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La guerre probable selon Vincent Desportes

Publié le par Alexandre Anizy

 

Il y a 37 ans, on avait quitté à Tübingen le jeune lieutenant Vincent Desportes , dont le comportement mimétique à l'égard du capitaine Renon faisait sourire la troupe qui n'attendait que la quille, et comme la chose militaire ne fut et n'est pas un de nos centres d'intérêt, les écrits du général nous avait échappé. Ainsi quelle surprise lorsque nous vîmes sa bobine dans la petite lucarne, soulignée de son nom et de sa fonction à Sciences-Po ! Il s'exprimait en tant qu'expert (compte tenu de sa carrière militaire, le titre n'est pas usurpé) sur la guerre du Mali, ce qu'il fit plus longuement dans une émission de France Culture. Comme ses propos étaient pertinents, nous décidâmes d'aller voir les fondements théoriques qui influencent forcément ses commentaires, dans son livre La guerre probable – penser autrement, Economica, 2ème édition 2008, 216 pages, 18 €).

 

D'abord le constat :

« L'effondrement de l'empire soviétique avait initialement laissé place à l'euphorie de la toute puissance, à la certitude que l'Occident pouvait tout grâce aux ingrédients qui lui avaient conféré le succès. » (p.3)

« Les Balkans et l'incapacité de la force d'y régler aisément les différends auraient pu nous indiquer que quelque chose avait changé. Nous avons cependant longtemps pensé que ces conflits constituaient l'exception, alors qu'ils étaient la règle d'une réalité nouvelle. » (p.3)

 

Il faut penser autrement :

« La maigre performance de nos outils actuels nous impose de comprendre l'évolution des formes de puissance, l'évolution des formes de nuisance, l'évolution des formes de violence. » (p.5),

parce que les faits sont têtus : les États-Unis n'ont pas gagné en Afghanistan et en Irak, Israël a connu l'amère non-victoire contre le Hezbollah en 2006 (pour 600 combattants du Hezbollah tués mais aussitôt remplacés : 120 soldats israéliens perdus, 6 Milliards USD dépensés + 7 Milliards USD de biens libanais détruits + 1.200 morts et 3.700 blessés civils).

La guerre industrielle coûte très chère aux pays riches (en 2008, l'économiste américain Joseph E. Stiglitz a chiffré le coût de la guerre en Irak pour les États-Unis seuls à 3.000 Milliards USD), mais lorsqu'ils sont engagés dans une guerre asymétrique qu'ils subissent, celle-ci

«(...) ne coûte presque rien à l'adversaire parce qu'il sait conserver l'initiative, le choix de l'heure, du lieu et du mode d'action... Il s'est approprié le principe d'économie des forces !» (p.12)

La discontinuité (i.e. frappes sélective ou massive momentanées, occupations temporaires du terrain … puis arrêts et replis) est disqualifiée aussi bien au niveau stratégique que tactique :

« Rien ne sert aujourd'hui d'agir en "va et vient" et d'abandonner sans le contrôler le terrain qui vient d'être conquis : à peine replié, l'adversaire vient reprendre possession et punir les "retournés". La seule manœuvre qui vaille est celle de la continuité, de l’État qui avance et s'établit derrière le glaive, bref la méthode de la tache d'huile telle que depuis longtemps nous l'a enseignée Lyautey. » (p.16)

[Au Mali, il semble que la France ait fait sienne cette doctrine. NdAA]

 

Le XXIe n'échappera pas aux crises et aux conflits, d'autant plus que « la démographie, longtemps mère de toutes les crises et de toutes les guerres, » revient au centre de la question humaine avec son corollaire lancinant : les flux migratoires. La raréfaction des ressources est déjà une préoccupation permanente des gouvernements¹, de même que la répartition inégale des biens alimentaires. D'où il ressort que :

« La sécurité intérieure de la France va continuer à dépendre étroitement de la situation sécuritaires aux marches de l'Europe, tandis que sa position méditerranéenne la rendra sensible aux crises et conflits du Moyen-Orient dont les ramifications s'étendent naturellement sur son territoire. » (p.27) ;

et que :

« L’Europe balkanique, par le biais de la porosité européenne des frontières, doit être considérée comme un proche étranger ; (…) quel que soit l'avenir de cette zone, la France devra être en mesure d'y participer, militairement si nécessaire, à l'établissement d'une stabilité qui est condition de la sienne. » (p.27)

Pour ne pas être défait, il importe de comprendre les expressions nouvelles de la guerre, afin de préparer les bons outils.

« (…) ce dont nous sommes sûrs, c'est que le destin de la citadelle est d'être contournée puis détruite. Donc, la simple défense au plus près est vouée à l'échec. » (p.29)

Ce dont les pensées officielles britannique (DCDC) et française (DAS/EMA) sont également sûres, c'est que la guerre classique ou symétrique (i.e. puissance industrielle contre puissance industrielle) est morte. (sourcées en p.31) Dès 2002, les États-Unis ont replacé la dissuasion nucléaire comme un élément d'une triade de prévention élargie. En conséquence, il y a une autre dissuasion à bâtir : « une force conventionnelle apte à relever les défis de la guerre probable ». (p.32)

 

Cependant, et fondamentalement, il importe de maintenir le niveau technique des matériels de la guerre classique, car c'est la capacité de la faire bien qui en diminuera l'occurrence.²

Il faut donc investir dans les systèmes de forces couvrant les guerres classiques (parce que la probabilité d'un conflit majeur inter-étatique est non nulle, il faut aussi veiller à l'excellence de la recherche et développement et préserver la capacité de remontée en puissance) et les guerres asymétriques.

