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Avec Ian Manook, l'hebdo Elle vous prend pour des connes

Publié le par Alexandre Anizy

            Lorsque nous aurons écrit que Ian Manook est le pseudonyme faiblard de Patrick Manoukian (le frère d'André, forcément), vous aurez une première idée du niveau de son 1er polar titré Yeruldelgger (Albin Michel, octobre 2013, livrel à 14,99 € - trop cher !). Si nous ajoutons qu'à 65 ans le bonhomme, qui affirme ne connaître que peu de choses du monde du rompol, a derrière lui une carrière de pubard, vous comprenez que le produit a suivi un mode de fabrication qui n'a rien à envier au milieu de l'agro-alimentaire : aucun ingrédient/argument vendeur ne vous sera épargné.

 

            Le monsieur ayant de l'entregent dans les médias et étant édité par une grosse maison qui sait commercialiser des blockbusters, il fait immédiatement un carton (Grand prix des Lectrices Elle policier ; prix Quai du polar ; prix du polar SNCF), répétant ainsi le succès qu'il obtint précédemment dans la catégorie Jeunesse (prix Gulli pour son 1er livre). Vous avez ainsi une idée du mode opératoire des prix littéraires.

 

            Le produit Yeruldelgger étant formaté, une question nous vient à l'esprit : combien de réécritures ?

 

 

Alexandre Anizy

 

 

Pourquoi la Russie ne doit rien payer à GML

Publié le par Alexandre Anizy

            Il y a environ 30 ans, l'Empire soviétique s'écroulait. Il finissait dans les mains d'un ivrogne, Boris Eltsine, qui livrait pour une poignée de kopecks les actifs socialistes aux vautours de toutes espèces, en n'oubliant pas de remplir ses poches suisses.

            Vous faisant grâce des péripéties de la pseudo économie de marché, on résume la situation actuelle en rappelant que GML n'est que le fruit avarié d'un braquage fondateur.

 

            Considérant qu'ils ont été volés par les propriétaires actuels de l'ex empire pétrolier Ioukos (qui était le principal actif de GML), de nouveaux prédateurs forcément utilitaristes qui ont "l'intelligence" de respecter les intérêts de la pas toujours Sainte Russie, les actionnaires de GML ont engagé une procédure devant la Cour d'arbitrage de La Haye pour réclamer une indemnisation de 100 milliards de dollars.

            La décision de la Cour est prévue lundi 28 juillet.

 

            Cette affaire GML est symptomatique du devenir de l'économie mondialisée, car des jugements privés ont déjà obligé des autorités publiques à des dédommagements. Et si l'indécent Traité Transatlantique voit le jour, il entérinera cette pratique juridique qui veut que le droit ne dépende plus du politique (Carl Schmitt doit en souffrir dans sa tombe, mais pas les ordo-libéraux allemands qui règnent sur l'Europe). Mais avec cette affaire GML, il est possible que nous franchissions un nouveau seuil : la morale s'incline devant le droit.

 

            Car selon nous, l'affaire GML est l'illustration d'une déclinaison de l'arroseur arrosé et de l'adage chanté par Georges Brassens :

« (...) prends garde aux recéleurs,

qui dit que ces gens-là sont pis que les voleurs »

            (Stances à un cambrioleur)

 

            C'est pourquoi en bonne morale le peuple russe n'a rien à payer à ces gredins.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

Notre quelque part de Nii Ayikwei Parkes

Publié le par Alexandre Anizy

            Comme nous l'écrivons régulièrement, un authentique lecteur doit s'aventurer sur les sentiers inconnus : c'est au prix de quelques déconvenues qu'il lui sera permis de découvrir le monde tel qu'il va. Ainsi le Notre quelque part de Nii Ayikwei Parkes (remarquable travail de traduction de Sika Fakambi ; éditions Zulma, février 2014, livrel à 12,99 € - trop cher !) fait partie des livres insolites qui entretiennent l'envie de vagabondage.

 

            L'enquête du diplômé médecin légiste réquisitionné se déroule au Ghana, dans la grande tradition africaine des palabres. Le lecteur doit donc apprendre la patience, et se laisser envelopper par le rythme du langage. Il en sera récompensé.

 

            Notre quelque part raconte un drame de partout, malheureusement. Nii Ayikwei Parkes en donne une version ghanéenne.

 

 

Alexandre Anizy

 

No back up for Paul Colize

Publié le par Alexandre Anizy

            En 2013, Back up de Paul Colize (Gallimard, août 2013 pour le livrel à 7,99 € - Antoine, enfin un prix correct !) reçut le prix poche de Saint-Maur. Le jury était bigrement inspiré ce jour-là. En effet, le roman noir de Paul Colize repose sur un double travail de documentation : le rock'n'roll des sixties et les victimes du Locked-in Syndrome. Le style est adapté au milieu musical dans lequel vivent les protagonistes, évitant l'écueil de la caricature ; quant à l'architectonique, l'auteur l'a peaufinée à souhait.

