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Féroce récession américaine : la faute à Alan GREENSPAN

Publié le par Alexandre Anizy

Dès le mois de septembre 2007 (lire nos notes du 17 septembre, 20 septembre et 4 octobre), nous pressentions la crise. Dans la note du 10 décembre, nous annoncions les dégâts et les perspectives noires. Les choses se confirment maintenant.

 
Donnons quelques chiffres de l’économie américaine :

  • Le prix des maisons chuterait à un rythme annuel de 11 %,
    • soit une perte virtuelle de 2.200 Milliards,
    • soit une baisse de la consommation de 100 Milliards ;
  • la consommation, c’est 70 % de l’économie : les ventes au détail ont connu leur plus forte baisse depuis 6 mois avec 0,4 % en décembre (y compris hors automobile) ;
  • le chômage passe de 4,7 à 5 % en décembre ;
  • l’inflation s’élève à 4,1 % en 2007 ;
  • les taux d’intérêt à 10 ans sont déjà en dessous du taux d’inflation.

Autrement dit, relancer l’économie par une baisse des taux ne suffira pas.

« Les économistes ne prédisent jamais les récessions. Ils les reconnaissent quand elles sont déjà là. Celle qui se profile sera certainement la plus féroce depuis la Seconde Guerre Mondiale. » Dean BEAKER (économiste américain ; Libération 17 janvier 2008)

 

Pour Alan GREENSPAN, ex patron de la FED (Wall Street Journal du 15 janvier) : « Clairement, les symptômes sont là. Les récessions n’arrivent pas doucement. Elles se signalent généralement par une discontinuité sur le marché, et il est tout à fait possible de décrire ainsi les chiffres des dernières semaines. »
Personne n’aurait vu venir cette crise, si on croit Alan GREENSPAN. Ce qui n’est pas le cas de Dean BEAKER :

« Et qui a lui-même contribué à la laisser arriver en encourageant la bulle : Alan GREENSPAN, l’ex boss de la FED. Il a ignoré les conseils de régulation du marché du crédit, qui aurait pu limiter les abus. Aujourd’hui il réécrit l’histoire en tentant de s’exonérer. Il dit qu’il ignorait le scandale des subprimes ou qu’il n’a pas été prévenu. Il n’a pas d’excuse pour une telle négligence, un tel laisser-faire dicté par le seul souci d’enrichir les plus riches … » (Libération, idem)

Alan GREENSPAN est le digne successeur du monétariste « pur et dur » Paul VOLCKER qui sévissait à la tête de la FED du temps de REAGAN : le voilà rhabillé pour l’hiver !

 

Les fonds d’investissement souverains surgissent de partout pour sauver les plus grandes banques qui n’ont pas le choix.
« Elles sont, dans l’ensemble, dans une situation désespérée. Il leur fallait du cash, des liquidités. » Dean BEAKER (Libération, ibidem)
La Présidence Républicaine et le Congrès Démocrate « (…) ne stopperont pas la récession, tout juste l’édulcoreront-ils. » Dean BEAKER (Libération, ibid.)

 

 
Suite à l’appel à l’aide du patron de la FED Ben BERNANKE, qui reconnaissait que la banque centrale ne pourrait pas à elle seule empêcher le plongeon de l’économie américaine, le Président BUSH vient de présenter un plan de stimulation économique estimé à environ 1 % du PIB, soit 145 Milliards de dollars. Les ¾ seraient alloués aux ménages.

Selon le Secrétaire au Trésor Henry PAULSON, son principal artisan, ce plan de relance fiscale répond à un besoin urgent et il satisfait la règle d’or des « 3 T » : timely, targeted, temporary (bon moment, ciblé, temporaire). Il va même plus loin que la proposition du démocrate SUMMERS (chiffrée à 75 Milliards).

Les réactions à ce plan :

  • Bourse Wall Street clôturait vendredi soir avec un indice DOW JONES en recul de 4,2 % sur la semaine ;
  • Les présidentiables démocrates OBAMA et CLINTON jugent le paquet fiscal  insuffisant.

A notre avis, ce plan ne pourra obtenir qu’une stagnation en 2008.

 

 
Nous tenons à souligner le pragmatisme des Américains : le bon fonctionnement de l’économie de marché est au-dessus des batailles doctrinaires, idéologiques.

L’idée d’une action conjuguée du Gouvernement et de la FED a été émise dans un 1er temps par Martin FELDSTEIN (ancien conseiller économique de REAGAN et inspirateur de BUSH) et dans un 2ème temps par Lawrence SUMMERS (dernier Secrétaire du Trésor de CLINTON).
Ils estiment tous les deux que les taux de la FED pourraient passer de 4,25 % à 3 % en 2008, mais que ce ne sera pas suffisant : l’exemple japonais des années 90 où la politique de taux zéro a grippé les circuits du crédit reste dans les mémoires.
Par ailleurs, ils ne méconnaissent pas les effets sur le taux de change du dollar, qui pourrait chuter suite à une politique d’argent bon marché.

