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notes culturelles

La bataille de Patrick RAMBAUD

Publié le par Alexandre Anizy

En 1997, Patrick RAMBAUD obtient le prix Goncourt pour « la bataille » (Grasset, 302 p., 108 FRF). Il a poursuivi dans la veine napoléonienne. 

On a bien senti que ce sujet était une passion pour l’auteur, mais le compte n’y est pas : comme le style est plat, on ne vit pas la bataille, ni sur le plan militaire ni sur le plan humain.

La futilité caractérise le travail de Patrick RAMBAUD.
C’était déjà le cas au temps de l’hebdomadaire « Actuel », en 1970.  

 
Alexandre Anizy

Giorgio AGAMBEN et la signature

Publié le par Alexandre Anizy

Nous signalons la parution de « Signatura rerum. Sur la méthode » (édition Vrin, 144 p., 10 €) du philosophe italien Giorgio AGAMBEN.

Pour ceux qui s’intéressent aux concepts de paradigme, de signature, d’archéologie.
Par exemple, pour AGAMBEN le camp de concentration serait le paradigme de l’Occident, l’état d’exception le paradigme du gouvernement.

Et toute chose porte une signature : il n’y a pas de signe pur, non marqué : d’où l’importance de traquer la vérité dans les détails, les rebuts, les déviations, comme le faisait Michel FOUCAULT.

C’est pourquoi nous sommes aussi attentifs à la communication non verbale.

 
Alexandre Anizy

Le style d'Hector BIANCIOTTI

Publié le par Alexandre Anizy

On pourrait dire que la vie d’Hector BIANCIOTTI est déjà un roman. Vous la découvrirez en partie dans « ce que la nuit raconte au jour » (Grasset, 1992, 332 pages, 115 FRF).

Sa langue maternelle étant l’espagnol, il cessa de l’employer au début des années 80, pour lui préférer le français dès la première rédaction de ses textes. Nous y avons gagné un styliste.

« L’air tiède du matin devenait chaud lorsque, paniers d’osier à la main, remplis de vivres, de rafraîchissements, Luis et moi nous aventurions, suivis par les deux sœurs, parmi les buissons épineux couleur de cendre qui recouvraient la frange d’un kilomètre environ de largeur séparant la ville du fleuve. On cherchait le sentier de l’année précédente, que la croissance de la végétation réduisait à une esquisse sans cesse interrompue. » (p.249)

 
L’avant-goût d’une prochaine découverte ?

 
Alexandre Anizy

La langue française du vaudois C.F. RAMUZ

Publié le par Alexandre Anizy

En 1929, l’éditeur Grasset publiait « une lettre » de l’écrivain vaudois C.F. RAMUZ, l’incipit de « Salutation paysanne » (242 pages). Le lendemain de notre note « la question de la Wallonie », il nous semble intéressant de la résumer, notamment pour un point de différenciation avec la situation wallonne.  

 
Pour commencer, l’écrivain suisse remercie l’éditeur français d’être venu le chercher et d’avoir persisté alors que les ventes n’étaient pas au rendez-vous.

Puis il aborde un deuxième thème : « [votre première lettre] était sortie de l’Etat français pour passer dans un autre Etat où il se trouvait qu’on parlait français (entre autres langues), mais qui n’était plus la France, au sens politique du mot. C’était la France encore par la langue, et ce n’était donc plus la France, tout en l’étant : situation ambiguë (…). Je suis heureux d’être Vaudois ; je suis même fier d’être Vaudois.» (p.15-16)

Mais la frontière n’est pas seulement politique : elle est aussi géographique, parce que la chaîne de montagnes du Jura sépare les 2 Etats. Si le côté français du Jura s’élève progressivement par une succession de plateaux, le côté suisse est « une descente presque à pic, de sorte qu’il n’y a pas symétrie, ni continuité dans la conformation du sol, mais rupture et rupture soudaine ; - et nous sommes ici comme dans un nid, nous autres Vaudois, (…) » (p.19)

Après une description géographique de son territoire, RAMUZ précise : « le Pays de Vaud, comme il s’est appelé dans les vieux temps et il le mérite ; car il est avant tout un pays, quoique tout petit : on veut dire qu’il est complet, qu’il connaît toutes les productions et qu’en cas de besoin, il pourrait entièrement se suffire à lui-même. » (p.22)

« [ce pays] n’a jamais fait partie de la nation française. Et socialement non plus, il n’a jamais pris place dans la collectivité française (…). » (p.24)

 
Concernant la Wallonie, force est de constater qu’il n’y a pas de frontière géographique entre les 2 territoires politiques.

