Souvenir de Louis-Philippe Dalembert

Publié le par Alexandre Anizy

souvenir

 

je me souviens d’une rue

étroite et longiligne

une venelle d’une cité

dont je n’ai plus mémoire

 

la rue donnait sur une petite place

ocre fermée d’un côté

ouverte de l’autre sur un port de pêche

ou de plaisance allez savoir

des bateaux arrimés à des pontons

dansaient au gré des flots

dans le bruissement lancinant des drisses

fouettant les vergues et les mâts

 

des hommes et des femmes

installés sur la place

autour de tables en bois carrées

recouvertes de nappes à carreaux rouge et blanc

bavardaient en sirotant des cocktails multicolores

à l’abri des bus à toit ouvert

qui rasaient les murs

et le rire insouciant des enfants

 

le temps était si sombre

qu’il ressemblait au crépuscule

ou à un matin d’automne

à l’heure où le ciel indécis

tarde à appareiller vers le grand jour

 

le temps passe si vite désormais

que je ne me souviens plus très bien

ni du nom de la ville

ni de celle qui m’accompagnait

peut-être n’y avait-il personne

 

le temps passe si vite

tellement vite que le soleil même

s’est perdu en chemin

 

 

Louis-Philippe Dalembert

(Cantique du balbutiement, éditions Bruno Doucey, 2020)

 

Publié dans Notes culturelles

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