Azadi pour comprendre l'Iran

Publié le par Alexandre Anizy

Certains livres nous réconcilient avec la littérature, du moins celle qui ambitionne de contribuer à la découverte des sociétés pour que les hommes puissent les améliorer. Le roman Azadi de Saïdeh Pakravan compte parmi ceux-là.

Azadi de Saïdeh Pakravan (Belfond, janvier 2015, en livrel à 12,99 € - trop cher !) est d'abord un bon roman : un style fluide et plaisant, des caractères définis, une architectonique maîtrisée et adaptée au contexte. L'histoire se passe à Téhéran au moment des manifestations de juin 2009 : l'étudiante Raha et ses ami(e)s y participent, mais elle seule va connaître la prison, l'interrogatoire, la torture et le viol. Quand elle sort quelques jours plus tard (ses parents vivent dans les beaux quartiers...), tout a changé pour elle, forcément. Pour se relever, elle choisit de poursuivre légalement ses violeurs, ce qui en ce monde n'est jamais une mince affaire : au pays des mollah, cela ressemble à une épreuve titanesque.

Voici ce que dit un vieux personnage iranien, grincheux et désabusé :

« L'islam essaie toujours de se faire passer pour ce qu'il n'est pas. Au fond, son essence est, comme le judaïsme, une série de croyances qui déterminent de façon précise comment avancer dans la vie. C'est juste une liste de règles. Le judaïsme ne prétend jamais être spirituel ou transcendantal ou aspirer à un ordre plus élevé, il n'a ni enfer ni paradis ni quoi que ce soit d'autre que ce que nous avons ici. Il faut suivre les règles pour être un bon juif. C'est pareil pour l'islam, mais il prétend être spirituel. » (p.109 / 346)

Il nous paraît judicieux de citer aussi ce passage :

« Dans un pays musulman, un bon musulman est quelqu'un qui ne triche pas, qui ne tue pas, qui cultive des valeurs de compassion, qui aide les pauvres, etc. En un mot, qui fait toutes les choses qu'un bon chrétien ou un bon bouddhiste ou un bon n'importe quoi est supposé faire. C'est le seul avantage que je trouve à la religion - elle empêche les gens de s'entre-dévorer. » (p.162 / 346)

Ce livre est un tableau de la société iranienne et de la situation politique. La fin en surprendra quelques un(e)s, et nous remercions l'auteur de ne pas avoir cédé à une facilité romanesque.

Alexandre Anizy

Publié dans Notes culturelles

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :