Lire notre note précédente :
http://www.alexandreanizy.com/article-6876006.html
Dans « incidences » (Gallimard, février 2010, 233 pages, 17,90 €), tout est là, comme d'habitude : l'ambiance, le rythme. Prenons l'incipit :
« S'il y avait une chose dont il était encore capable, à cinquante-trois ans, par un grand soir d'hiver que blanchissait la lune et après avoir bu trois bouteilles d'un vin chilien particulièrement fort, c'était d'emprunter la route qui longeait la corniche le pied au plancher. »
Comparons à l'intro de « maudit manège » (éditions Bernard Barrault, mars 1986, 386 pages, 78 FRF) :
« Un soir, environ cinq ans après la mort de Betty, j'ai bien cru que ma dernière heure venait d'arriver. Et Dieu sait que je m'attendais pas du tout à ça. »
Mais le Djian débutant n'aurait pas écrit un truc de ce genre :
« Maintenant, il connaissait la douceur. Il savait désormais ce qu'une femme avait à offrir, au-delà du sexe. Il était au courant, désormais. Il se sentait apaisé. » (incidences, p.215)
Allez-y, plongez dans la faille du dernier des Djian.
Alexandre Anizy