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Peut-on suivre Pedro Garcia Rosado sur le Tage

Publié le par Alexandre Anizy

            Et dans les bas-fonds de Lisbonne ? 

 

 

            Avant de quitter Paris pour un séjour en Côte d'Opale, nous fîmes provision de livres dans la librairie de notre quartier : pas besoin du "géant américain qui fuit l'impôt et les taxes locales" pour être livré dans le meilleur délai !

            Ce faisant, nos yeux s'arrêtèrent sur Mort sur le Tage de Pedro Garcia Rosado (Livre de poche, novembre 2018), et la quatrième de couverture titilla notre curiosité. Un de plus dans le panier.

 

            L'édition originale au Portugal date de 2006, la traduction et la publication française de 2017 : il n'était pas utile de la faire.

 

 

Alexandre Anizy

Le web de Dean Koontz

Publié le par Alexandre Anizy

            Dean Koontz ne bosse pas beaucoup.

 

 

            Dark web (éditions L'Archipel, 2018, en livrel) est l'illustration d'un écrivailleur chevronné finissant par se reposer sur ses lauriers : on n'apprend franchement rien sur le "dark web", mais comme le livre est bien séquencé, le lecteur tourne les pages.

            Un échantillon ? « Il y a également là les inévitables débris humains : deux ivrognes qui trimbalent dans des cabas (...) ; un toxico chevelu en jean, torse nu, si maigre et maladif qu'il ferait mieux de rester couvert même sous la douche (...). » (p.148/485)

            Dean Koontz ne mourra pas de compassion : il pratique l'auto-défense préventive, en quelque sorte : « Quand on laisse parler sa compassion, on finit invariablement par croiser une âme charitable armée d'une scie. » (p.269/485)

 

            Il devrait y avoir une suite, dont on se passera sans regret.

 

 

Alexandre Anizy

Le premier de Indridason

Publié le par Alexandre Anizy

            Arnaldur Indridason est allé au bout de son premier polar sans mordre la poussière. 

 

 

 

            En novembre 2007, nous invitions les butineurs à découvrir cet auteur islandais (lire notre billet ici ). Tout était déjà là dans Les fils de la poussière (Métaillé, octobre 2018), notamment le style sobre.

            Prenons d'abord l'incipit, pour le décor :

            De loin, le bâtiment ressemblait à une prison. Il n'avait été ni rénové ni entretenu depuis des années. On avait procédé à des coupes claires dans le système de santé, ces réductions budgétaires retombaient toujours sur les hôpitaux comme celui-là. Une lumière jaunâtre filtrait à chaque fenêtre, éclairant la nuit noire de l'hiver. C'était un mois de janvier glacial, l'imposante bâtisse semblait grelotter, isolée au bord de mer, au milieu de son grand parc sombre planté d'arbres.

            Et puis ces deux personnages fugaces esquissés en quelques lignes :

            L'ancien proviseur habitait à deux pas de l'école de Vidigerdi dans une coquette maison mitoyenne. Il profitait de sa retraite, voyageait beaucoup et jouait au golf. Sa femme était autoritaire, elle l'emmenait tous les jours à la piscine, ils allaient régulièrement au restaurant, recevaient leurs enfants et leur rendaient visite .Tous deux avaient soixante-quinze ans. Ils avaient vécu une existence agréable, étaient en pleine forme et extrêmement snobs. (p.167)

 

            Mise à part la fin surréaliste mais si positive, cet opus mérite votre intérêt.

 

 

Alexandre Anizy

 

Un gourmet au Jin

Publié le par Alexandre Anizy

            A consommer sans modération !

 

 

            A Paris, dans une rue étroite entre le Palais Royal et la place Vendôme, le chef Watanabe Takuya officie dans son restaurant, le Jin. Devant nous, il confectionne les sushis qui fondront délicieusement dans notre bouche. Caviar sur le sushi, Aurian n'a pas résisté !  Ajoutons que ce repas exceptionnel fut l'occasion de découvrir la subtilité des sakés.

            Au Jin, une étoile a traversé notre estomac.  

 

 

Alexandre Anizy

L'injonction de Supervielle

Publié le par Alexandre Anizy

            Chacun devrait obéir à l'injonction de Jules Supervielle.   

 

 

Voyage en soi

(extrait)

 

Pourtant, il ne faudrait, Poète sans été,

Vouloir et sans merci créer de la Beauté

Avec ta douleur comme un jonc flexible,

Penché sur tes instants comme une bible ;

 

Puisque la Mort est là qui regarde et qui sait,

Puisque tu la pressens et tu crains d'être lâche,

Ne la seconde pas dans sa facile tâche,

                        Sois vivant, sois pressé.

