SARKOZY DE NAGY BOCSA selon Philippe GUIBERT et Christian SALMON

Publié le par Alexandre Anizy

Après avoir publié « le descenseur social » (Plon 2006), Philippe GUIBERT revient dans les vitrines avec « la Téléprésidente » (Plon, 194 pages, 10 €), un essai dans lequel il analyse la stratégie sarkozyenne.

 

Les performances médiatiques (« la performance médiatique est la mise en images et en mots d’une pensée politique » : elle nécessite la cohérence sur la durée) de SARKOZY DE NAGY BOCSA reposent sur la rupture avec les codes usés de CHIRAC et MITTERRAND : « Avec lui, la transgression est aussi permanente que l’exposition. La rareté est un concept antisarkozyen, la retenue aussi. »

Fournissant la matière première aux médias, il ne les subit pas et en maîtrise la production : Dick CHENEY (vice-président américain) a dit « si vous ne maîtrisez pas l’agenda des médias, ils saccageront votre présidence ».

Il utilise le direct, donnant ainsi l’image d’une confrontation avec la vie, soit une « présence réelle » (concept de Régis DEBRAY) qui prouve au moins le volontarisme et la capacité d’action.

Selon GUIBERT, « la force de Nicolas SARKOZY est d’avoir su mettre en scène une pensée politique structurée et d’avoir su la décliner en images et en mots pour la télévision. »

Dit autrement, on retrouve bien ici « la mise en fiction », concept présenté par Christian SALMON dans « Storytelling » (éditions La Découverte, 254 pages, 18 €) : « Le storytelling est une technique de domestication de cette machine médiatique qui tourne 24 heures sur 24 et qui, si on la laissait vivre librement, pourrait se retourner contre les dirigeants politiques. (…). Pour que cet orchestre joue à l’unisson, il faut un narrateur qui est le chef d’orchestre de la story politique. Au bout du compte, ce qui est en jeu, c’est la dissolution du politique. » (Christian SALMON, 18 décembre 2007)

 

Quelle est la méthode sarkozyenne de propagande ?

« Les règles de base de la communication de SARKOZY n’ont pas fondamentalement changé depuis le 6 mai 2007. Création d’événements permanents, saturation de l’espace médiatique télévisé … » (Philippe GUIBERT) A cela, il faut ajouter la cohérence d’une pensée politique structurée qui porte des diagnostics sur les maux de la société française en y répondant immédiatement.

 
Donnons un exemple. 
Diagnostic : les Français souffrent d’un manque de pouvoir d’achat.
Solutions immédiates (ce que GUIBERT appellent les marqueurs) : les heures supplémentaires, la détaxation des droits de succession, etc.

« Le marqueur atteste de la capacité d’action immédiate parce qu’il s’inscrit dans les vécus individuels. » (Philippe GUIBERT)

Force est de constater aujourd’hui que le Président ubiquiste SARKOZY DE NAGY BOCSA détient le monopole de la fabrication du discours politique.

 
Pendant la campagne présidentielle, Marie-Ségolène ROYAL la madone Déate avait des diagnostics innovants selon GUIBERT, mais ses marqueurs faisaient misère. Quant à François BAYROU, il n’a jamais trouvé une image pour illustrer son marqueur « union des meilleurs ».

Toute la différence entre les candidats SARKOZY et ROYAL se résume en 2 phrases : « L’un [Sarkozy, AA] a travaillé sur la scénarisation. L’autre [Royal, AA] a tenu grâce à des exploits personnels. » (Philippe GUIBERT)

 

Janvier 2008 : quid novi ?
Le chef narrateur, le Président ubiquiste SARKOZY DE NAGY BOCSA, maîtrise bien son sujet : la mise en scène de l’histoire de son 1er mandat.
Chapeau l’artiste !

Selon Christian SALMON, « lorsque la situation économique ou internationale ramènera le réel au premier plan, ce feuilleton se volatilisera. » C’est indubitable : on n’échappe pas au principe de réalité. Mais la fin du feuilleton (et non pas histoire) ne signifie pas le rejet du sujet.

Ce que l’opposition des notables, qui se croit sérieuse, n’a pas encore compris : elle semble attendre l’implosion de l’histoire sarkozyenne, sans proposer une offre alternative (i.e. diagnostics, marqueurs, etc.)  

« Pour déconstruire ce genre de choses, il est vain d’attendre que le réel se venge. L’interprétation du réel n’est pas une donnée, elle se construit par le combat politique et médiatique. » (Philippe GUIBERT)

Le réel sarkozyen va perdurer.

 

Alexandre Anizy