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"Capitalisme et pulsion de mort" de Gilles DOSTALER et Bernard MARIS (II)

Publié le par Alexandre Anizy

Lire auparavant la note I portant le même titre.

Le premier chapitre de cet essai porte naturellement sur FREUD et la pulsion de mort.

 

C’est dans « au-delà du principe de plaisir » (1920) que FREUD expose la thèse selon laquelle l’espèce humaine est sujette à 2 sortes de pulsions (« trieb », en allemand), « celles qui veulent conduire la vie à la mort et les autres, les pulsions sexuelles, qui sans cesse tendent vers le renouvellement de la vie et l’imposent » (Freud, cité p. 27).

La chose serait trop simple si le combat se résumait à une lutte entre Eros et Thanatos. La pulsion sexuelle contient un élément sadique, si bien que « le principe de plaisir semble être tout simplement au service des pulsions de mort » (Freud, cité p. 27). En fait, la pulsion de mort se cache derrière l’Eros : la mort est « un objet de désir paradoxal et donc exemplaire : c’est l’objet de désir qui nous libère finalement du désir. C’est, aux deux sens du terme, la fin de notre souffrance » (Phillips, cité p.29). La souffrance de la séparation du monde maternel, le désir de restaurer ce « passé fusionnel ».

« Vouloir nous désintégrer et désintégrer le monde est notre désir primordial et suicidaire. » (p.29)

 

Mais la pulsion de vie est dans chaque individu, l’incitant à s’unir aux autres pour la survie de l’espèce : en la détournant, Eros utilise l’énergie de la pulsion de mort pour exploiter et détruire la nature pour le bien de l’humanité. Ainsi, nous sommes « obligés d’admettre l’hypothèse selon laquelle un principe de mort est incorporé à la structure et à la substance même de tous les efforts humains constructifs » (p.31). Autrement dit, le progrès rassemble des forces de plus en plus destructrices.

On pourrait penser que l’instinct de vie, ayant imposé la nécessité du collectif, réussit à contenir le mal grâce à la Loi (« tu ne tueras point ») et à la culture (toutes marques d’une communion de l’espèce humaine, renvoyant notamment à l’amour et au devoir d’aimer). Mais 2 problèmes apparaissent : d’une part, en faisant miroiter du bonheur (retour au « monde maternel »), la pulsion de mort apaise, de même que son contenu sadique et érotique apporte des satisfactions ; d’autre part, « la psychologie des masses … peut être tout à fait mortifère (…) [puisque] la collectivité n’est jamais pacifiée » (p.32).

L’Eros, collectif, doit toujours contenir Thanatos sous ses formes individuelles qui s’agglomèrent aussi en force collective destructrice.

(A suivre)

 

Alexandre ANIZY

"Capitalisme et pulsion de mort" de Gilles DOSTALER et Bernard MARIS (I)

Publié le par Alexandre Anizy

En lisant ce livre, nous retrouvons une problématique qui nous intéressa, il y a presque 30 ans. Bien qu’il ne soit pas exempt de critiques, que nous résumerons dans un billet à la fin des notes, « Capitalisme et pulsion de mort » (Albin Michel, janvier 2009, 168 pages, 15 €) est un ouvrage utile et opportun, puisqu’il s’agit d’une thèse sur les racines du capitalisme qui, comme chacun le pressent, est en crise profonde. Ce n’est pas un exercice de rhétorique sur l’immoralité du milieu bancaire, ni un catalogue de mesures techniques pour réamorcer le système financier en déroute.   

Gilles DOSTALER et Bernard MARIS, 2 économistes émérites ayant un lien avec l’université de Paris VIII, sont parfaitement qualifiés pour aborder un tel sujet. D’ailleurs, il n’y a qu’à regarder la bibliographie pour comprendre que ce livre ne peut être le fruit que de longues années de recherche. Son originalité (mais ils ont des précurseurs, qu’ils présentent eux-mêmes en note de la page 23 notamment) tient dans l’analyse du rapport entre les œuvres de FREUD et de KEYNES.

 

« Ce qu’enseignent FREUD et KEYNES, nous espérons le montrer dans ce livre, c’est que ce désir d’équilibre qui appartient au capitalisme, toujours présent, mais toujours repoussé dans la croissance, n’est autre qu’une pulsion de mort. » (p. 8-9) 

 

Le problème fondamental est posé en prologue grâce à Claude LéVI-STRAUSS : les démographes ont prédit un pic de population à 9 milliards d’individus en 2050, puis une baisse rapide et, « à l’échelle de quelques siècles une menace pèsera sur la survie de notre espèce. De toute façon, elle aura exercé ses ravages sur la diversité non seulement culturelle, mais aussi biologique en faisant disparaître quantité d’espèces animales et végétales. » (Cité p. 14)

Ces ravages constituent indéniablement un résultat du capitalisme défini « comme le moment où l’invention et la technique sont détournées, canalisées et systématiquement appliquées à l’accumulation des biens ». (p. 16) Dans les années 1950, en prolongement des théories freudiennes sur l’évolution des civilisations, Herbert MARCUSE avec « Eros et civilisation » et Norman BROWN avec « Eros et Thanatos » (cités par les auteurs ; répétons-le, c’est vraiment un travail sérieux, qui offre à chaque lecteur la possibilité d’aller aux sources qui l’intéressent) avaient écrit sur la lutte entre les pulsions de vie et de mort.