 

Dans une configuration asymétrique, la puissance destructrice incite fortement à l'évitement qui la rend vaine :

« Plutôt que de rechercher la compétition sur le champ d'affrontement de la haute-vitesse et de la brièveté dominé par les forces occidentales, l'adversaire probable investit les luttes politiques longues et les bras de fer psychologiques ; il planifie sur des décennies et évite notre bataille parce qu'il n'a nul besoin de victoire tactique. » (p.35)

L'adversaire va opter pour des « stratégies de contournement dans les espaces où il peut lutter à armes égales, l'infosphère et l'espace humain où se modèle donc la guerre probable ». (p.36) Et comme l'a dit Clausewitz, s'il n'est pas possible d'amener l'adversaire sur son terrain, il faut aller le chercher sur le sien, si on veut le battre. Pour le général américain Hagee, « le succès dépendra moins de notre capacité à imposer notre volonté que de notre aptitude à modeler les comportements, des amis, des adversaires et, ce qui est plus important, de la population ». (en 2005, cité p.36)

Et Vincent Desportes d'affirmer :

« La guerre de demain – la guerre probable – se livrera au sol, elle sera un combat rapproché car, malgré tous les miracles technologiques, pour vaincre l'homme armé de son seul poignard, il faut bien prendre le sien. » (p.36)

Il faut bien constater que les courts conflits dissymétriques se transforment en conflits asymétriques : au Kosovo, 2 mois de guerre classique pour une décennie de crise larvée ; en Afghanistan, 1 mois de classique … et on y est encore ; en Irak, 3 semaines de classique pour 5 années d'asymétrique.

 

Le contournement est une loi d'airain dans l'art militaire, ce que les 2 colonels chinois Quiao Liang et Wang Xiangsui ont développé à leur manière dans leur livre devenu une référence, titré La guerre hors limite : pour le plus faible dans la sphère militaire, il s'agit de n'y consacrer qu'un effort minimal et par contre de manœuvrer dans d'autres sphères de la guerre (informationnelle, économique, financière, politique, etc.).

« Les prochaines guerres, n'en doutons pas, seront "hors limites". » (p.40)

Il y a bien une approche philosophique différente du conflit, dont Ivan P. Kamenarović a commencé l'étude dans Le conflit – Perceptions chinoise et occidentale (éditions du Cerf, mars 2001, 147 pages, 100 francs).

On peut voir le livre des colonels comme une application de 2 principes de Sun Zi (l'art de la guerre, Economica, mars 1990, 172 pages, 125 francs) :

« C'est pourquoi remporter cent victoires en cent combats n'est pas ce qu'il y a de mieux ; soumettre l'ennemi sans combattre est ce qu'il y a de mieux. » (p.105) ;

« C'est pourquoi une armée victorieuse l'est avant même de chercher le combat ; une armée vaincue engage le combat d'abord, puis cherche la victoire. » (p.109)

 

Parce que le monde ne connaîtra qu'un état de violence permanent, il importe aux pays occidentaux de maintenir la paix en (r)établissant la force et l'autorité des États : autrement dit, changements de régime si nécessaire et reconstructions d’États.

« Dans les 2 cas, l'essentiel ne sera pas la planification de la guerre mais la question du nouvel ordre à établir, de l'état final à instaurer ; et c'est vers eux que devront converger les lignes d'action, l'action militaire n'en étant qu'une parmi d'autres. Cette action comportera plusieurs phases, dont celle que les armées américaines appellent à tort la Phase IV, celle des "opérations de stabilité et de soutien", parce qu'elle commence avant même les opérations et qu'elle est véritablement au cœur de la réussite de l'intervention. (…) La dernière victoire qui compte, celle de la stabilité du gouvernement. » (p.41)

[C'est à cet aulne qu'il faudra juger de la guerre du Mali. NdAA]

Dans ce cadre, le modèle trinitaire de la guerre est pertinent : il convient de résoudre des équations « avec les 3 variables clausewitziennes de l’État, de la population et de l'armée, et leurs 3 dimensions associées de la rationalité, de l'irrationalité et de la contingence ». (p.42)

Il faut aussi aux pays occidentaux, puisque la guerre probable est hors limites (l'ennemi pouvant être dé-territorialisé), avoir « la disponibilité de soldats formés pour une défense grise et des crises mélangeant le malveillant et l'accidentel ». (p.43)

 

Quel sera le nouvel adversaire ?

« (…) à l'ennemi articulé en grands ensembles a succédé un ennemi éclaté en petites cellules qui marque d'incapacité bien des déclinaisons de la puissance. Dès lors que l'adversaire adopte la forme réticulaire et ne présente plus aux frappes de précision ses centres de gravité qui sont traditionnellement la cible, il peut produire de la violence dans des conditions d'impunité accrue. » (p.45)

La guerre probable sera irrégulière, et l'adversaire appliquera les 2 règles de survie : l'adaptation permanente et la surprise. Vincent Desportes revient alors sur la mésaventure israélienne de 2006 :

« (…) Tsahal a été surprise en juillet 2006 par une guérilla qui s'était préparée et entraînée contre cette manœuvre, l'a rendue vaine par une succession de coups d'arrêt et d'esquives, par une multitude d'actions "en essaim", bref par une néo-non-bataille³. Volant l'initiative à l'armée qui en est l'emblème, le Hezbollah a réussi à la conserver, tant au plan stratégique que tactique, et à maintenir l’État d'Israël et ses forces dans une permanente posture réactive ! » (p.47)

Le Hezbollah n'avait pas de boucle décisionnelle et de ce fait bloquait dans Tsahal le fonctionnement du principe de l'OODA (action selon le cycle Observation – Orientation – Décision – Action), qui structure les forces occidentales.

« En l'absence de système ennemi clair, de nœuds ou de centres de gravité véritablement identifiables, la manœuvre de haute technologie ne peut pas provoquer de choc systémique. » (p.49)

Par principe, l'adversaire ne respectera pas les règles, et dans cette guerre probable, il est possible que la victoire politique advienne sans victoire militaire décisive.

 

 

La guerre probable se fait dans les sociétés, et non pas entre les sociétés. « Les zones contestées seront les espaces contestables des zones grises, ces espaces de non-droit (...) » (p.58) et évidemment « on ne maîtrise pas une insurrection avec les méthodes et les armes que l'on employait pour détruire une colonne de blindés soviétiques (...) » (p.59)

« Si la guerre probable commencera souvent à distance depuis la mer ou les airs, elle se terminera toujours sur terre, dans la durée, avec une imbrication au sein des populations et une confrontation directe avec les parties adverses. C'est au sol, physiquement, au contact des protagonistes, par une présence durable, que l'action engagée portera ses fruits. » (p.61)

« Désormais, sauf exception, les combats sont urbains (...) » (p.64)

Du point de vue strictement militaire, cette idée excessive doit être rejetée parce qu'en 2013 les faits la contredisent : Afghanistan, Mali. Mais Vincent Desportes voulant en arriver à la guerre en ville et à ses caractéristiques, on conviendra qu'il a péché par maladresse rédactionnelle.

En ville, l'univers étant davantage civil et émotionnel, il oblige à une approche globale, notamment avec les humanitaires, parce que sous les feux des médias la guerre y devient vraiment spectaculaire. Le militaire doit lutter contre « l'inhibition, mère de l'inefficacité opérationnelle et premier résultat de la conjugaison de la médiatisation des conflits et de l'extension du juridisme à la sphère des opérations. » (p.65) C'est la 1ère idée.

La 2ème idée est qu'en ville « le soldat asymétrique pourra le mieux, sous le regard permanent des médias, jouer sa stratégie de provocation et de propagande par les bavures collatérales de son adversaire. » (p.66)

La 3ème idée est qu'en ville il faut traiter les problèmes essentiellement humains : « La cible de l'action n'est plus l'adversaire, mais la population. Il s'agit, au cœur des villes, de gagner le combat de l'adhésion tout en construisant le "contrat social". » (p.66)

La 4ème idée découle de la 3ème : les moyens de l'efficacité militaire doivent évoluer, puisque « le tactique y reprend le pas sur l'opératif, le décentralisé domine le centralisé, (…) l'action individuelle compte finalement presque autant que la décision d'état-major et parle plus fort que le message stratégique ».

La 5ème idée est celle de l'élargissement du métier militaire : « La ville est aujourd'hui le lieu paradigmatique de la dualité du rôle social et guerrier du militaire. » (p.67) Les soldats-managers doivent aussi apprendre la gestion de la cité, en liaison avec les policiers, les humanitaires, les administratifs, les politiques, etc.

 

 

Vincent Desportes propose un nouveau continuum pour le déroulement des conflits : l'intervention, la stabilisation, la normalisation. Ces phases sans limites temporelles, qui se superposent partiellement, se caractérisent plus par l'effet recherché que par les moyens employés.

« L'évolution du contexte des crises, les guerres probables, imposent de savoir mieux passer du militaire au sécuritaire, de l'urgence humanitaire aux politiques de reconstruction et de développement. » (p.78)

 

 

Des expériences récentes, Vincent Desportes dégage 2 principes majeurs pour l'efficacité militaire : modestie et adéquation. Concernant la modestie, il remarque qu'il vaut mieux adapter des institutions plutôt que de vouloir les changer (prise en compte des différences culturelles et politiques) :

« La démocratie doit être conçue comme un éventuel moyen et non comme une fin. » (p.84)

Concernant l'adéquation, l'expérience montre d'une part que

« en-deçà d'un ratio inférieur à 15 ou 20 contre 1, une force de contre-insurrection n'a pratiquement aucune chance de l'emporter ». (p.84),

ce qu'il faut compléter par :

