Au bar de Louis Brauquier

Publié le par Alexandre Anizy

            En été, il faut se désaltérer. 

 

 

Le barman

 

Sur le zinc rutilant où, vainqueur des névroses,

Dorment les gins dorés et le pâle soda,

Inquiet de son cocktail fameux que l'on vanta,

Le barman, docteur ès alcool, combine et dose.

 

Et tandis qu'il s'amuse aux couleurs qu'il dispose

Pour des sièges très hauts dans des verres très bas

Il apprend, malgré lui, que, si Lulu les a,

Simone qui vécut attend la ménopause

 

Confident fraternel et sans sexe, il prévient

Sa cliente gênée et lui montre au besoin

Le miché barré d'or qui veut se mettre en vogue.

 

Ainsi vêtu de blanc lilial, rasé de frais,

Il garde seulement en mixturant ses drogues,

L'imperceptible orgueil d'user de mots anglais.

 

 

Louis Brauquier

(Je connais des îles lointaines - poésies complètes, La Table ronde, 2000)

Publié dans Notes culturelles

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