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notes culturelles

Anciens combattants de Frédéric Jacques Temple

Publié le par Alexandre Anizy

Il nous semble que l’irrévérence contribue à la culture du respect. Qui mieux que Frédéric Jacques Temple ?

 

 

Anciens combattants

 

Ils sont revenus

vingt ans après Cassino

les tempes grises

bardés de caméras et de lires

avec leurs femmes acariâtres.

Ils tentent en vain de mettre

leurs pas dans les pas d'autrefois...

 

Les voyez-vous sur les champs de bataille

stupéfaits de leurs vieux exploits

honteux de ne retrouver qu'eux-mêmes

encombrés de bedons et de bretelles

tricolores...

 

Frédéric Jacques Temple

(La chasse infinie et autres poèmes, Poésie/Gallimard, 2020)

 

 

Chronique de Belgrade d’Ivo Andrić

Publié le par Alexandre Anizy

            Les éditions des Syrtes ont eu la bonne idée de rassembler des nouvelles du grand romancier yougoslave Ivo Andrić : qu’ils en soient remerciés.

 

            Le livre est intitulé La chronique de Belgrade (2023), puisque les scènes se passent dans Belgrade au temps des nazis. De là prétendre que l’auteur aurait eu peut-être l’intention de faire de la Ville blanche à cette époque le personnage central d’un livre, ce n’est hélas que  tirer sur une ficelle des affaires. Mais peu importe.

 

            Zeko raconte l’évolution psychologique d’un héros ordinaire, très ordinaire de la Résistance.

« Affirmer, comme on l’a écrit, que Belgrade entre 1941 et 1944 était "la ville la plus malheureuse d’Europe", n’est peut-être pas tout à fait exact, mais il n’en demeure pas moins qu’elle fut à cette époque un théâtre où s’enchaînèrent des illustrations du mal et de la bassesse dont les hommes sont capables, mais aussi de grandeur et de beauté. On souffrit, on pâtit physiquement et moralement. Une composante toute minuscule de cette Belgrade-là fut la maison de l’ingénieur rue Tolstojeva. » (p.104)

 

            Le jour où… est une courte nouvelle qui dessine un autre personnage en train de se libérer de la peur.

« Oui, la vie est possible. Il le sent clairement même si, à chaque instant, l’un de ces sales et derniers obus peut l’emporter, ce que souligne sans ambiguïté la peur qui lui enserre l’estomac, qu’il lit dans les yeux exorbités du jeune ouvrier. Malgré tout, la vie est possible, luxuriante, riche de sens. Jamais elle n’avait été aussi proche, intelligible, possible. » (p.178)

 

 

Cher éditeur, pour votre travail, point de justificatif douteux ! Le talent d’Ivo Andrić suffit.

    

Alexandre Anizy  

 

Les morsures de Gérard Laveau

Publié le par Alexandre Anizy

            Si l’été pluvieux et venteux vous pèse, peut-être comme un couvercle, plongez sans hésitation dans la moiteur du dernier polar de Gérard Laveau.

 

Les morsures du paradis (éditions Maïa, juin 2023) se passent dans le Sud, où vous retrouverez les détectives Torpédo & Amer, toujours dans la dèche.

« Le vieux détective dort, elle lui a donné ses antalgiques, deux gros comprimés blancs. Maintenant, elle comparaît devant une sorte de tribunal. C’est l’impression que cela lui fait. Ils sont autour de la table de la pension au prétexte d’un café. En réalité, elle les affronte. Les parents et le fils, pas vraiment agressifs, mais moins souriants. Le père lui avait annoncé la couleur, elle a eu le temps de décider de ce qu’elle lâcherait.

Francis toussote. Sévère.

̶  Votre éditeur. Il est tombé où, au juste ? » (p.94/222)

 

Si le paradis est inexorablement délabré par les hommes, vous pouvez vous réfugier pour quelques heures dans ces pages léchées de Gérard Laveau (également ici ) : un petit bonheur sans conséquence.

 

Alexandre Anizy  

 

Le nouveau de Keigo Higashino

Publié le par Alexandre Anizy

            A Paris, on peut lire Higashino dans le système de Prêt Numérique en Bibliothèque, dont le catalogue est indigne de la Ville Lumière.  

 

C’est le cas notamment pour Le nouveau (Actes Sud, 2021), dans lequel Keigo Higashino étonne toujours par son brio architectonique (lire Doigts de Higashino sur mezzanines de Françoise Nyssen ou bien encore Un café maison ).     

 

Alexandre Anizy  

 

La scierie

Publié le par Alexandre Anizy

            Qui aime les arbres doit connaître cette activité particulière : la scierie. En 1953, un anonyme a raconté.