« si la force contre-insurrectionnelle respecte la proportion de 20 soldats ou policiers pour 1.000 habitants » (p.98),

et d'autre part que, pour avoir la cohérence entre les buts, les voies et les moyens, la primauté du politique et l'unicité de l'objectif s'imposent, car il faut bâtir une approche globale pour être crédible dans l'infosphère, lieu de bataille préférée du faible contre le puissant :

« Ainsi, portant sur la sensibilité et la versatilité des opinions publiques, la communication – courtier du marché de la pitié – est devenue le terrain de la victoire ou de la défaite. (…) Nous n'avons pas d'autres choix que de contrer l'adversaire sur ce même espace : notre manœuvre essentielle devient, par obligation, celle de la communication. » (p.102)

Vincent Desportes précise plus loin :

« Cette prééminence de la communication veut dire aussi que les armées modernes doivent être conçues dans cet esprit et dotées de moyens techniques capables de délivrer de bons messages – d'où le rôle de la précision des armements par exemple – et de participer dans la durée – cette fois-ci avec des moyens dédiés – à cette manœuvre de communication:elles sont en effet condamnées à demeurer sur le terrain bien après que les armes lourdes se soient tues. » (p.143)

Dans la guerre probable, l'armée envahit tous les champs, de la traque de l'ennemi œuvrant à l'intérieur comme à l'extérieur à celui de la propagande (the battle for your mind). Et Vincent Desportes de citer le général Galliéni :

« satisfaire les besoins des populations pour les attacher par la persuasion aux institutions nouvelles » (p.146)

 

 

 

Dans les circonstances actuelles, lire le livre de Vincent Desportes permet aux citoyens de comprendre la guerre probable que la France mène quasiment seule au Mali (facilitant la séparation du bon grain de l'ivraie dans la communication officielle). La chose est d'autant plus facile que l'auteur a soigné le style.

Mais pour nous, une question se pose toujours 37 ans après, puisque Vincent Desportes utilisent abondamment le vieux concept d'Occident,

« notion chérie de la culture ultra-conservatrice (Oswald Spengler [philosophe allemand de la Révolution conservatrice, ndAA], Henri Massis, Maurice Bardèche [2 intellectuels français ayant soutenu la Collaboration, ndAA], les nervis d'Occident [nom d'un groupuscule d'extrême droite dont firent partie les délinquants Patrick Devedjian et Alain Madelin condamnés en correctionnelle en 1965, ndAA]), qui ne figurent pas, d'ailleurs, dans le traité de l'Atlantique Nord de 1949, qui n'apparaît presque jamais sous la plume de de Gaulle et que je ne me souviens pas avoir entendue dans la bouche de Mitterrand ? » (Régis Debray, in Monde Diplomatique de mars 2013 : la France doit quitter l'OTAN).

Vincent Desportes croit-il à la famille occidentale, cette « vieille mystification qu'on croyait réservée à la "grande famille des États socialistes" » (Régis Debray, idem) ?

 

 

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

(¹) : par exemple, et pour ceux qui en doutaient encore, les historiens peuvent aujourd'hui affirmer que la guerre d'Irak (2003) visait à s'emparer du pétrole, grâce aux documents récemment déclassifiés. Jean-Pierre Séréni in Monde Diplomatique de mars 2013.

(²) : on retrouve là le raisonnement qui prévalait pour la guerre nucléaire.

(3) : la bibliographie de V. Desportes étant excellente, il ne pouvait pas ne pas citer l'essai sur la non-bataille de Guy Brossollet (Belin, 4ème trimestre 1975, 128 pages, 28 francs), dans lequel l'auteur mettait en procès « le corps de bataille, élément spécifique de notre Défense Nationale », et proposait un système modulaire … mais il précisait déjà que face à « un conflit marginal ou une agression limitée visant, soit la conquête d'un gage territorial, soit un effet de désorganisation par des actions de commandos, soit encore un simple test de notre volonté et de notre capacité de réaction », « l'inaptitude des 2 systèmes [le corps de bataille et le système modulaire. NdAA] à régler des crises mineures souligne la nécessité de posséder, par ailleurs, des forces relativement puissantes et très mobiles, capables d'intervenir immédiatement pour des opérations limitées, en un point quelconque du théâtre national ou européen. » (p.98)

() : l'adjectif "soviétique" n'étant pas utile au propos, et parce que nous avons connu le jeune lieutenant Desportes, on se demande s'il a vraiment changé son logiciel idéologique, lui, i.e. tenté de penser autrement, comme il le recommande dans ce livre.

 

 

 

 

Le noble Pastré toujours plus démagogue !

Publié le par Alexandre Anizy

 

Le noble Pastré, banquier tunisien sous Ben Ali et accessoirement professeur d'économie à Paris 8, vient de commettre un nouveau produit (Repenser l'économie – l'économie bottom-up, Fayard, février 2013, 154 pages, 14 €) dans lequel il prétend repenser l'économie, lui qui a accompagné¹ activement le mouvement de délabrement de l'économie française, avec le succès que les 8 millions de pauvres connaissent aujourd'hui.