 
Le vaudois RAMUZ aborde un troisième thème. « Vous êtes des Français de France, nous des Français de langue et par la langue seulement. » (p.25) Il précise aussitôt : « J’aime votre XVIIe siècle, j’aime le français, un certain français dont il a définitivement sanctionné l’usage, mais n’y puis voir pourtant (parce que je viens du dehors) qu’un phénomène tout occasionnel, tout contingent (…). (…) je me refuse de voir dans cette langue « classique » la langue unique (…) codifiée une fois pour toutes. » (p.28) Et nous arrivons à la préoccupation majeure de RAMUZ : « Et ce ne serait rien encore si seulement « j’écrivais mal », mais on m’accuse encore de mal écrire « exprès », ce qui aggrave mon cas (…). » (p.31)

Le vaudois tient à se justifier : « (…) ayant toujours tâché au contraire d’être véridique et ne m’étant mis à « mal écrire » que précisément par souci d’être plus vrai ou, si on veut, plus authentique (…). Voilà le point central pour moi d’où je suis parti pour bien faire et où on me ramène assez honteusement en me disant que j’ai mal fait. » (p.32)

Pour RAMUZ, le français a deux catégories : le langage académique et le langage parlé. « (…) peut-être qu’on pourrait essayer de ne plus traduire. L’homme qui s’exprime vraiment ne traduit pas. Il laisse le mouvement se faire en lui jusqu’à son terme, laissant ce même mouvement grouper les mots à sa façon. » (p.38-39)

 
Et RAMUZ a fait son choix : « J’ai écrit (j’ai essayé d’écrire) une langue parlée : la langue parlée par ceux dont je suis né. J’ai essayé de me servir d’une langue-geste qui continuât à être celle on se servait autour de moi, non de la langue-signe qui était dans les livres. » (p.56)
 

Voilà pourquoi le grand Louis Ferdinand CELINE a dit qu’à part lui il ne restait que RAMUZ.

 
Alexandre Anizy

A propos de Milorad PAVIC

Publié le par Alexandre Anizy

Il y a des textes littéraires, quand ce n’est pas l’ensemble de l’œuvre d’un auteur, dans lesquels vous n’arrivez pas à pénétrer : le style, la structure de l’ouvrage, la psychologie des personnages, etc., ne vous touchent pas et même parfois vous révulsent. Vous êtes étrangers au monde dépeint, hors d’une citadelle hermétique.

Vous connaissez cette sensation.

Par exemple, Marcel PROUST et sa recherche du temps perdu nous échappèrent longtemps. Mais le 3ème essai fut le bon.

 
« Le dictionnaire khazar » de Milorad PAVIC, que d’aucuns considèrent comme un chef d’œuvre, fait partie de ces forteresses imprenables, à ce jour. Ce n’est pas faute d’avoir essayé à 2 reprises.

 
Par contre, « les chevaux de Saint-Marc » (Belfond, 1995, 150 p., 98 FRF) nous emportèrent sans difficulté : on se souvient du voyage plaisant, mais pas de la destination.

 
Alexandre Anizy

A fond de cale avec Vladimir ARSENIJEVIC

Publié le par Alexandre Anizy

Belgrade en 1991, au temps de la guerre : une jeunesse en suspension dans un monde sans avenir. 
Avec « à fond de cale » (Plon, 1996, 150 pages, 98 FRF), Vladimir ARSENIJEVIC nous offre une vision tragique, avec l’humour et la démesure des Balkans.

« Je me croyais capable de résister à l’émotion et, pourtant, je faillis fondre en larmes quand je sentis son moignon me tapoter l’épaule. Ce moignon, il aurait su quoi en faire si on avait pu lui donner la chance de redevenir un bras.» (p.81)

Un autre talent à découvrir.

Alexandre Anizy

Le jardinier de Sarajevo de Miljenko JERGOVIC

Publié le par Alexandre Anizy

Croate né à Sarajevo en 1966, Miljenko JERGOVIC nous raconte Sarajevo pendant la guerre (la dernière !) à travers de courtes nouvelles.
Le quotidien d’une ville sous les obus et les tirs de « snipers ».
Mais « le jardinier de Sarajevo » (Nil éditions 1995, 180 p., 97 FRF) n’est pas larmoyant.

 « Les gens meurent avec pathétisme, ils veulent que les autres se sentent coupables. Palach s’est arrosé d’essence et immolé par le feu tandis que d’aucuns, à 80 ans, s’acharnent encore à respirer ; (…). A la fin, il se trouve bien sûr un play-boy, adepte de la dolce vita, pour affirmer que le suicide est la seule question philosophique. » (p.105)

Un talent à découvrir.

