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Perro muerto de Boris Quercia

Publié le par Alexandre Anizy

            Tant de livres comme celui de Boris Quercia méritent le cimetière des rejets.

 

 

            L'auteur, qui a de multiples casquettes, doit être du genre à sauter au cerveau du spectateur en le plaçant au coeur d'une action, comme le font si bien les cinéastes américains. Dans Tant de chiens (éditions Asphalte, 2015, en livrel), cela donne :

« Plusieurs pistolets mitrailleurs nous tirent dessus et les balles ricochent de partout, je suis planqué dans un cagibi où sont entreposées des bouteilles de gaz et les balles me sifflent aux oreilles. »

La suite est du même tonneau : style sobre et direct, actions, érotisme de bon aloi, quelques réflexions désolantes sur l'ordre des choses, par exemple  

« Si on apprend une chose en étant flic, c'est que les pères sont de vraies merdes dans ce pays [Chili. ndAA]. Ils fourrent leur bite et disparaissent. L'autre chose, c'est qu'ici personne ne paie pour ses fautes, à moins d'être pauvre. Mais ça ne compte pas, les pauvres paient toujours, ici comme ailleurs. » (p184/197), 

bonne structure narrative jusqu'au chapitre 43 (p188/197) où Boris Quercia salope son ouvrage, ayant peut-être une autre commande à honorer pour nourrir une deuxième maison ?

 

            No vale la pena comprar Perro muerto porque el trabajo no ha acabado.

 

 

 

Alexandre Anizy

 

L'albatros selon Anise Koltz et Anizy

Publié le par Alexandre Anizy

Anise Koltz  

 

Je suis un messager

sans message

un chanteur ambulant

sans chanson

 

Je traîne ma nostalgie

de ville en ville

j'ai oublié

la nouvelle que j'apporte

 

Je ne sais pas chanter

je suis un messager

sans message

comme le vent

 

                        (dans Somnambule du jour, Gallimard poésie)

 

 

 

Alexandre Anizy

 

Je suis un ouvrier sans travail

L'auguste chômeur de vos matins givrés

Un chanteur qui décade

Un railleur qui déraille

Ô folle intelligence

Un polémiste sans talent

Le dernier des arrivistes

Un homme sans dieu sans maître

Sans passion

Un dada qui déraisonne

Un jongleur de mots

Qui fait ses pitreries

Un misogyne sans aucun doute

Un poète réaliste

Qui crache sur tout

En bref

Un type sans illusion

Telle est ma définition

 

                        (dans Lumières froides, éditions ACT, 2016)

Moins ignorants avec Etienne Davodeau

Publié le par Alexandre Anizy

            Pour entrapercevoir le travail d'un viticulteur et d'un dessinateur, le roman graphique d'Etienne Davodeau est remarquable.

 

 

            Pendant qu'Aurian était à la recherche du n°234 d'un manga méga culte, nous balayions du regard les rayons BD d'une grande librairie quand soudain Les ignorants fixèrent notre attention : le titre et la couverture, ou inversement. Etienne Davodeau et son éditeur Futuropolis (août 2016, 268 pages) ont frappé fort !

            Le dessin ? Il se place quelque part entre Tendre violette de Servais (le Noir & Blanc de 1982) et le style de Cabu, c'est vous dire le niveau du bonhomme !

            Le scénario ? Davodeau se met au service du vigneron Richard Leroy pour vivre son travail afin de pouvoir le raconter : c'est un magnifique projet ... réussi ! Vous saurez tout sur la taille de la vigne en plein vent d'hiver, sur le chai, etc. Le chapitre 6 consacré à la biodynamie (ce fut sans doute un moment délicat du récit...) est vraiment bien ficelé : après l'avoir lu, vous admettrez qu'il est temps pour les consommateurs de congeler leurs cartes de crédit devant les produits pesticidés !

NB : à l'hectare, ce sont les vignes qui reçoivent le plus de saloperies, qui finissent dans nos verres.

 

            Mais comme cette expérience est un échange entre deux artisans, on en apprend autant sur les Salons du vin que de la bande dessinée, autant sur les domaines que sur les œuvres. Alors en route pour de nouvelles découvertes !

 

 

 

 

Alexandre Anizy

 

Les haies de Jean-Loup Trassard

Publié le par Alexandre Anizy

Comment apprécier le récit du paysan Jean-Loup Trassard ?