 

Olivier Pastré, sorte de parangon de l'entre-soi, qui maintenant exalte et veut s'appuyer sur la France d'en-bas pour sortir de la crise (lui qui la jugeait « salutaire » quand Jacques Marseille l'accueillait par un "Vive la crise !"² : c'était en 2007) , alors qu'il défend par ailleurs sournoisement le statu quo pour un système bancaire en folie (on comprend bien … puisqu'il en est), contribue ici à sa manière à la démolition de l’État français, au profit d'une Europe fédérale qui ne viendra pas mais qui laissera le champ ouvert à la marchandisation des choses et des hommes.

 

Démagogue sans vergogne le Pastré nouveau, puisque c'est utile à l'extension du pillage capitaliste.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(¹) : il n'y a qu'un Vincent Giret (de Libération … mais sans doute futur cador du quotidien vespéral), qui pèche par ignorance en économie (ce n'est pas sa formation, à notre connaissance) et des écrits pastréiens en particulier, ou peut-être qui bâcle sa copie pour renvoyer un ascenseur, pour oser présenter ce lascar libéral comme un "modéré".

(²) : lire notre note du 12 novembre 2007

http://www.alexandreanizy.com/article-7244247.html

 

 

 

 

Fromont Jeune et Risler Aîné d'Alphonse Daudet

Publié le par Alexandre Anizy

 

On a tous des points d'entrée dans le monde des livres : pour nous, c'est Lamartine en poésie, Alphonse Daudet en fiction. Pas le Daudet du moulin, celui de « Jack », un pavé digeste évoquant la condition ouvrière au XIXe, et celui du « petit chose ».

 

« Fromont Jeune et Risler Aîné » (livrel gratuit de 271 p.) est un autre roman de mœurs de Daudet. Cette fois-ci, il dépeint l'ascension sociale d'une enfant pauvre et volontaire, qui mettra sa beauté et son intelligence au service d'une ambition personnelle dévastatrice, dont les jeunes patrons Fromont et Risler seront les jouets.

 

« L'ex-comédien termina sa tirade par un clignotement d'yeux à l'adresse du comique et du financier, et pendant un moment il y eut un échange de mines, de grimaces convenues, des « hé ! Hé ! » des « hum ! Hum ! », toute la pantomime des sous-entendus. » (p.132)

 

C'est une histoire qui sera éternellement d'actualité : alors plonger dans la version de Daudet, avec son écriture délicieusement surannée, vous emmène doublement en voyage.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

Les déracinés de Maurice Barrès

Publié le par Alexandre Anizy

 En ces temps démocratiques incertains, il n'est pas inutile d'aller s'encanailler du côté de Maurice Barrès, précisément dans « les déracinés » (poche collection Omnia, éditions Bartillat, janvier 2010, 13 €), bien que cela soit « un pesant livre, d'une excédante mais admirable tension », comme l'écrivait Gide.

 

C'est un roman à thèse confuse, que Blum qualifiait de "chef d’œuvre d'art", qui amalgame Bonaparte et Proudhon dans la vision d'une nation socialisante, antiétatique et frondeuse.

« Chaque individu est constitué par des réalités qu'il n'y a pas à contredire ; le maître qui les envisage doit proportionner et distribuer la vérité de façon que chacun emporte sa vérité propre. » (p.23)

Heureusement nous pouvons apprécier le style, quelquefois suranné mais jamais médiocre, ainsi que les observations malicieuses comme :

« A nul âge on ne philosophe plus volontiers qu'à vingt ans, et surtout vers quatre heures du matin. » (p.72) ;

« Le service militaire devrait être une école de morale sociale ; on sait ce qu'il est, par manque de sous-officiers. Les jeunes Lorrains [7 Lorrains forment le noyau du livre. NdAA] n'en rapportèrent que des notions sur la débauche et l'ivrognerie (...) » (p.52) [déjà à cette époque ! (ndAA)]

 

Un des passages pesants est le chapitre IX (titré "La France dissociée et décérébrée"), où l'on apprend que « … la France est décérébrée, car le grave problème et, pour tout dire, le seul, est de refaire la substance nationale entamée, c'est à dire de restaurer les blocs du pays ou, si vous répugnez à la méthode rétrospective, d'organiser cette anarchie. » (p.184) Qu'est-ce que la substance nationale ? « Le véritable fonds du Français est une nature commune, un produit social et historique, possédé en participation par chacun d'entre nous ; c'est la somme des natures constituées dans chaque ordre, dans la classe des ruraux, dans la banque et l'industrie, dans les associations ouvrières , ou encore par les idéals religieux, et elle évolue lentement et continuellement. » (p.182)

En somme, un ordre immuable qu'il convient de restaurer, avec cette touche champêtre mise en exergue puisque la ville abîme les hommes (« Quand le train de province, en gare de Paris, dépose le novice, c'est un corps qui tombe dans la foule, où il ne cessera pas de gesticuler et de se transformer jusqu'à ce qu'il en sorte, dégradé ou ennobli, cadavre. »)

 

L'idéal barrésien en résumé : une substance fumeuse, un monde rural fantasmé.

 

Et dire que la France est entrée dans le XXe siècle avec ces représentations chimériques ancrées dans les esprits. Mais sommes-nous mieux lotis en ce début de XXIe ?