 

Jules Supervielle

(Oeuvres poétiques complètes, La Pléiade)

Combat de Hawad

Publié le par Alexandre Anizy

            A méditer : sous l'immobilité apparente, le travail lent de la mémoire.           

 

 

Le coude grinçant de l'anarchie ― 1998

 

(...)

Une résistance à la voix volée

est une bombe atomique.

Je l'offre à tous ceux

qui désirent broyer la cervelle de leurs dieux.

Nos cadavres, plusieurs fois achevés,

nos cadavres que le diktat

des chars et des décrets

n'a pas permis de rendre

au placenta de la terre,

nos cadavres sont des explosifs

et je les lègue à tous les exclus

de l'héritage des banques

du monde ici-bas.

Nos cadavres sont des explosifs.

Pour tout un peuple assassiné sur sa terre,

il n'y a pas d'armes plus sûres

que l'interdiction de restituer ses martyrs

au giron de la terre.

Tous les autres bagages de la résistance,

ce sont les envols des vautours

qui les distribuent dans le vent

comme l'allergie épileptique et contagieuse

de la violence.

 

Vous, braves gens,

imaginez tout un peuple,

un peuple pour qui ses fantômes,

comme des fourmis,

travaillent nuit et jour.

 

 

Hawad

( Furigraphie, Poésie Gallimard )

Ce que Taniguchi suggère

Publié le par Alexandre Anizy

            Comment expliquer l'engouement à l'égard des BD contemplatives de Jiro Taniguchi ? 

 

 

            Prenons par exemple L'homme qui marche (Casterman, collection écritures, mars 2017) : 19 chapitres où le non-héros se balade dans son quartier. Il ne s'y passe rien, mais tout y est. Chaque planche contribue au rythme du récit, chaque vignette apporte au moins une information, qu'elle soit relative à l'environnement ou au cheminement intérieur du marcheur. Autrement dit, le lecteur est dans la balade avec contentement.

            A contrario Bastien Vivès, par exemple, lasse en imposant de longs tunnels (lire ici).  

 

 

Alexandre Anizy

Un gourmet at Ze Kitchen Galerie

Publié le par Alexandre Anizy

            Là où le talent se décline en 6 services et non 32.    

 

 

            Nous venions de lire Le gourmet solitaire de Taniguchi & Kusumi (Casterman, 2018), un concentré de ce que nous apprécions dans la BD japonaise. Alors nous choisîmes Ze Kitchen Galerie pour un dîner convivial, afin d'avoir en assiette un zeste d'Asie : avec son menu "dégustation", le chef William Ledeuil nous a régalés. 

            Fort heureusement il y a dans la carte un vin bio du pays d'Oc, là où régnait autrefois celui que d'aucuns appelaient le "milliardaire rouge", qu'un propriétaire original a nommé le chemin de Moscou : excellent à condition de l'aérer avant la consommation, sinon vous retrouvez un Corbières râpeux des temps pas si anciens !

 

 

Alexandre Anizy

 

Alimentation : la filière bio est mal partie

Publié le par Alexandre Anizy

            Si les consommateurs refusent de plus en plus les produits altérés issus de l'agriculture conventionnelle et, en se tournant vers la bio espèrent, pour certains, contribuer à une meilleure rémunération des paysans, ils seront déçus parce que la filière bio est mal partie, selon notre enquête.

 

 

 

 

            Comment en est-on arrivé là ? « ... la politique de la baisse continuelle des prix agricoles a rejeté, progressivement, l'agriculture hors du champ de l'investissement capitaliste. Les capitalistes agraires sont progressivement éliminés avec les propriétaires fonciers, cédant la place à l'essor de la production paysanne familiale. Telle fut l'évolution de l'agriculture au XXe siècle. Par conséquent, il est clair que l'agriculture paysanne constitue, non pas un résidu précapitaliste, mais une forme recréée par le capitalisme moderne, s'articulant à lui de manière exemplaire. L'agriculture paysanne actuelle ne constitue pas une sphère non-capitaliste. Elle présente simplement l'insolite visage d'un capitalisme sans capitalistes. (...) En réalité, l'investissement effréné des paysans dans l'agriculture est appelé à assumer cette tâche : assurer une production croissante sans poser des problèmes ni de rente, ni de profit. » (1) En quelques lignes, Kostas Vergopoulos résume l'évolution de l'agriculture, avec une forte accélération après la Seconde Guerre mondiale : « Les efforts de remembrement, les contrôles rigoureux des transactions sur les terrains agricoles, les dispositions du droit de succession et les autres interventions ne visent que l'optimisation des structures agricoles, voire la préservation de l'exploitation familiale, en interdisant la propriété naine. » (2)