 
Alexandre Anizy

SOLJENITSYNE : mort d'un homme révolté

Publié le par Alexandre Anizy

Le grand écrivain russe SOLJENITSYNE est mort.

Nous nous souvenons.

C’était au début des années 1970 : la lecture de «une journée d’Ivan Denissovitch » nous vaccinait (mais était-ce vraiment nécessaire ?) contre les mirages du marxisme-léninisme.

SOLJENITSYNE nous paraissait rejoindre à sa manière les révolutionnaires anti-tsaristes de la fin du XIXème, ceux dont parle Albert CAMUS dans son livre « l’homme révolté ».

 

Puis « l’archipel du goulag » sortait, et l’artiste triomphait de la barbarie. Nous nous souvenons d’une émission télévisée où Max-Pol FOUCHET (?) contestait la qualité littéraire de ce livre, des « vieux nouveaux philosophes » qui aboyaient déjà contre la Russie …

 

Après vinrent les honneurs, l’exil, le travail opiniâtre sur le malheur russe, un retour aux sources qui ressemblait par certains côtés à une dérive réactionnaire …

 

Ce que nous retenons avec SOLJENITSYNE, selon la formule de Jean-Paul SARTRE : on a toujours raison de se révolter.

 

Alexandre Anizy

 

 

Richard MILLET vend des mauvaises graines

Publié le par Alexandre Anizy

Richard MILLET est un membre influent du Comité de lecture de Gallimard, qui le publie : d’aucuns ont l’élégance de ne pas s’autoéditer, mais c’est une valeur désuète dans le milieu germanopratin. Bien entendu, c’est ce genre d’individu qui sans vergogne donne des leçons de littérature : s’étant érigé en censeur de la mauvaise, il n’a pas encore compris que ce n’est pas forcément avec des mauvais sentiments qu’on produit de la bonne.

Toujours est-il que nous décidâmes de lire la prose de ce monsieur : pourquoi pas « dévorations » (Gallimard 2006, 220 pages, 16,50 €) ?

« Il avait écrit une trentaine de livres et il refusait d’en entendre parler, non plus que de l’étrange passion qu’avait été l’écriture, pendant si longtemps, peut-être depuis toujours, et qui l’avait conduit jusque chez nous, ayant laissé derrière lui des terres incendiées et continuant à brûler tout ce qui se rapportait à son passé, comme ce mercredi de novembre où je l’avais trouvé non pas dans la salle de classe ni dans sa cuisine mais dans le petit pré de derrière, en train de mettre le feu à des papiers, des lettres, des cartes postales, des coupures de presse, tout ce qui avait trait à ce qu’il appelait, avec l’air de cracher dans l’eau, sa « vie littéraire ». » (p.111)   

 
Autant le dire simplement : Richard MILLET est un grammairien qui rédige des fiches indigestes ; avec lui, la littérature vous reste sur l’estomac. En tant que flic de la syntaxe, ce corrézien a sans doute des compétences, mais en tant que romancier, nous l’encourageons à persévérer.  

 
Alexandre Anizy

"Les années" d'Annie ERNAUX

Publié le par Alexandre Anizy

En janvier 2008, Annie ERNAUX revenait sur les tables des libraires avec « les années » (Gallimard, 242 pages, 17 €). Bien que nous ayons lu un ou deux articles réservés, nous décidâmes de feuilleter l’album tamisé d’un passé récent, parce que cet écrivain n’était pas une inconnue, parce qu’il nous avait intéressés autrefois avec « une place » et « passion simple » (en poche Folio). 

« La distance qui sépare le passé du présent se mesure peut-être à la lumière répandue sur le sol entre les ombres, glissant sur les visages, dessinant les plis d’une robe, à la clarté crépusculaire, quelle que soit l’heure de la pose, d’une photo en noir et blanc. » (p.65)

Sous une ligne mélodique fluide, nous retrouvons la précision qui parfois confine à la sécheresse. C’est du moins le souvenir que nous gardons des anciens textes d’Annie ERNAUX. Malheureusement, ce livre n’apparaît que comme la collation furtive d’instantanés fugaces qui, parce qu’elle émane de cet auteur, ne peut être ni anodine ni ennuyeuse.  

Qu’on ne se méprenne pas : un seul texte d’Annie ERNAUX vaut plus que toutes les foutaises narcissiques d’une Christine ANGOT, par exemple.

 
Mais pour cet auteur talentueux, « les années » ne seraient-elles pas de trop, comme on le dit d’un combat pour un boxeur ? 

 
Alexandre Anizy