 

            Pour apprécier ce livre, il est préférable de goûter les temps bénis du swinging London, quand les futurs rock-stars cachetonnaient dans les clubs modestes mais réputés, mais aussi de Berlin. Dans sa biographie des Rolling Stones (1), François Bon a également décrit l'ambiance de cette époque-là.

 

            Comme un bon coolie, Paul Colize est arrivé à destination en donnant satisfaction aux lecteurs.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(1) Lire notre billet

            http://www.alexandreanizy.com/article-6959204.html

 

L'enterrement inattendu de Marguerite Duras

Publié le par Alexandre Anizy

            Chaque année, Gallimard offre un album à tout acheteur de 3 volumes de sa prestigieuse collection La Pléiade. En 2014, c'est L'album Duras par Christiane Blot-Labarrère.

 

            Quelle clarté dans cette biographie illustrée !

            On y apprend que la petite bourgeoise Marguerite Duras, qui prétendait avoir souffert de la précarité, voyageait dans le Tyrol autrichien durant l'été 1935, avait reçu la même année une Ford V8 en cadeau (quelle femme de 21 ans pouvait en dire autant dans cet avant-guerre ?), avait obtenu en 1937 un diplôme d'études supérieures en économie politique, plus un autre en droit public (quelle femme etc.), ce qui lui permit d'entrer au ministère des Colonies, où le ministre Georges Mandel et son chef de cabinet André Diethelm lui confiaient avec Philippe Roques la rédaction d'un livre qui sortira en 1940 (L'Empire français, Gallimard).

            Ces amours en ce temps-là ? Entre autres : Frédéric Max, « ce petit juif de Neuilly », Jean Lagrolet, ce Bayonnais de grande famille, Robert Antelme, ce fils de sous-préfet... on est vraiment loin de Cosette !

            Durant la guerre, Duras est secrétaire de la Commission du contrôle du papier d'édition, puis de l'administrateur de la Bibliothèque Nationale Bernard Faÿ, personnage peu reluisant favorable à l'Allemagne nazie. Les bourgeois intellectuels ne rechignent pas à gratter pour la chienlit française, comme le fit Simone de Beauvoir pour la radio de Vichy. Les grands mots de l'engagement ne viendront qu'après la Libération ! C'est Ramon Fernandez le collabo (père de l'académicien Dominique, grand-père du récent Directeur du Trésor Ramon Fernandez) qui lui propose de loger en dessous de chez lui, au 5 rue Saint-Benoît où elle demeurera jusqu'à sa mort en 1995.

            Les années de guerre passent donc sans misère, mais sans saloperies, sans éclat non plus puisqu'elle écrit : « On n'a pas été des héros. La Résistance est venue à nous. On était d'honnêtes gens à qui se confier. »

            Pas très résistante, la Duras.

 

            Quant au plan littéraire, le travail de Christiane Blot-Labarrère ne permet pas une réévaluation de l'œuvre durassienne, ce qui n'est pas l'objectif de toute façon.

 

            Paradoxalement, cet album superbement réalisé prit donc au fur et à mesure de notre feuilletage l'allure d'un enterrement inattendu de Marguerite Duras. Forcément inattendu.

 

 

Alexandre Anizy

 

 

Pour le football d'art comme Jean-Claude Michéa

Publié le par Alexandre Anizy

            Dans le numéro d'été du mensuel d'Elisabeth Lévy, Causeur (1), on donne au philosophe Jean-Claude Michéa l'occasion d'exprimer son analyse sur le football :

« Mes textes sur le football ont toujours eu pour objectif, en effet, de montrer que la colonisation croissante de ce sport par la logique libérale - " l'arrêt Bosman " en a été l'un des moments-clés - ne peut conduire qu'à en dénaturer progressivement l'essence populaire, jusqu'à affecter aujourd'hui la philosophie du jeu elle-même. »

Pour autant, il est faux de penser que la majorité du public populaire aurait renoncé au futebol d'arte, et choisi le futebol de resultados : la sérieuse désaffection du public français pour son équipe façon Raymond Domenech en atteste (les sponsors ont bien chiffré le désamour en voyant la baisse de leurs chiffres d'affaires !).

 

            Pourtant, force est de constater que l'esprit du futebol de resultados dominent largement sur la planète. Mise à part l'équipe du Barça de Pep Guardiola, qui peut-on citer aujourd'hui en exemple de futebol d'arte ? Certainement pas l'équipe du Brésil qui vient de s'autodétruire ! Pourtant, la catastrophe était prévisible, et quasiment souhaitée avant le match fatal par Paulo Cesar pour que le Brésil ait l'opportunité de changer (2). Certainement pas l'Allemagne, parce que les commentateurs oublient trop vite les faiblesses révélées lors des matchs de poules, et parce qu'un commentateur averti comme Bixente Lizarazu a bien noté qu'il fallait rendre hommage aux qualités défensives des attaquants, notamment Klose. Que le buteur soit félicité par Lizarazu pour son travail défensif en dit long sur le jeu collectif allemand, fondé sur l'esprit du futebol de resultados. Pour mémoire, nous rappellerons ici que l'équipe allemande a gagné sa première Coupe du monde en 1954 (en battant la magnifique équipe d'Hongrie de Puskas), parce que ses joueurs étaient dopés comme des mules ! Par respect pour l'artiste Maradona, nous ne parlerons pas de la désespérante et soporifique équipe d'Argentine d'aujourd'hui.