 

 

Alexandre Anizy

 

La contradiction des intégristes de l'Europe

Publié le par Alexandre Anizy

 

Les 27 hommes d’État de l'Union Européenne viennent de s'entendre sur le budget de la Communauté à l'horizon 2020. Un budget dont le montant sera inférieur à celui d'aujourd'hui.

 

Si les Fédéralistes au pouvoir, qui usent toujours du concept d' "intégration européenne" pour cacher leur véritable objectif, acceptent cette contradiction majeure, à savoir un État fédéral doté d'un budget riquiqui, on encourage les médiacrates (mais en sont-ils capables ?) à répondre intelligemment aux questions qu'elle soulève.

 

On rirait presque de ces intégristes de l'Europe, s'il n'y avait pas des millions de chômeurs, et encore plus de pauvres, condamnés à une vie de chien par ces dirigeants pathétiques.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

Le colibri d'Hervé Jovelin

Publié le par Alexandre Anizy

 

Pour les amateurs de polars : le colibri d'Hervé Jovelin (Ravet-Anceau, février 2011, 165 pages, 9,13 €).

Voilà un ouvrage joliment troussé, au style plaisant.

Pour découvrir Amiens et le colibri, personnage central bien campé par l'auteur, rendez-vous dans les points de vente ou de lecture !

 

 

Alexandre Anizy

 

 

De la qualité chez Juli Zeh

Publié le par Alexandre Anizy

 

Juli Zeh, avocat de formation, a très vite commencé à écrire, son Spieltrieb (fort malencontreusement traduit¹ chez Actes Sud par la fille sans qualité – collection Babel, septembre 2008, 659 pages, 11,50 €) lui ayant donné une notoriété internationale à 30 ans.

 

Incontestablement, Juli Zeh sait écrire. Mieux que ça : elle a du style. Mais elle a aussi le défaut de sa profession initiale : le bavardage. A notre avis, un tiers du livre pouvait nous être épargné.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

(¹) : littéralement, c'est « enjouement ».

 

 

PMA et GPA : l'hypocrisie de la noblesse républicaine

Publié le par Alexandre Anizy

 

Dans le dossier du « mariage pour les homosexuel(le)s »¹, le gouvernement vient de montrer toute sa filouterie, par précipitation : sûr de son nombre au parlement, il arrange déjà les choses (pour contribuer à la jurisprudence ? Pour répondre à un besoin particulier et urgent ?) avec une circulaire du garde des sceaux Christiane Taubira, qui recommande de délivrer la nationalité française aux enfants nés à l'étranger d'un père français ayant usé de la gestation pour autrui (GPA).

 

Nous n'entrerons pas dans ce débat indécent, quand la France compte 5 millions de sans-emploi et 8 millions de pauvres.

 

Mais nous tenons à souligner la lâcheté et l'ironie de la noblesse républicaine (ou pas) : pour faire passer des lois régressives (en l'occurrence, celle de traiter l'humain comme une marchandise : la mère porteuse livre pour un salaire de misère un produit qu'elle a fabriqué, n'est-ce pas?), les nantis trouvent toujours un idiot utile : aujourd'hui, c'est la noire Taubira, pour exploiter le corps des femmes nécessiteuses ; hier, c'était l'ouvrier Bérégovoy, pour libéraliser le marché financier.

 

Au jour d'aujourd'hui, si les lanternes utiles ne manquent pas, les Diogène font défaut.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(¹) : la sociologue Nathalie Heinich a écrit un excellent article sur le sujet (Libération du 27 janvier 2013)

 

 

 

Euro : pourquoi l'Allemagne voulait-elle la monnaie unique ?

Publié le par Alexandre Anizy

 

En cette période de jubilé (traité de l’Élysée entre l'Allemagne et la France), la coutume veut que l'on regarde le passé avec mansuétude. Nous préférons le faire avec lucidité, car la crise de l'euro n'est pas finie, étant donné que les causes n'ont pas été éradiquées. C'est pourquoi il n'est pas inutile de répondre à cette simple question : pourquoi ont-ils créé l'euro sous la forme de monnaie unique ? Selon nous, l'économiste Jacques Sapir apporta une excellente réponse dans le chapitre 1 de son livre Faut-il sortir de l'euro ? (Seuil, janvier 2012, 192 pages, 14,90 €). Voici l'analyse argumentée qu'il développe.

 

Ils auraient pu créer une monnaie commune qui serait venue « s'ajouter aux monnaies nationales, les compléter et servir d'instrument pour les échanges internationaux de marchandises et de capitaux pour une zone géographique donnée, [qui] offre à la fois les avantages de la stabilité que l'on a avec une monnaie unique et une flexibilité des taux de change qui fait défaut. Avec une monnaie commune, nul n'est obligé de fixer à jamais les rapports des taux de change entre les monnaies des pays membres. » (p.24)

Oui mais voilà, pour empêcher toute spéculation à l'intérieur de sa zone, la monnaie commune impose des règles strictes limitant les mouvements de capitaux. Or les politiciens européens voulaient une libéralisation financière totale : les dits socialistes français n'y sont pas pour rien.

