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Les fruits de l'hiver de Bernard Clavel

Publié le par Alexandre Anizy

Ces derniers temps, tellement d'écrivassiers ont gâché notre plaisir que nous nous sommes retournés vers des écrivains qui avaient pignon sur rue il y a 30 ans et plus. Comme nous gardions un excellent souvenir de Bernard Clavel, nous empruntâmes « les fruits de l'hiver » (Robert Laffont, 1968) à une bibliothèque de province.

Parlons-en aujourd'hui, 6 juin 2010.


Dès les premières phrases, le lecteur est plongé dans l'ambiance et le décor:

« Le matin du 1er octobre 1943, le père Dubois s'éveilla bien avant l'aube. Il avait mal dormi. Une douleur sourde lui tenait la tête comme un cercle de fer qui se resserrait par moments. Il demeura quelques minutes l'oreille tendue, à écouter la nuit. Aucun bruit ne parvenait du dehors et le vent d'ouest, après avoir couru durant trois jours, semblait s'être arrêté sans apporter la pluie. Le père Dubois s'assit lentement sur son lit, se tourna sur le côté et posa les pieds sur le parquet froid à la recherche de ses pantoufles. »

Le style est sobre et efficace, ce qui ne l'empêche pas d'être travaillé.


Dans ce roman, Bernard Clavel dépeint les derniers mois d'un vieux couple, à la fin de la guerre. Tout y passe : l'amour chez ces gens-là, le fils réfractaire au STO, le fils un peu collaborateur d'abord pour raison marchande mais pas seulement, la vie ordinaire sous l'Occupation, la Libération sans gloriole, la cupidité de certains héritiers … L'écrivailleur gratte jusqu'à l'os en accordant son attention à tous les personnages, pour que la part d'humanité qui est en chacun d'eux puisse rejaillir.


Avec Bernard Clavel, c'est toujours du bel ouvrage. Alors n'hésitez pas !

Savourez un "vieux" Clavel plutôt qu'un produit actuel déjà avarié !



Alexandre Anizy

 

 

Le Président allemand Horst Köhler dit en premier

Publié le par Alexandre Anizy

Le Président allemand Horst Köhler a démissionné abruptement le 31 mai 2010 après avoir soulevé un tollé national à son retour d'Afghanistan, en affirmant que l'action militaire allemande à l'étranger est « nécessaire pour maintenir nos intérêts comme, par exemple, libérer les routes commerciales ou prévenir des instabilités régionales qui pourraient avoir un impact négatif sur nos perspectives en termes de commerce, d'emplois et de revenus ».


Horst Köhler avait une longue carrière de haut fonctionnaire, qu'il finit comme dirigeant du FMI, avant d'entrer pleinement en politique sous la bannière du CDU, le parti de Mutti Merkel. Qu'il est étrange de voir la presse qualifier généralement de gaffe ce propos sensé, auquel l'oligarchie allemande adhère.


Mais voilà, le peuple allemand est hostile à ses expéditions militaires en terres étrangères, notamment à celle d'Afghanistan. Alors il fallait lui concéder quelque chose, surtout après le comportement peu glorieux de l'État-major et la débandade lamentable de son aristocrate ministre !


Guy Béart chantait autrefois :

« (…) le premier qui dit se trouve toujours sacrifié (...) » (la vérité)



Alexandre Anizy

 

L'oracle Jacques Attali comme un cabri

Publié le par Alexandre Anizy

 

En 2007, Jacques Attali n'a pas vu venir la crise systémique de l'économie mondiale, mais il en a perçu la gravité quasiment depuis son déclenchement, contrairement au "prétentieux meilleur économiste de gauche" Dominique Strauss-Kahn, l'ami du CAC 40, qui faisait la leçon en petit maître infatué : (re)lire la note http://www.alexandreanizy.com/article-15723746.html .


Conscient qu'il faut « remettre en question la définition marchande du mieux-être », Attali comprend qu'il s'agira « bien d'une mutation radicale de la nature même des biens matériels produits et de leur rapport avec le temps, les sensations et les sentiments. » (Express du 17 décembre 2009) Il forge alors le concept de l'adéqroissance, en affirmant que « cette mutation exigera d'énormes investissements qui se traduiront, longtemps encore, par une forte croissance de la production matérielle, devenue adéquate, c'est-à-dire de plus en plus économe en énergie et (…) tournée vers des réalisations immatérielles, faites de gratuité et d'altruisme, de spiritualité et de plénitude. » (idem).

C'est encore une proposition transcendantale, voire eschatologique.


Mais, dédouané par son espérance d'un mieux-être spirituel sans indigence, il peut répondre aux questions présentes par des recettes fortement teintées de libéralisme (voir par exemple les recommandations de sa Commission pour la croissance), conformes finalement à l'état d'esprit général. En janvier 2008, c'était la croissance (chopée avec les dents s'il le faut … souvenez-vous de 2007), et en 2010, c'est l'évitement d'une « impasse économique, financière et sociale à l'horizon 2020 », grâce à l'assainissement des finances publiques (autrement dit, la réduction des dépenses de l'Etat dans un environnement économique de stagnation …).

En économie, l'oracle Attali suit en fait la tendance dominante.



Et puis concernant l'Union Allemande, Attali se berce d'illusions, comme tant d'autres. « L'arrogance allemande n'est que le reflet de notre incapacité à proposer une stratégie européenne, faite d'équilibre national et de relance collective. » (express 26 mai 2010).

Une analyse bizarre, puisque c'est bien Mutti Merkel qui a bloqué, tergiversé sur le plan de sauvetage des banques, qui a feint d'hésiter (pour cause d'élection régionale, de toute évidence : un comportement "populiste", comme disent d'ordinaire les politologues à l'encontre de tout homme politique qui flatte les "mauvais penchants" de l'opinion – selon le politiquement correct) dans la crise grecque pour finalement imposer le FMI américain dans le sirtaki financier, annihilant du même coup l'espoir d'une autonomie politique et économique de l'Union Allemande (i.e. L'UE), qui refuse toute idée de relance en Allemagne et le prouve concrètement en exposant ces jours-ci un programme d'augmentation de la TVA et des impôts …

Que faut-il de plus pour ouvrir les yeux de Jacques Attali ?


Par ailleurs, nous précisons que le terme d'arrogance allemande ne correspond pas à la réalité : que Mutti Merkel défende prioritairement les intérêts de son peuple, comme les chanceliers précédents l'ont fait, non sans brio (Helmut KOHL n'a-t-il pas roulé dans la farine diplomatique le francisquain Mitterrand lors de la réunification allemande et la création de l'euro ?), nous semble une bonne chose, du point de vue démocratique, qui n'a strictement aucun rapport avec une quelconque attitude déplaisante.

Non, ce qui est vraiment affligeant dans cette affaire, c'est que l'oracle Attali se comporte comme les autres cabris français.



Alexandre Anizy


 

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