 

            Autant vous dire que la finale Allemagne - Argentine de dimanche sera oubliable ... à moins d'un nouvel effondrement collectif qui créerait du spectacle !

 

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(1) Cette référence n'est en aucune façon une incitation, encore moins un encouragement, à acheter cette presse bien-pensante.

 

(2) Entretien de Paulo Cesar dans Le JDD du 6 juillet 2014.

 

Un été avec Proust

Publié le par Alexandre Anizy

            Longtemps je me suis tenu à l'écart.

           

            De Proust. Mais cessons la plaisanterie.

           

            Après Un été avec Montaigne, les éditeurs ont pensé qu'il serait juteux de poursuivre avec Un été avec Proust (éditions Equateur / France Inter, mai 2014, 235 pages, 13,50 €). Ils ont eu raison.

            Et Antoine Compagnon a récidivé, avec quelques comparses.

            L'affaire est séduisante. Ne la ratez pas.

 

 

Alexandre Anizy

 

Ederlezi : "a lazy story" de Velibor Čolić

Publié le par Alexandre Anizy

            Ederlezi, c'est le titre du nouveau roman de Velibor Čolić (Gallimard, mai 2014, en livrel à 12,99 € - Antoine, c'est trop cher !). Cette fois-ci, il raconte l'histoire d'une famille de Tziganes dans la Yougoslavie, et ailleurs forcément. Il y met tout son savoir-faire puisqu'il parvient à nous tenir jusqu'au point final malgré l'ennui lancinant.

 

            Dans notre déception à l'égard de Velibor Čolić, Sarajevo Omnibus ne fut donc pas le terminus (1).

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(1) lire nos billets précédents :

 

http://www.alexandreanizy.com/article-sarajevo-omnibus-terminus-pour-velibor-oli-105823619.html

 

http://www.alexandreanizy.com/article-velibor-oli-tcholitj-n-est-ni-footballeur-ni-jesus-ni-tito-53667706.html

 

Le Zagreb de 1991 par Simo Mraović

Publié le par Alexandre Anizy

            Inéluctablement, le poète zagrébois Simo Mraović est devenu minoritaire (1) en 1991, et il le raconta avec drôlerie et affection (un peu de sexe aussi, cela ne pouvait nuire à la profondeur psychologique des personnages) dans un petit roman : Constantin Craintdieu (excellente traduction d'Yves-Alexandre Tripković ; éditions Theatroom Noctuabundi, 2008, 151 pages, 15 €) (2).

 

L'incipit et les suivantes donnent le ton guilleret du récit :

            « Voici la confession de Constantin, poète inconnu qui, dans le tourbillon de la guerre, arpenta les rues de la bienveillante ville de Zagreb. Il n'était pas particulièrement charismatique. Il n'était pas quelqu'un d'important, ça non. Il n'était pas non plus malheureux en amour, alors là,  pas du tout. Il pensait qu'il était destiné à accomplir quelque chose de grand. Les jeunes gens ont parfois cette illusion. Mais nous ne nous en inquiéterons pas ici, car il ne dépassera pas les limites de ce livre. Il avait consacré le dernier été avant la guerre à flirter et à s'enivrer. Non, il n'est pas riche. Il ne possède rien. Il n'est pas non plus prolétaire, il ne se considère pas comme tel. Ni croyant, ni pratiquant, il n'est pas pour autant matérialiste. Il pense que les singes descendent des hommes, et non le contraire - avec tout le respect que l'on doit aux singes. Son histoire ne commence qu'à l'automne. Ce fut un automne brûlant. »

 

            Ce livre de Mraović nous a ramené à Vladimir Arsenijević (à fond de cale), à Jergović bien sûr (le jardinier de Sarajevo, dont nous venons de relire la nouvelle diagnostic), au Novo Beograd de Pantić (Si c'est bien de l'amour). Nous avons aussi beaucoup pensé à Charles Bukowski, évidemment. En lisant, c'est donc toute une compagnie de prosateurs iconoclastes qui encerclent notre esprit.

            A découvrir sans tarder !

 

 

 

Alexandre Anizy

 

 

(1) Nous vous laissons découvrir l'ironie du propos dans les premières pages du "roman minoritaire" (sous-titre du livre).

(2) Le meilleur endroit pour acheter ce livre au prix unique de 15 € :

                        http://balkans.courriers.info/