De mémoire, nous soulignons que le livre de MARCUSE est un bon exemple de l’approche freudo-marxiste, soit une dialectique transcendante et apologétique comme disait Georges GURVITCH.

Mais avant eux, l’économiste « KEYNES a fait le lien entre la pulsion de mort, la préférence pour la liquidité et la tendance rentière des économies » (p. 19), au point de souhaiter « l’euthanasie du rentier ».

(À suivre)

 

Alexandre ANIZY

La représentation du G20 de Londres

Publié le par Alexandre Anizy

A croire la majorité de la presse, le sommet du G20 de Londres s’est achevé sur un succès. Vous voulez un signe tangible ? Toutes les Bourses ont nettement progressé depuis le jeudi 2 avril, ce qui démontrerait le « retour de la confiance ».

Mais ce n’est qu’une coïncidence (vraiment ?) : le 2 avril était aussi le 1er jour d’application d’une nouvelle règle comptable, décidée il y a quelques mois, pour l’évaluation des actifs d’une société : le prix retenu peut être supérieur à celui du marché.

La hausse boursière due au G20 ? D’abord purement technique.

 

Si l’on examine le communiqué final de Londres, que lit-on ?

Concernant la refonte du système monétaire international : silence.

Concernant les paradis fiscaux : au lieu de se donner les moyens d’agir contre les paradis fiscaux, le G20 parle modestement de sanctions (lesquelles ? rendez-vous au prochain G20 pour le savoir, enfin peut-être …) contre ceux qui ne seraient pas coopératifs ; la City étant la place financière la plus opaque du monde et l’Etat du Delaware étant un paradis intérieur des USA, croyez-vous que ces 2 entités seront un jour considérées comme non coopératives ? Sur la 1ère liste noire publiée figurent 4 malheureux pays (Costa Rica, Uruguay, Philippines, Malaisie) quand par exemple Jersey (dépendant de Londres, rappelons-le) est sur la liste blanche, celle des pays au-dessus de tout soupçon … Une répétition de la mascarade des listes noires établies en 2000 par l’OCDE, le Gafi et le Forum de stabilité financière, qui finirent quasiment vides …

Concernant les Credit Default Swaps (CDS) : rien n’est fait concrètement et immédiatement contre cette véritable bombe au cœur du système financier mondial.

Arrêtons-nous là.

 

Que faut-il retenir du G20 de Londres ?

La Chine est une pièce maîtresse sur l’échiquier mondial, qui affirme clairement son rang lorsqu’elle demande la fin de l’étalon-dollar et la création d’une monnaie internationale de réserve, comme la Russie. Mais pour les Chinois, on ne peut s’empêcher de croire que l’effet secondaire était d’abord recherché, puisqu’il devrait être immédiat : éreinter le dollar contribue à sa dévaluation, ce qui est bon pour le commerce chinois en dernière analyse. Comme la Chine a pris des mesures qui ont déjà eu pour conséquence une baisse de 5 à 10 %, hors effet monétaire, de ses prix à l’exportation, force est de constater que le modèle mercantiliste est toujours d’actualité à Pékin.

 

D’aucuns pensent que ce G20 confirme le triomphe de la mondialisation libérale. Nous penchons pour une avancée politique de l’économie communiste de marché (lire notre note du 2 février 2008 « l’Europe à la mode HAYEK est une économie communiste de marché »).  

 

Alexandre ANIZY

Le chant mineur de George CHESBRO

Publié le par Alexandre Anizy

La construction de ce polar au style sobre est crédible. Mais nous n’y retrouvons pas la richesse de « Bone » : les personnages-clés étant récurrents, la dimension psychologique est traitée rapidement par nécessité, puisqu’il ne faut pas lasser le lecteur fidèle par des répétitions.

 

Au final, on quitte le « chant funèbre en rouge majeur » avec l’idée que George CHESBRO est un bon artisan, dont le chef d’œuvre semble bien être « Bone », mais qu’il ne joue pas dans la catégorie des BURKE, ELLROY, par exemple.

 

Alexandre Anizy

L'os de George CHESBRO

Publié le par Alexandre Anizy

New York sert de décor à « Bone » (poche Rivages noir, 1993, 431 p.), le polar de George CHESBRO qui se déroule dans le milieu des Sans Domicile Fixe, des clochards qui n’ont rien de célestes.

 

C’est un très bon livre (le meilleur de CHESBRO ?) : le contexte, le style, les caractères dépeints, donnent envie de le dévorer.

 

Alexandre Anizy

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