Evidemment il faut aimer, voire connaître un peu la campagne pour se délecter des propos de Jean-Loup Trassard dans L'homme des haies (en poche Folio et en livrel). En fait, il raconte une vie provinciale et surtout une expérience professionnelle sur 22 hectares.

Que de choses vous apprendrez ! Le paysan dans la négociation commerciale, le maquignon faisant son marché, la conduite des chevaux, l'élevage de la mère, le meilleur moment pour moissonner, la lieuse puis l'arrivée de la moissonneuse, la gestion des ressources humaines... non, là on blague ! En ce temps-là, on parlait du personnel, en l'occurrence des commis. Bref, l'auteur mayennais livre un savoir-faire, et même ses secrets pour un bon cidre !

« A barbeyer je trouvais des manches, sur les haies il y a souvent des bouées de queude, alors quand je voyais dedans une trique bien droite, je la coupais au sermiau, si c'était en automne, quand la sève est descendue, parce qu'il ne faudrait pas couper des manches au printemps, ils ne se garderaient pas, et puis en m'en allant je l'emmenais avec mes outils.

C'est toujours bon d'avoir des manches d'avance, j'aimais bien ça et je continue. Lui [c'est son fils, qui ne jure que par le tracteur et tutti quanti], il n'a jamais emmanché un outil de sa vie, il sait que je m'en occupe, mais les machines ne feront pas tout, il faudra bien des outils ! » (p.39/152)

Ce tailleur de haies (il goûtait cette tâche, aux temps précédant le grand remembrement du ministre Edgar Pisani) attache une grande importance aux manches des outils, qu'il préfère confectionner lui-même, parce qu'un manche trop gros, trop lourd, pas assez lisse, mal ajusté, ça fatigue inutilement l'homme, et il en raconte les étapes de la fabrication. Pour ses instruments, il apprécie le noisetier, que nous déconseillons aux apprentis bûcherons qui voudraient faire leurs haches (prenez plutôt du frêne ou du foyard).

Ah ! la chasse ! Mais ce gars-là abandonne au bout de 3 années où il n'aura pas fait de mal au gibier. Les lecteurs écolos n'auront donc pas d'excuses !

Alexandre Anizy

Irezumi de Takagi au tapis

Publié le par Alexandre Anizy

            Pour les éditions Denoël, les poubelles feront-elles Noël ? 

 

 

            Il faudrait demander aux éditions Denoël ce qui les a poussés à fouiller les poubelles du polar japonais, hormis l'intérêt financier. En effet, pourquoi exhumer un livre au rythme poussif, et pour tout dire de facture scolaire comme Irezumi de Akimitsu Takagi ? Un exemple :

            « Si l'Irezumi, le tatouage traditionnel japonais, possède une beauté indéniable, peu en reconnaissent volontiers la valeur intrinsèque. La faute, sans doute, à des préjugés coriaces - par exemple, que le tatouage se résumerait à des gribouillis d'amateur grossièrement gravés, ou encore que ses porteurs, hommes ou femmes, ne seraient tous que des yakuzas et autres rebuts de la société. » (p.14/223)

Nous vous épargnons la leçon d'histoire du tatouage...

 

            Quant à nous, abandon à la page 78/223.

 

 

Alexandre Anizy

 

Osez Elizabeth George !

Publié le par Alexandre Anizy

            Pour Noël, soignez votre réputation de lettré en offrant le dernier polar d'Elizabeth George.

 

 

            Une avalanche de conséquences , c'est le titre de l'ouvrage (Presse de la cité, septembre 2016, livrel à 15,99 € - trop cher !). Si l'américaine Elizabeth George se fait toujours aussi anglaise dans la facture, par le thème elle dépasse l'audace de bien des consœurs d'outre-Manche.

            Architectonique soignée, intrigue corsée, caractères des personnages finement brossés, style ciselé, que pourrait-on ajouter à cela pour saluer la qualité de ce roman ?

 

 

 

Alexandre Anizy

L'offrande de Dolores Redondo

Publié le par Alexandre Anizy

            Le triptyque de Dolores Redondo s'achève par l'offrande.

 

 

            L'écrivain espagnol Dolores Redondo achève son polar dans la vallée basque par Une offrande à la tempête (Mercure noir, 2016, en livrel) : le 3ème volet vaut les précédents.

 

 

 

Alexandre Anizy

 

L'usine de Jean-Pierre Levaray

Publié le par Alexandre Anizy

            Pour ceux qui ne connaissent pas l'usine...

