De la douceur de Brantôme
Aux temps jadis, certains féodaux maniaient aussi bien l'épée que la plume : guerroyer, servir, séduire, baiser, n'était-ce pas in fine une question de pouvoir et domination ? De Brantôme (vers 1540 - 1614), ils restent des écrits rassemblés dans la Pléiade, notamment ses poésies. Dont celle-ci (page 754).
Doulce Limeuil et douces vos façons,
Douce la grace et douce la parolle,
Et doux vostre oeil qui doucement m'affole
Et faict en moy douces mes passions ;
Doux vos regards, douces voz actions,
Doux l'entretien et douce la main molle,
Douce la voix qui doucement me volle
L'ame et le cueur de ses doulces chansons ;
Doulce la bouche et doulce la beauté,
Doux le maintien, doulce la cruauté
Et doux le mal qu'il faut, pour vous, souffrir
Depuis qu'en vous on voit tant de doulceurs.
Faictes, au moins, que quand pour vous je meurs
Je puisse un peu plus doucement mourir.
De la douce répétition montent le frisson de la sensualité et l'engourdissement de la mort.
Alexandre Anizy