Critique de la théorie des après-guerres de Peter SLOTERDIJK

Publié le par Alexandre Anizy

(Suite des 6 notes précédentes portant le titre « Allemagne et France vus par Peter SLOTERDIJK »)

 

Disons d’emblée que nous comprenons la difficulté de l’exercice : présenter une théorie complexe dans le laps de temps d’une conférence officielle relève un peu de la gageure. Il s’agit donc pour nous de souligner les lacunes ou les points faibles de la théorie.

  

La faute à Napoléon

Cette partie est séduisante, mais elle contient une grave lacune : il nous paraît difficile de démontrer que Napoléon a freiné l’évolution économique et sociale, par conséquent démocratique, de la Russie tsariste.

Le prétendre relèverait plus du gadin philosophique que d’un survol historique planant.   

 

La métanoïa ratée de la France

Cette partie mérite d’être encore développée, notamment parce que la réponse de SLOTERDIJK, quand on lui parle du climat de repentance généralisé sévissant en France, est loin d’être satisfaisante : « Vu de l’extérieur, on a plutôt l’impression que l’autocritique à la française est une comédie superficielle et que le chauvinisme de base n’a jamais été ébranlé. » ‘(Point du 18 décembre 2008 : propos recueillis par Elisabeth LéVY)

« La France est dangereuse car elle porte toujours en elle les germes de la guerre civile, et on ne sait jamais comment l’explosion se reproduira. » (Point, ibid.) Cette affirmation de SLOTERDIJK ne remet-elle pas en cause toute la démonstration sur la « dénapoléonisation » de la relation franco-allemande et ne contredit-elle pas la conclusion de sa conférence ?

 

La réussite métanoiétique de l’Allemagne

L’Allemagne a réussi sa métanoïa. Mais si SLOTERDIJK doute de la sincérité des repentances françaises, force est de constater qu’il ne s’interroge jamais sur une éventuelle hypocrisie allemande. La subjectivité du propos étant par trop évidente, il conviendra donc de nuancer les formulations de l’exposé théorique.

D’ailleurs SLOTERDIJK anticipe la critique : « On peut avoir l’impression que (…) le bilan métanoiétique que je tire penche de manière unilatérale en faveur de la partie allemande, la France étant blâmée (…) » (p.75)

Mais « je ne voudrais pas réfuter cette impression », répond-il simplement.

En guise de conclusion, nous disons que cette théorie contient des prémisses intéressantes et des intuitions fulgurantes, soutenues par un verbe parfois caustique. Néanmoins, pour l’étayer, il conviendrait d’étoffer le travail de recherche, insuffisant à ce stade.


Alexandre ANIZY