 

 

            Pour ceux qui ne connaissent pas l'usine, ceux qui n'ont lu ni Putain d'usine, ni le mensuel CQFD, les éditions Libertalia ont eu la bonne idée de regrouper les chroniques de Jean-Pierre Levaray dans Je vous écris de l'usine (janvier 2016, 368 pages, 15 €). A picorer ou avaler d'un coup, c'est selon votre manière ou votre temps disponible.

 

            L'auteur ouvrier raconte le quotidien de son usine : les accidents (évités ou pas), les grèves, les plans de restructuration... les petits riens qui soudent le personnel, les moments fragiles ou drôles, comme L'internationaaaaaale (p.55), etc.  

 

Echantillon du style sobre :

            « Bernard était "ouvrier de fabrication", c'est à dire qu'il bossait dans un atelier où on fabriquait de l'acide phosphorique. Un acide bien décapant qu'on utilisait jusqu'à récemment dans la fabrication des engrais (mais aussi de certains produits alimentaires). Quand il est arrivé là, l'atelier semblait moderne par rapport à ces vieux ateliers d'engrais qui ressemblaient à Cayenne et où on ne faisait pas de vieux os. Seulement, travailler dans les poussières de gypse et de phosphate et dans les vapeurs d'acide, ça lui a dézingué les poumons à Bernard. » (p.155)

 

Pour ceux qui se sont plongés dans l'univers paysan de Marie-Hélène Lafon,

http://www.alexandreanizy.com/article-lire-et-promouvoir-le-joseph-de-marie-helene-lafon-124741797.html

 et encore

http://www.alexandreanizy.com/article-l-annonce-d-un-pays-par-marie-helene-lafon-124930069.html

un passage par l'établi de Levaray ne manquera pas d'intérêt. 

 

 

Alexandre Anizy

 

Le chant du signe d'Umberto Eco

Publié le par Alexandre Anizy

Pour la dernière fois, le magicien des lettres Umberto Eco s'en donnait à cœur joie.

En 2015, Umberto Eco publiait Numéro zéro (Grasset, en livrel et en poche), dans lequel il représente allègrement la décomposition morale de la médiacratie, assemble les extrapolations fumeuses des tenants du complot en tout genre... Le maître sémioticien livrait son dernier numéro.

Lui seul devait savoir que c'était son chant du signe.

Alexandre Anizy

L'édition d'un Chandernagor sans classe

Publié le par Alexandre Anizy

            Peut-être en mal de chiffres d'affaires, un éditeur (Le Cherche-Midi) commande une anthologie de poésie féminine à Françoise Chandernagor (Quand les femmes parlent d'amour, 2016, en livrel à 15,99 € - trop cher ! ) : tirage garanti.

 

 

            L'édition, comment ça marche ? Voilà un nouvel exemple du processus dans la France des Lettres, un milieu que nous avons déjà dépeint ici :

http://www.alexandreanizy.com/article-la-deroute-de-montety-et-les-moeurs-de-l-edition-120471868.html

Aujourd'hui, on prend Le Cherche-Midi :

  • l'éditeur sollicite un bouquin à Françoise Chandernagor, fille d'un député, entrée dans l'énarchie, mariée dans l'énarchie avec un vrai noble vivant sous les ors de la République (l'entre-soi de ces petits marquis devient effarant...) ;
  • l'histoire ne dit pas si le dit éditeur avait une "politesse" à rendre à cette jurée du Goncourt ;
  • l'écrivaine rassemble quelques poétesses en n'oubliant pas Vénus Khoury-Ghata (par ailleurs collaboratrice du Figaro ... qui accordera un article cousu de fil doré), et elle écrit quelques pages scolaires ;
  • les ami(e)s de la dame, qui font aussi dans le papier, ne manquent pas d'annoncer cette anthologie si originale (Express, Libération, Paris Match ; Point, La Grande Librairie, etc.) ;
  • même Bernard Pivot, qui est aussi membre du Goncourt, se fend d'une chronique d'un quart de page dans le Journal Du Dimanche du 20 novembre 2016...

La publicité à bon compte étant assurée, la coquetterie de l'écrivaine étant surmédiatisée (c'est bon pour son ego), le tiroir-caisse va tintinnabuler. Grand bien leur fasse !  

 

 

            Quant à la poésie... elle avait, elle avait, un Chandernagor sans classe.

 

 

 

Alexandre Anizy