Le prix du Quai des Orfèvres à Jean-François Pasques
Voilà un flic qui ne démérite pas.
Fils de personne (Fayard, 2022) de Jean-François Pasques est un roman de gare (lire ici ) qui se lit sans déplaisir.
Alexandre Anizy
Ecrivain - Economiste. Propos sur l'économie, la littérature et la politique.
Voilà un flic qui ne démérite pas.
Fils de personne (Fayard, 2022) de Jean-François Pasques est un roman de gare (lire ici ) qui se lit sans déplaisir.
Alexandre Anizy
Travailler encore aurait fait du bien.
Michel Claise est un juge belge important, nous dit-on. Malgré son travail harassant, il a trouvé le moyen de signer un paquet d’ouvrages en quelques années.
Par curiosité pour les affaires du port d’Anvers, nous lûmes Crime d’initiés (Genèse éditions, 2021). Que dire ? Sans doute trop empreint de sa prose juridique et fort de sa notoriété, le juge Claise prend peut-être un style lâche pour de l’audace, à moindre effort.
Au panier le dernier Claise !
Alexandre Anizy
Être citoyen d’un pays, c’est y avoir des droits et y remplir des devoirs, notamment le plein paiement des impôts et taxes qui contribuent au bien-être de tous les membres de la collectivité (i.e. des logements décents, un système de santé à la hauteur, des enfants au ventre plein le matin à l’école, etc.). Mais certains Français jouissent pleinement de leurs droits et s’exonèrent partiellement ou entièrement de leurs devoirs en toute légalité… ou pas : ce sont des citoyens malévoles.
Comme ces mauvais payeurs se permettent en plus de donner des leçons d’économie (Bernard Arnault), de patriotisme (Liliane Bettencourt¹), et tous de faire la morale aux autres, notamment aux grévistes qui « prennent en otages » les usagers des transports publics, alors aujourd’hui grâce à un juge canadien nous ajoutons quelques noms à la liste non exhaustive des citoyens malévoles.
Pour mettre en exergue l’ampleur du mal, commençons par le seigneur non cité par notre source, première fortune mondiale et à coup sûr grand malévole : Bernard Arnault. Le 1 février 2023, le Canard enchaîné² nous apprenait ainsi : « En 2019, Arnault a déclaré un peu plus de 280 millions revenus. Qui se décomposent en 10 misérables millions de salaires et un peu plus de 270 millions de plus-value sur des ventes d’actions (…). Surprise : sur ce pactole, l’homme le plus riche du monde ne paie qu’environ 50 millions d’impôt (la loi nous interdit de donner le chiffre exact). Soit un taux d’imposition de 18 %. C’est ce qui est appliqué à un couple sans enfant gagnant 150.000 euros par an… Très loin de la tranche supérieure du barème : 49 % (avec la contribution sur les hauts revenus). » Pour les dividendes (environ 1 milliard), dont on ne parlera pas ici tellement l’indécence touche à son comble, il paya un impôt riquiqui d’environ 10 millions qui à terme l’amènera à un taux de 12,8 %. Qui peut "dire aussi mal" en France ?
Dans le resquillage légal³, le seigneur Bernard Arnault lui-même : il « est parvenu à régler sa succession au profit de ses enfants en réduisant de 45% à 6,5% les droits afférents, selon Le Canard Enchaîné. (…) L'hebdomadaire satirique, qui cite "des confidences de proches" de Bernard Arnault, explique que l'opération s'est déroulée en deux temps, dont le premier acte remonte à 2005 (…). Bernard Arnault crée à l'époque une holding, nommée Pilinvest, chargée de recueillir les actions du groupe Arnault, qui contrôle toutes ses sociétés, selon Le Canard⁴. Bernard Arnault y transfère progressivement 90% de ses titres, en toute discrétion, souligne l'hebdomadaire. Il cède ensuite à ses cinq enfants la nue-propriété de 49% de ses titres, et n'en conserve que l'usufruit, c'est-à-dire les dividendes et les droits de vote attachés à ces actions. Mais cet usufruit disparaîtra le jour de son décès et ses enfants en deviendront alors pleinement propriétaires, précise Le Canard. Il ajoute qu'une fondation, Proctinvest, est chargée de s'assurer que les héritiers ne démembrent pas l'empire qu'il a bâti. Pour calculer les droits de donation, le fisc français est contraint d'appliquer une première décote puisque le don en usufruit fait perdre aux actions cédées la moitié de leur valeur, explique le journal. Il ajoute que les héritiers ont par ailleurs signé un pacte, prévu par la loi Dutreil, en vertu duquel ils s'engagent à ne pas vendre leurs titres avant deux ou six ans, ce qui induit une seconde décote de 75%. Dernier point, les actions cédées à l'époque ont doublé en valeur, souligne-t-il. L'ensemble de ces opérations ont permis d'éviter d'appliquer le taux officiel de 45% et de ne payer que 6,5% de la valeur actuelle du groupe, dont la valeur est estimée à 30 milliards d'euros, selon le journal. » Challenges.fr (6 février 2013, à 19h06)
En matière de resquillage légal, pour ceux qui s’intéressent à ce triste sire en tant que patron de l’empire LVMH, nous les renvoyons par exemple aux articles de l’imMonde du 19 septembre 2012⁵ et du Canard enchaîné du 12 octobre 2016.
Si le juge canadien Bernard Synnot ne cite pas Bernard Arnault, en tout cas dans l’article du Journal du Dimanche qui a lu son jugement rendu le 26 janvier 2023 dans l’affaire « Blue Bridge », il donne des noms. « Au fil des 67 pages de son jugement, on croise ainsi « les familles Charoy, Coste, Boissonnas, Lebel, Verger ». Et puis Robert et Nicolas Monnier (trust Bonaventure), héritiers du peintre Henri Matisse, leur père Bernard (trust Baryton), sa seconde femme Virginie Lehideux-Vernimmen (tous deux décédés) et le fils de cette dernière, Arnaud de Caumont La Force (trust Lagune), Michèle Robineau-Mouton et son fils Patrick Mouton (trust Nipigon), la famille de Bernard Lanvin ou encore Julie Barlatier (héritière d’une famille d’entrepreneurs provençaux).⁶ ». « En 2019, le Journal de Montréal révélait le scandale. En 2021, Capital puis Libération donnaient les premiers noms : les frères Seydoux (plus de 1 milliard d’euros dans 14 trusts), Hubert Guerrand-Hermès (décédé en 2016, avec 500 millions dans des trusts, dont les héritiers ont depuis régularisé leur situation avec les services fiscaux), l’ancien maire de Vittel Guy de la Motte-Bouloumié (décédé en 2022, il avait appelé ses trusts Evian et Badoit), la scénariste Danièle Thomson⁷ (qui assurait à Libération que ses deux trusts, soit 1 million d’euros, étaient en règle avec l’administration fiscale), un héritier des cafés Richard, un autre des pastilles Pulmoll…⁶ ».
En conclusion, nous paraphrasons un docteur très médiatique en disant que "c’est bon à savoir" à qui on a affaire. Un citoyen malévole n’a qu’une patrie : son portefeuille.
Alexandre Anizy
(¹) Liliane Bettencourt et son mari ont planqué en Suisse plusieurs dizaines de millions d’euros pendant plus de 30 ans. Cela n’empêcha pas cette vieille dame indigne de dire au cours d’un entretien exclusif à TF1, diffusé dans le JT de 20h le 2 juillet 2010, qu’il ne faut "pas faire de mal à son pays". Le top de la fourberie, n’est-ce pas ?
(²) Canard enchaîné du 1 février 2023, page 3.
(³) Nous appelons resquillage légal ce que d’aucuns nomment "optimisation fiscale".
(⁴) Canard enchaîné du 6 février 2013.
(⁵) Le Monde du 19 septembre 2012, page 16 : « Cela aurait permis à LVMH de ne payer en Belgique que 24,2 millions d’euros d’impôts sur 630 millions de bénéfices depuis 2009. »
(⁶) Le Journal du Dimanche du 5 février 2023, page 20.
(⁷) Avec Danièle Thomson (dialoguiste), rions un peu des avaricieux en nous souvenant de La folie des grandeurs, dans la scène où Yves Montand dit à Louis de Funès : « Il est l’Or, il est l’Or, l’or de se réveiller, mon seign’or… »
Si vous avez envie d’une balade provençale…
Les éditions du Masque ont eu la bonne idée de publier Le mistral meurtrier de Cay Rademacher (2022 ; traduction de Georges Sturm), le 1er opus des enquêtes du capitaine Roger Blanc.
Ni l’écriture ni l’architectonique ne sont bâclés. C’est rafraîchissant comme un pastis, odorant comme un bouquet de lavande, bien qu’émanant d’un médiacrate allemand*.
Alexandre Anizy
(*) Auscultant la France à travers le prisme ordo-libéral comme toute la classe dirigeante teutonne, le journaleux Rademacher n’a pas pu s’empêcher de railler les grèves et les manifestations de la CGT… bien qu’il vive en Provence. A deux reprises donc, il nous fit penser à Peter Sloterdijk (lire ici ).