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Patricia MacDonald dans son taillis

Publié le par Alexandre Anizy

            Chez Patricia MacDonald, rien n'est créé, tout est recyclé. 

 

 

Ce devait être un dimanche de lassitude pour avoir succombé au rouleau compresseur d'une commercialisation bien huilée (" the battle for your mind ") : une visite impromptue chez un vendeur dominical pour finalement acheter le dernier polar de Patricia MacDonald, titré La fille dans les bois (Albin Michel, 2018, en livrel)

 

L'écrivailleuse MacDonald a commencé sa carrière en 1981 : elle a donc du métier pour concevoir une trame romanesque qui incite le lecteur à vouloir tourner les pages. C'est toujours le cas, même si le style donne plutôt envie de fermer la liseuse, parce que dans son job Patricia MacDonald fait l'impasse sur le gueuloir.

 

Voici 3 exemples (en une page - 6 sur 250).

« Aujourd'hui, les parents de Molly avaient fermé leur brasserie, l'Après-Ski, pour se rendre à une foire commerciale à Philadelphie. Ils ne voulaient pas que Molly reste seule chez elle car, ces derniers temps, la police avait été appelée à plusieurs reprises chez leur voisin, un alcoolique qui se défoulait de ses frustrations sur sa famille, à coups de poing. Les Sinclair auraient préféré que Molly vienne avec eux à Philadelphie, mais elle avait un exposé à faire ce jour-là et tenait à aller en cours. »

La répétition de Philadelphie est inutile : alors lequel est de trop ?

« Le bus cheminait lentement le long des rues escarpées de Yorkville, lâchant çà et là des collégiens. »

Un oxymoron qui ralentit la phrase. Ôtez lentement, et vous gagnez une légèreté en phase avec le texte.

« Le nez collé à la vitre, Blair regardait défiler Main Street. La brasserie, le bazar, les bureaux du journal local, les boutiques de vêtements. Sur le trottoir, un chien traînait au bout de sa laisse une femme engoncée dans une parka et coiffée d'un bonnet. »

Empiler des expressions toutes faites, c'est une caractéristique de l'écrivailleur. Si vous mettez "le nez à la vitre", vous suggérez une image au lecteur... et vous restez dans le rythme du paragraphe qui devrait finir par "dans une parka".

 

 

            Alors La fille dans les bois de Patricia MacDonald ? Veni, vidi... et si j'avais su, j'aurais pas venu !

 

 

Alexandre Anizy

Adresse au suffisant Jupiter

Publié le par Alexandre Anizy

            C'est un portrait ressemblant du bankster.   

 

 

 

Le suffisant

 

Son oeil disait qu'il était directeur

Sa parole fusillait ou assommait

C'est selon.

La tendresse il en avait fait

Le deuil tant il s'était habitué

A sabrer dicter rabrouer

Sa jouissance, quelle misère !

Il voulait qu'on l'aime,

Il s'y prenait très mal.

Le métier d'intelligence

Etouffait en lui l'émotion,

Cette émotion

Sans aplomb

Sans armure.

Son humour était savant,

Autant dire inaudible.

Son verbe était cassant,

Autant dire inhabité.

Cet intelligent-là

N'avait pas compris

Que la faiblesse

Est désirable

& que l'amour

Conquiert le conquérant

 

 

Nimrod

(J'aurais un royaume en bois flottés, poésie Gallimard)