            Mais comme l'écrivait Claude Faure, « dans la production capitaliste, la circulation s'est en effet emparée de la production en ce sens que la production n'est plus qu'un moment de la circulation. » (3). Ajoutons avec Claude Servolin que du fait du développement du mode de production capitaliste (MPC) et de la division sociale du travail, « le petit producteur se trouve donc contraint de vendre sur le marché une partie croissante de sa production, alors que, comme nous l'avons vu, cette production commercialisée est nécessairement vendue en dessous de sa valeur. » (4) Avec l'hypertrophie de la grande distribution (les GMS), la dégradation s'est accélérée.

 

 

 

 

            Notre enquête porte sur quelques produits bio, notamment de maraîchage, vendus en circuit long. La collecte de prix publics, l'analyse sectorielle et l'examen des bilans de quelques acteurs significatifs de la filière bio permettent d'établir le tableau ci-après.

 

 

Coef.

Chou de Brux.

poireau

Prix public ttc conseillé par unité de vente

 

8,30

3,25

tva

1,055

 

 

Prix public ht

 

7,87

3,08

Marge commerciale détaillant

1,33

 

 

PV ht du grossiste

 

5,92

2,32

Marge commerciale  grossiste

1,1758

 

 

PV ht du maraîcher (rendu clients)

 

5,03

1,97

alors Coef. du producteur au public

 

 

1,65

coût transport par unité de vente (U.V.)

 

0,30

0,30

coût location palette IFCO par U.V.

 

0,10

0,08

Prix vente ht du maraîcher (départ Ferme)

 

4,63

1,59

 

 

Pour ces 2 légumes, en partant des prix publics cohérents sur la dernière saison puisqu'ils sont une donnée de l'ensemble du marché des légumes, et compte tenu du fait qu'une baisse de ces prix ciblés n'est pas souhaitable car elle ne se ferait qu'au détriment des producteurs, nous obtenons pour le maraîcher un prix de vente (HT) au départ de la ferme, après avoir retiré successivement la marge commerciale du détaillant, celle du grossiste intermédiaire, puis le coût de transport et celui d'une palette spéciale.

            Malheureusement, les maraîchers n'ont pas vendu à ces prix-là.

            Pour le chou de Bruxelles, le grossiste PRONATURA Provence payait 3,70 € un produit que nous retrouvions à Paris chez NATURALIA à 7,95 €, soit en dessous du prix conseillé, ce qui n'est pas surprenant puisque PRONATURA Bretagne se vante de faire le plan de production et les prix de ses maraîchers... qui ne seraient donc que des engraisseurs de végétaux, comme la filière porcine si décriée.  

            Pour le poireau, BIOCOOP, distributeur de référence dans la filière bio, payait 1,40 €.  

            Dans ces conditions, chacun comprend que la filière bio est déjà déréglée, au sens où tous les acteurs ne sont pas dans leurs justes positions. Il est permis de douter d'une amélioration prochaine, si on observe la filière céréalière bio en partant d'une exploitation.

            Située dans les Deux-Sèvres, cette ferme vendait sa production bio à la CAVAC (très grosse coopérative pas tout bio, d'envergure internationale ― pour exemple : contrat de 20.000 tonnes de blé dur signé avec la marque italienne Barilla), qui lui payait son blé 411 € la tonne en 2017 et lui garantit un prix mini de 400 € la tonne jusqu'à 2022 (4) ; l'excédent brut d'exploitation (EBE) de cette ferme s'élevait à 59 K€ en 2017, avec 48 K€ de subventions (5) : autant dire que la Subvention, c'est la rémunération de l'exploitant. Et sur les rayons BIOCOOP (6), vous trouvez le pain BIOFOURNIL, qui appartient à la CAVAC.           

 

 

            Comme l'écrivait René Dumont à propos de l'Afrique noire (7) au début des années 60, la filière bio est mal partie. Pourtant, un homme politique très responsable avait dit :  « La France ne doit à aucun prix devenir une poussière d'agglomérations urbaines dispersées dans un désert même verdoyant et même entretenu. Sauver la nature qui sera demain le premier besoin de l'homme, c'est sauver la nature habitée et cultivée. Une nature abandonnée par le paysan, même si elle est entretenue, devient une nature artificielle et je dirais une nature funèbre. Toute autre formule, d'ailleurs, serait non seulement déplorable, mais serait ruineuse. Et même sur le plan économique, il est à mon sens plus rentable d'avoir des terres habitées et cultivées par des hommes, même si on est obligé d'aider ces hommes, que d'avoir de vastes réserves nationales, entretenues, conservées et protégées fatalement par une masse de fonctionnaires. » Georges Pompidou (8) Et on a eu la nature abîmée par l'agriculture productiviste d'hommes subventionnés pour le meilleur profit du reste de la filière, la nature désertée par les paysans (fait sociologique majeur du XXe siècle : la fin de la paysannerie), et la masse de fonctionnaires qu'on veut maintenant "dégraisser", et les mégapoles (qui sont les uniques cibles du développement au détriment de la France périphérique (9) : l'effondrement est au bout de l'entêtement mortifère). Force est de constater le fiasco, l'échec économique, écologique et sociale des 60 dernières années.     