 

 

Au commencement de cette construction européenne, il y a le Serpent monétaire européen issu du rapport Werner de 1970 : il fut la réponse européenne à la décision des États-Unis (sous Richard Nixon) de ne plus convertir automatiquement le dollar en or au taux de 35 USD l'once. Les marges de fluctuation des monnaies membres étaient de + ou – 2,5 %.

L'adoption du principe des taux de change flottants par les États-Unis (concrètement, le gouvernement américain refuse de soutenir sa monnaie sur les marchés), conjuguée aux crises internationales (guerre du Kippour – du 6 au 24 octobre 1973 ; embargo arabe du pétrole – réunion de l'OPEP du 16 et 17 octobre 1973) perturbent fortement le Serpent monétaire qui enchaînera les crises du fait de la montée inexorable du Deutsche Mark (DM) notamment.

 

Le 27 octobre 1977, le britannique Roy Jenkins, Président de la Commission européenne, propose de créer une monnaie unique pour les neuf pays et un budget communautaire fixé à 10 % de chaque PIB, une condition technique logique pour garantir cette monnaie qui fut rejetée politiquementpar tous les pays !

10 % pour débuter, mais il aurait fallu aussi annoncer dès la création l'échéancier court atteignant 30 %. (NdAA)

 

En 1979, le Système Monétaire Européen (SME) émerge de longues négociations : les monnaies nationales vont fluctuer autour d'un cours pivot en ECU (european currency unity), fondé sur un panier de monnaies de pays membres. Hormis une légère réévaluation du DM en septembre 1979, rien ne se passe avant l'arrivée au pouvoir du francisquain Mitterrand. Après 3 dévaluations successives du franc et le virage libéral de 1982-83 sous la houlette du social-traître Jacques Delors, s'ouvre une longue période de stabilité jusqu'en 1992.

« On a ainsi oublié que le SME avait pu fonctionner, en dépit de ses défauts et de l'ouverture progressive des économies aux mouvements de capitaux, pendant 9 ans. » (p.26)

En 1992, l'échec du référendum danois déclenche la spéculation, qui provoque la dévaluation de la lire et de la peseta, et la livre quitte le SME. En 1993, les spéculateurs opèrent contre le franc, obligeant à placer les marges de fluctuation à hauteur de 15 % … Le SME ne s'en remettra pas.

 

L'analyse dominante à cette époque veut que seule une monnaie unique peut contrer la spéculation en produisant un système stable.

« Nous savons aujourd'hui qu'il n'en est rien. La spéculation s'est en fait reportée des taux de change aux taux d'intérêt de la dette souveraine entre chaque pays. » (p.26)

En réalité à cette époque, il n'était pas question pour les dirigeants libéraux européens de rejeter leur croyance dans la théorie des changes flottants, et encore moins de brider la liberté des mouvements de capitaux, ce qui laissait la possibilité à des spéculateurs professionnels comme Georges Soros de mobiliser des montants financiers colossaux. Autrement dit, en s'arc-boutant sur une théorie fallacieuse (puisqu'il a été démontré que ses bienfaits, notamment sur la croissance, ne se sont pas vérifiés) et en offrant les munitions financières aux spéculateurs par le choix du laisser-faire, les dirigeants libéraux européens ont favorisé le désastre.

Mais comme ces hommes et leurs scribes n'étaient ni idiots ni insensibles devant les faits chiffrés, il faut chercher leur(s) objectif(s).

 

C'est là que l'analyse de Jacques Sapir devient intéressante :

« En fait, c'est la volonté allemande de se servir des marchés financiers pour normaliser les politiques économiques des autres États combinée aux intérêts financiers du Royaume-Uni qui explique l'opposition absolue et adamantine de contrôler ne serait-ce qu'en partie les marchés financiers. La France avait bien identifié les implications de la position britanniques, mais elle est restée aveugle quant à la position allemande. » (p.28)

D'une part, le SME ne convenait pas à l'Allemagne, parce qu'il permettait à ses partenaires européens d'équilibrer leurs comptes nationaux grâce aux dévaluations, tout en assurant leurs développements, alors qu'il ne garantissait pas le débouché commercial aux produits de son industrie dans l'UE. D'autre part, il fallait écarter à nouveau la proposition de Roy Jenkins de 1977, i.e. l'union budgétaire : pas question de piocher dans la richesse allemande pour "subventionner le club Med", selon l'expression en vigueur depuis la faillite grecque de 2010 (le temps est passé, mais rien n'a changé en Allemagne … ).

« C'est pourquoi l'acte fondateur de la monnaie unique insiste sur la notion de responsabilité budgétaire individuelle de chaque pays. » (p.29)

 

En 1990, les Allemands n'étaient pas plus ou moins égoïstes que les autres. Ils avaient et ils ont simplement un problème majeur : leur effondrement démographique. Le versement des retraites futures va dépendre de la richesse accumulée et capitalisée. En conséquence, il était et il est d'une part hors de question de toucher au magot pour boucler les comptes d'autres nations, et il fallait d'autre part garantir la valeur future du magot en se soumettant à la logique des marchés financiers.

Les statistiques économiques montrent bien la financiarisation accélérée de l'économie allemande à partir de cette prise de conscience.