Rappelons ici que l’OCDE, avant même cette relance fiscale, chiffrait déjà le déficit budgétaire américain à 3,4 % du PIB, qu’il faut comparer au déséquilibre de 0,7 % en moyenne de la zone euro.

 
Comme les Américains, les archaïques de la BCE et l’oligarchie européenne devraient abandonner leur dogme libéral pour agir dans leur propre intérêt, qui n’est pas forcément identique à celui des populations.

 
Alexandre Anizy

Virginie DESPENTES l'a remontée

Publié le par Alexandre Anizy

Virginie DESPENTES nous impressionna avec ses 2 premiers livres : « baise-moi » et « les chiennes savantes » (en poche). Avec ça, on prenait un coup de littérature à l’estomac !

Avertissement : ne pas les mettre entre toutes les mains.

N’en déplaise aux gens de lettres conservateurs, elle apportait un souffle nouveau, qu’elle maîtrisait de bout en bout, sans lasser le lecteur curieux.

Avec « les jolies choses », elle mettait un bonnet rose sur son vocabulaire : cela nous ennuya.

Ces derniers temps, il paraît qu’elle théorise. De manière iconoclaste, cela fait tout son intérêt.
Qu’elle poursuive son chemin : nous la revisiterons à une prochaine croisée.

 

Alexandre Anizy

Le passé nazi de la famille QUANDT (BMW)

Publié le par Alexandre Anizy

La famille QUANDT (une fortune d’environ 26 milliards d’euros) ne compte pas pour des « brunes » dans le capitalisme allemand, bien qu’elle soit d’une extrême discrétion depuis des décennies.

 
Après 5 années d’enquête minutieuse, Eric FRIEDLER et Barbara SIEBERT ont réalisé un documentaire titré « le silence des Quandt », dans lequel ils démontrent que cette famille, déjà riche avant la guerre, a profité du nazisme et de la guerre pour s’enrichir davantage. Ils se demandent aussi comment Günter (le père) et Herbert (le fils) ont pu passer entre les mailles du filet de la dénazification après 1945.

Parce que les QUANDT ont les mains sales.

 
Membre du Parti nazi (NSDAP) dès 1933, Günter utilise l’influence de son ex-épouse Magda auprès de GOEBBELS (son nouveau mari) et ses relations pour se débarrasser de ses concurrents : les entreprises de Juifs sont « aryanisées » et les non Juifs contraints de céder leurs actions à QUANDT. Quand on résiste, on est arrêté (exemple : l’industriel luxembourgeois LAVAL).

Propriétaires de l’usine d’accumulateurs AG Afa, qui tourne à plein régime, ils participent à la machine de guerre allemande : le personnel est fourni par les camps de concentration de Stocken. Malgré les bombardements des Alliés et grâce à ses relations à Berlin, les QUANDT maintinrent intact leur outil de production.

 
Question : pourquoi les documents accablants en possession des Anglais ne sont-ils jamais sortis au procès de Nuremberg ? Parce que les Anglais avaient besoin des usines QUANDT, selon FRIEDLER et SIEBERT.
 

Pour réagir face à ce documentaire accablant, les QUANDT ont décidé d’ouvrir leurs archives : c’est le moins qu’ils puissent faire.  
Ils vont devoir s’exposer pour gérer cette crise qui nuit au développement de leur business, notamment aux USA.
Voilà pourquoi le loup est sorti de sa tanière.

 
Pour nous, une question se pose : tant que BMW appartiendra à cette famille, le boycott de la firme n’est-il pas une riposte adaptée des consommateurs citoyens ?

 

Alexandre Anizy

Pour Nicolas BAVEREZ 2008 ne sera pas 1929

Publié le par Alexandre Anizy

Pour Nicolas BAVEREZ, la crise de 2007 est multiforme : retournement du cycle mondial, krach immobilier avec dégonflement des liquidités qui aboutissent à un rationnement du crédit bancaire et une hausse des taux.

 

La crise est globale, puisqu’elle touche l’économie réelle des Etats-Unis, du Japon, de l’Europe : baisse de la consommation et de l’investissement.

 

La crise est structurelle et durable : c’est la fin d’un modèle fondé sur la dynamique de consommation des Américains, sur le crédit abondant à faible coût, sur une inflation sous-jacente très limitée, sur la baisse parallèle des taux, des matières premières et des biens industriels.

 

2008 sera l’année du choc : crédit bancaire bloqué, hausse des taux, baisse des prix immobiliers aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Espagne, menace de faillites de ménages (> 2 millions rien qu’aux Etats-Unis) et d’entreprises, une récession possible aux Etats-Unis et une croissance de 1,5 % en Europe et au Japon.