            Nous nous gardons de toute prédiction. Ni pessimisme, ni optimisme : comme Pierre Bitoun et Yves Dupont (10), nous écrivons l'avenir en ... Soyons raisonnables puisque tout est incertain.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

 

(1) Samir Amin et Kostas Vergopoulos, La question paysanne et le capitalisme, éditions anthropos-idep, 1er trimestre 1977, page 266-67. (ouvrage réédité en 2016 par NENA en livrel)

(2) Ibidem, p.217.

(3) Claude Faure, Agriculture et capitalisme, éditions anthropos, 1978, page 22.

(4) Ainsi que, pour information, 300 €/t pour le maïs, 1.350 €/t pour la lentille (mini garantis jusqu'à 2022).

(5) Le lecteur intéressé se reportera aux statistiques issues du Réseau d'Information Comptable Agricole (RICA) dans les Dossiers Agreste (Ministère de l'Agriculture).   

(6) BIOCOOP a commencé un programme de boutiques boulangerie (la première a ouvert près d'Agen) : l'accès aux bons produits sera étendu, c'est le  bénéfice des consommateurs ; pour celui du paysan, il faudra attendre, si on a la foi.  

(7) René Dumont, L'Afrique noire est mal partie, Seuil, 1962 (revue et corrigée en 1973).

(8) Georges Pompidou, discours de Saint-Flour en 1971, cité par Pierre Bitoun et Yves Dupont (9), p.174.

(9) Pour comprendre la situation française actuelle, nous recommandons vivement le dernier ouvrage de Christophe Guilluy, No society. La fin de la classe moyenne occidentale, Flammarion, octobre 2018.   

(10) Pierre Bitoun et Yves Dupont, Le sacrifice des paysans. Une catastrophe sociale et anthropologique, éditions L'Echappée, 4e trimestre 2016.

 

Pacte de l'ONU sur les migrations : qui est Louise Arbour ?

Publié le par Alexandre Anizy

            Le pacte de l'ONU sur les migrations fixe un cadre général, aujourd'hui non contraignant, pour les futurs exodes générés par la démographie et le changement climatique : l'objectif est de « maximiser les bénéfices de la migration », dit Louise Arbour, Représentante spéciale de l'ONU. Mais quelles infamies doit-on déjà à cette juriste canadienne ?

 

 

            Le Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie fut créé pour juger les crimes commis sur ce territoire après l'éclatement de cet Etat : « le Conseil de sécurité a, en 1993, agi hors de ses compétences. Il donnait d'ailleurs à cette juridiction pénale d'exception des pouvoirs exorbitants, à commencer par la possibilité d'aménager elle-même la procédure suivie devant elle, ce qu'elle a fait à plus de douze reprises entre 1994 et 1997. Le contenu du règlement révèle des atteintes inadmissibles aux principes les plus élémentaires de la procédure pénale. », écrivait François Terré, docteur en droit et professeur émérite, membre de l'Institut de France. (1) En 1996 et jusqu'au 26 mai 1999, Louise Arbour fut procureur général du TPIY : que faut-il penser d'une juriste qui pisse sur les principes élémentaires de la procédure pénale ? Lorsqu'elle arrive à ce poste, Louise Arbour décide de changer la règle de publication de chaque acte d'accusation : avec elle, les inculpations seront secrètes, ce qui est bien commode...

            De 1996 au 26 mai 1999, aucune accusation ne pesait sur le président serbe Milosevic (2), mais le 27 mai, inopinément et quasiment ex nihilo, le TPIY publie son inculpation par Louise Arbour : les médias propagent massivement que "les droits de l'homme l'emportent sur les droits des Etats". Vraiment ?

            Rappelons les faits. Après l'échec de la conférence de Rambouillet (6 février - 19 mars 1999), l'OTAN déclenche l'opération Force alliée le 23 mars 1999, qui vise à bombarder des "cibles politiquement correctes" selon l'expression du général américain Clark (3), c'est à dire le complexe militaro-industriel serbe et les infrastructures, causant quelques dégâts collatéraux, comme l'ambassade chinoise à Belgrade... « Durant la première semaine, alors qu'on cherchait désespérément à justifier l'intervention, car l'exode des Albanais n'était pas suffisamment massif, on avait inculpé Arkan [le 1 avril 1999, sans rendre publiques les charges retenues...]. Louise Arbour était apparue sur les écrans pour apporter sa contribution au renouveau moral de l'humanité. Avec le visage grave d'un juge sévère et en termes compassés, comme il sied à un procureur, elle avait expliqué que l'acte d'accusation était dressé depuis longtemps et que le Tribunal avait décidé que le moment était venu de le divulguer. » (4) Enfreignant la règle du secret qu'elle avait elle-même instaurée, à un moment opportun pour les Etats bombardeurs, « Louise Arbour se comportait en activiste de l'OTAN » (5) Déjà.

            Alors pourquoi inculper Milosevic le 27 mai 1999 ? « Deux mois s'étaient écoulés depuis le début des frappes. Le soutien de l'opinion publique commençait à faiblir : pour la première fois les sondages faits aux Etats-Unis montraient que la majorité de la population était contre la guerre et la cote de popularité de Clinton plus basse que jamais. Le fondamentalisme du week-end s'essoufflait, l'été approchait. On avait à peu près la même situation en France. Parallèlement, les pourparlers entre Tchernomirdine et Milosevic progressaient. On pouvait espérer aller vers la paix, mais vers une paix de compromis, mauvaise pour l'OTAN. Les gouvernements italien et allemand commençaient à demander avec insistance un accord à l'amiable. C'était le temps des hésitations. La crise n'avait jamais été aussi profonde entre alliés. Cette semaine-là était décisive pour la conduite ultérieure de la guerre. Comme l'a reconnu plus tard le général Clark, le bombardement de "cibles politiquement correctes" ne pouvait se prolonger que de dix jours, ensuite, il allait falloir bombarder la Serbie tout entière. C'en était bientôt fini de la guerre "morale mais sans scrupule", très vite, il ne resterait plus que l'absence de scrupules. » (6) Examinons la chronologie :

  • mercredi 19 mai : réunion Clinton - général Clark : décision prise d'envoyer 90.000 soldats américains au Kosovo (Cf. le Times), qui signifie la préparation à la guerre totale ;
  • vendredi 21 mai : réunion Louise Arbour - Madeleine Albright, Secrétaire d'Etat américain, qui s'achève par une conférence de presse dans laquelle ces deux dames parlent des "crimes de guerre commis par les Serbes" ;
  • samedi 22 mai : Louise Arbour prend la décision d'inculper Milosevic ;
  • mercredi 26 mai : Louise Arbour est nommée juge à la Cour Suprême du Canada (décret 1999-0941) ;
  • jeudi 27 mai : publication de l'inculpation de Milosevic par le TPIY.
  • jeudi 27 mai : réunion secrète des ministres de la Défense des principaux membres de l'OTAN et décision prise "d'intensifier les frappes" ;
  • jeudi 27 mai : Clinton annonce qu'il va envoyer 90.000 soldats au Kosovo. (7)

Une chronologie qui n'honore pas Louise Arbour. Grâce à elle, l'Empire et ses alliés feront maintenant la guerre au crime, n'est-ce pas ?

            Mais que se passa-t-il ensuite pour Milosevic au TPIY ? Redonnons la parole au digne professeur de droit François Terré : « Cet accusé [Milosevic] sur lequel pesaient tant de charges, une parodie de justice a réussi à en faire une victime. Il existe encore aujourd'hui des juristes trop attachés au droit et à la justice pour en supporter d'insupportables travestissements. » (8)

            Ayant agi en bon janissaire à col blanc de l'Empire, la carrière professionnelle de Louise Arbour fit donc un saut suprême.

 

 

            Sachant les infamies passées du procureur Louise Arbour, que faut-il penser du Représentant spécial du Secrétaire Général de l'ONU pour les migrations Louise Arbour quand elle déclare, que le pacte de l'ONU sur les migrations n'est pas contraignant ? Rien de bon pour l'humanité.            

 

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(1) Dans Le Monde du 14 mars 2006.

(2) Il signa les accords de Dayton le 14 décembre 1995, mettant fin aux combats en Bosnie.   

(3) Stanko Cerovic, Dans les griffes des humanistes, éditions Climats, 2001, page 283.

(4) Ibidem, page 278.

(5) Idem, p.279.

(6) Idem, p.282-83.

(7) Idem.

(8) Dans Le Monde du 14 mars 2006.