En 1990, brusquant la réunification allemande, le chancelier Helmut Kohl, en fin diplomate, propose un traité (le futur Maastricht) au francisquain Mitterrand, qui entérine l'extension de la République Fédérale Allemande et le principe de l'union monétaire. Suprême habilité : cette union monétaire « est présentée comme un sacrifice [l'Allemagne abandonnant son "cher DM", n'est-ce pas? NdAA] de l'Allemagne, alors qu'il s'agit en réalité de ce qu'elle veut obtenir. François Mitterrand s'est bercé d'illusions s'il a cru, comme on le dit, clouer la main de l'Allemagne sur la table. » (p.31)

En fait, le traité de Maastricht fut bordé par des précautions constitutionnelles multiples, notamment l'arrêt du 12 octobre 1993 du Tribunal Constitutionnel de Karlsruhe qui précise que le passage à la monnaie unique devait se faire dans le cadre d'une communauté de stabilité monétaire :

« Cette conception de l'union monétaire, communauté de stabilité monétaire, est le fondement de la loi allemande. » (p.31)

Réaffirmée dans un arrêt de septembre 2011 : la mutualisation de la dette est anticonstitutionnelle pour la Cour de Karlsruhe.

Par conséquent, ridicules sont les politiciens français, voire les "experts", lorsqu'ils glosent sur les eurobonds ou la monétisation directe de la dette réalisée par des avances de la BCE : « La porte a été fermée par la Cour de Karlsruhe. »

 

« La volonté de l'Allemagne était ainsi de faire de la monnaie unique un cadre contraignant mais sans la moindre compensation du point de vue budgétaire. Le statut de la BCE et son objectif unique, la stabilité monétaire, en découlent. » (p.32)

D'aucuns objecteront que la BCE a montré depuis l'été 2007 qu'elle pouvait enfreindre son statut pour intervenir massivement en offrant des liquidités aux banques. En effet, il fallait sauver le système bancaire … et si celui-ci s'était écroulé, la BCE aurait failli à son unique mission : la stabilité monétaire.

« Dans une Allemagne largement financiarisée, la stabilité des banques est bien devenue un objectif légitime. Le gouvernement allemand n'a pas hésité à sauver ses banques en 2008. » (p.32)

 

Fort des faits établis depuis la création de la monnaie unique, revenons sur le compromis fondateur :

- pour l'Allemagne, c'est un droit d'accès aux principaux marchés de ses voisins (France, Italie, Espagne)

  • sans restrictions tarifaires (principe du Marché Unique),

  • sans restrictions monétaires (l'arme de la dévaluation est retirée à ses concurrents) ;

- pour les autres pays, c'est l'accès au marché financier aux mêmes conditions que l'Allemagne (des taux d'intérêt très bas).

Magnanime, l'Allemagne offrait en quelque sorte à ses partenaires un permis de s'endetter à bon compte, ce dont les politiciens médiocres ou pourris (le cas des clans des 2 familles grecques qui tiennent le pouvoir depuis 40 ans) ne se privèrent pas.

Au fait, s'endetter pour quoi ? Acheter des produits allemands, par exemple.

Mais en 2008, l'avantage octroyé aux autres pays européens disparaît : les écarts sur les taux d'intérêt des dettes nationales commencent à s'amplifier. En 2011, une forte disparité est bien établie.

 

« Le compromis initial est donc clairement rompu ; mais cette rupture est asymétrique (...) » car l'Allemagne a conservé ses avantages (droit d'accès sans restrictions tarifaires et monétaires), tandis que les autres pays européens ont perdu le leur (si on considère que le permis de s'endetter sur le marché financier était un avantage – ce qui n'est pas notre appréciation).

Il est probable que l'Allemagne quittera l'euro si les autres pays remettent en cause ses choix fondamentaux (communauté de stabilité monétaire, responsabilité budgétaire individuelle de chaque pays).

 

 

Alexandre Anizy

 

 

 

 

 

Le prochain Grégoire Delacourt n'est pas dans la liste de mes envies

Publié le par Alexandre Anizy

 

Le publicitaire Grégoire Delacourt a connu le succès en 2012 avec un court roman, la liste de mes envies (éditions JC Lattès, février 2012, livrel de 96 pages - sur un mobile). C'est tant mieux pour lui.

 

Mais en lisant l'ouvrage, nous restâmes insensibles à cette historiette mélodramatique dont le style très dépouillé, où les énumérations s'accumulent même en dehors de la fameuse liste, ne parvint pas à la sauver.

 

« Une fois, il m'a dit que j'étais belle. Il y a plus de vingt ans et j'avais un peu plus de vingt ans. J'étais joliment vêtue, une robe bleue, une ceinture dorée, un faux air de Dior ; il voulait coucher avec moi. Son compliment eut raison de mes jolis vêtements. » (p.8)

 

Pire. Plus nous lisions, plus nous pensions à un autre publicitaire dont l’œuvre cinématographique montre paradoxalement le plus profond mépris pour l'espèce humaine en générale, et les petites gens en particulier. Il s'agit d'Etienne Chatiliez. Une curieuse sensation pour un livre dit populaire.

 

 

Alexandre Anizy