 

Grâce à notre librairie de quartier (c’est tout l’intérêt de les fréquenter), nous sommes tombés sur un exemplaire de La scierie (éditions Héros-Limite, 2013), que nous qualifions de récit documentaire sur le début professionnel d’un jeunot qui attend l’appel du service militaire : le décor, l’ambiance,  les machines, les rapports humains, les cadences infernales… Si la technique a progressé, peut-on vraiment dire que tout cela a changé ?    

 

Alexandre Anizy  

 

Heureux qui lit Bartelt

Publié le par Alexandre Anizy

            Avec le temps, on peut devenir sage.

 

Franz Bartelt est à sa manière un sublime¹ du monde des « Lettres françaises » : il  montre une nouvelle fois (lire par exemple Franz Bartelt écrit ce qui lui plait ) son talent dans Je ne suis pas malheureux (Le Dilettante, 2023).   

 

Alexandre Anizy  

 

(¹) Cf. Denis Poulot, Question sociale. Le Sublime ou le travailleur parisien tel qu’il est en 1870, Maspéro, 1980.

 

Des destins de William Cliff

Publié le par Alexandre Anizy

            William, un vieux garçon toujours dans le vent...

 

 

 

Je passe tout mon temps écrivant de la poésie

comme pour graver dans l’écoulement du temps

une éternité que j’aurais choisie.

 

Hélas ! hélas ! j’ai la tête toute moisie

par des idées, des lambeaux noirs entre mes dents

me faisant croire avoir des soucis importants

malgré mon rêve ancré aux abysses du Vide.

 

Eh bien, mon cœur, à travers ce temps qui vous mord,

tendez votre aile frêle et sans plus de remord

prenez votre envol et gravissez la grisaille !

 

Allez, allez malgré tout ce qui vous assaille,

ces noirs autans qui vous mitraillent de tous bords,

allez, allez déverser votre âpre criaille

au mauvais temps qui vous canarde là dehors !

 

 

William Cliff

(Des destins, La Table Ronde, 2023)

A part d'Andrée Chedid

Publié le par Alexandre Anizy

 

A part

 

A part le temps

Et ses rouages

A part la terre

En éruptions

A part le ciel

Pétrisseur de nuages

A part l'ennemi

Qui génère l'ennemi

 

A part le désamour

Qui ronge l'illusion

A part la durée

Qui moisit nos visages

 

A part les fléaux

A part la tyrannie

A part l'ombre et le crime

Nos batailles nos outrages

 

Je te célèbre ô Vie

Entre cavités et songes

Intervalle convoité

Entre le vide et le rien.

 

Andrée Chedid

(Rythmes, poésie-Gallimard)

 

Terra Alta II et III de Javier Cercas

Publié le par Alexandre Anizy

            Que penser de la trilogie (pour l’instant) ?

 

Quand nous avons lu le premier tome au moment de sa parution, nous n’avons pas estimé utile d’en parler, d’autant que nous avions déjà écrit sur cet auteur (lire ici). Mais puisque rien ne suscitait notre envie dans la production pléthorique des polars, nous achetâmes la suite.

Indépendance (Acte sud, 2022) est caustique : Javier Cercas dégomme la bourgeoisie d’affaires indépendantiste de Catalogne, plus intéressée par le Pouvoir que par l’indépendance de la province.

Le château de Barbe-Bleue (Actes sud, 2023) surfe sur l’actualité des milliardaires prédateurs sexuels, et la corruption à Majorque. Structuré habilement, bien écrit.

« Après Le Monarque des ombres, le premier livre – très difficile – que j’aie jamais voulu écrire, car il parlait du passé franquiste d’une partie de ma famille, j’ai eu la certitude que j’avais clos le cycle narratif de l’autofiction. Si je le poursuivais, je courais le risque de me répéter ou de m’imiter. J’ai senti l’urgence de me réinventer », racontait Cercas en 2021¹.

 Changement réussi, et bénéfique puisque l’auteur a reçu le prix Planeta en 2019.

 

Alexandre Anizy  

 

(¹) imMonde du 21 mai 2021.

Pas la dalle chez Fred Vargas

Publié le par Alexandre Anizy

            Avec cette autrice, on lit à sa faim.

 

Nous étions en froid avec Fred Vargas (lire ici ), mais son nouvel opus Sur la dalle (Flammarion, 17 mai 2023, en livrel¹) la remet à son niveau, mis à part le titre faiblard : à ce compte-là, pourquoi pas « dans le foyard » ?

 

Alexandre Anizy  

 

(¹) Ayant dû changer très souvent la taille de police pour ne pas en perdre des bribes, nous ne félicitons pas Flammarion pour la qualité du produit, encore moins le sous-traitant Pixellence pour la fabrication.

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