Un zeste d'inflation ne nuirait pas
La poussée inflationniste actuelle provient principalement des tensions sur les marchés de l’énergie et des matières premières : c’est, au niveau mondial, une réallocation des ressources qui est en gestation sur les différents marchés où règne la loi de l’offre et de la demande.
L’inflation sous-jacente, celle que les banquiers centraux doivent limiter en temps normal, est faible (moins de 2 %).
Comme nous l’avons dit avec Patrick ARTUS (lire les notes économiques sur « les archaïques des banques centrales »), pour résumer la situation sur le front monétaire, il n’y a pas d’inflation dans la zone euro. Partant de ce constat et compte tenu de la dégradation de la conjoncture (c’est un euphémisme), il est utile de poser la question : un zeste d’inflation nuirait-il à l’économie européenne ?
Voici la réponse de Jean-Paul POLLIN (membre du Cercle des économistes ; professeur d’Université).
« D’une façon générale, l’inflation a toujours un effet redistributif : il y a des pays qui gagnent et d’autres qui perdent. »
« La France a fait ses Trente Glorieuses [1945 – 1975] avec une inflation élevé (…). (…). Donc, a priori, c’est une ponction qui touche plus les détenteurs de capitaux que les salariés. »
« Aujourd’hui, la question pour les économies occidentales se résume à savoir comment va se répartir cette perte de pouvoir d’achat. »
Dans notre note du 12 janvier 2008, nous disions clairement de quel côté penche la BCE : les rentiers.
Dans la bataille entre le capital et le travail, « il y a un moment où le rapport de force c’est aussi une question de désespoir et de détermination des salariés. »
« Ce dont elles [les banques centrales] doivent s’inquiéter en premier lieu, c’est moins de la hausse générale des prix que le niveau de l’inflation sous-jacente. »
Ce que Patrick ARTUS, ce que nous écrivons ci-dessus.
L’objectif de 2 %, que la BCE s’est elle-même fixée (les statuts de la BCE sont en gros ceux de la Bundesbank), est déjà atteint, et de plus, il n’a pas valeur de traité.
Les économistes sont d’accord pour dire que, pour qu’une économie fonctionne bien, « (…) il est normal qu’il y ait une certaine dérive des prix, entre 2 et 3 %. »
En guise de conclusion, force est de constater l’absence réelle de politique : « En Europe, nous nous retrouvons dans une situation où il n’y a plus trop de politique monétaire, pas de politique de change et la politique budgétaire se limite à mettre tout le monde sous les 3 % de déficit. » Une indigence intellectuelle affligeante.
Alexandre Anizy