 

La crise met en évidence le basculement de l’économie mondialisée vers le Sud. « Aujourd’hui, la crise venue du système financier américain contraint les pays de Nord à accepter le sauvetage de leurs institutions financières par les fonds souverains des superpuissances du Sud et des pétromonarchies. » (Nicolas BAVEREZ, le Monde 9 janvier 2008)

D’un point de vue strictement géographique, il est plus juste de parler d’Orient plutôt que de Sud, puisque les pétromonarchies, le Japon, la Chine, l’Inde, sont dans l’hémisphère Nord.

« Le Nord ne perd pas seulement le monopole de la production et de l’innovation, mais celui du contrôle des actifs stratégiques et de la régulation du capitalisme mondialisé. »  (Nicolas BAVEREZ, idem)

 
2008 ne sera pas 1929, parce que la mondialisation produira toujours ses effets positifs, à savoir l’ouverture économique, l’innovation, l’enrichissement des populations des pays pauvres (ceci est un argument d’une grande faiblesse, et tout à fait contestable), parce que le secteur industriel conservera des structures financières saines et une rentabilité élevée, parce que le marché des actions n’est pas surévalué.

« De nombreux moyens restent disponibles pour prévenir les risques d’effondrement du crédit ou de récession. (…) Cela implique notamment que la BCE rompe avec une stratégie schizophrène accommodante sur le plan de la liquidité et restrictive dans son refus de diminuer les taux et dans sa défense d’un euro surévalué. »  (Nicolas BAVEREZ, ibidem)

 
2008 pour la France, ce sera : une croissance de 1,5 %, une inflation de 2,5 %, un déficit public de 3 % du PIB, une dette publique de 65 % du PIB.

Nous trouvons indéniablement beaucoup d’éléments pertinents dans cet article de Nicolas BAVEREZ.

Mais Nicolas BAVEREZ est un battant : 2009-2010 verra une reprise, nous dit-il. La France en profitera pleinement si elle continue à se libéraliser… (Nous vous épargnons la liste des démolitions)

Il est vrai que la condition sine qua none de la reprise est la confiance, dont le préalable est la croyance.  

 

Alexandre Anizy

La désinvolture de Dominique STRAUSS-KAHN

Publié le par Alexandre Anizy

Dans un entretien au Journal du Dimanche le 16 décembre 2007, Jacques ATTALI a exprimé toutes ses inquiétudes pour 2008.

Il remarque que les Etats-Unis restent aveugles devant leurs problèmes économiques alors que la campagne électorale commence : une récession se profile à l’horizon et elle n’épargnera pas l’Europe.

 
L’origine de cette récession, c’est bien sûr la crise des « subprimes » : « Elle a détruit en quelques mois des richesses égales à 10 % du PIB mondial, soit 4.000 Milliards de dollars, c'est-à-dire 50 fois plus que les pertes générées dans les industries de pointe par l’explosion de la bulle Internet. » (Jacques ATTALI, idem)

Comment est-ce possible ?

« (…) les banques ont reprêté leurs prêts à n’importe qui, pour les racheter ensuite beaucoup plus cher. C’était à la mode. Devant la révélation de la folie que cela représentait, on est passé, en une semaine, de l’euphorie à la panique : plus personne ne prête à personne. » (Jacques ATTALI, ibidem) Notons que cette méfiance généralisée a perduré puisque les banques centrales, y compris la BCE en contradiction avec son credo anti-inflation, ont injecté à nouveau des montants énormes de liquidités en fin d’année : ceci facilitera le toilettage des bilans des banques, mais repoussera d’autant le retour de la confiance sur le marché interbancaire.

 
Pourtant, souligne Jacques ATTALI, « tout est en place pour une forte croissance de longue durée de l’économie mondiale. L’épargne est abondante, les progrès techniques et la consommation de vastes populations nouvelles sont au rendez-vous. Mais nous manquons d’une régulation au centre : celle des banques centrales et du G8. Il est urgent de réduire les taux directeurs en Europe, pour relancer la consommation. » (Jacques ATTALI, ibid.)

« Et si les banquiers continuent à paniquer, nous risquons une crise de 29. »  (Jacques ATTALI, ibid.)

On sait le rôle funeste joué par les banques en 1929, ne serait-ce qu’en lisant « la crise économique de 1929 : anatomie d’une catastrophe financière » de John Kenneth GALBRAITH (Payot 1989).

Mais, hormis cette référence à 1929, Jacques ATTALI ne prétend pas assimiler la crise actuelle à celle de 1929 : il avance plutôt les arguments contraires dans cet entretien.

 

De passage à Paris, le professeur Dominique STRAUSS-KAHN n’a pas pu s’empêcher de faire la leçon devant ce qu’il reste de ses troupes de notables socialistes. En substance, il affirma que nous sommes face à une crise financière, alors que 1929 était une crise de production.

Si c’était une pique à l’encontre d’ATTALI l’ex éminence grise du francisquain MITTERRAND, STRAUSS-KAHN le socialiste ami des patrons du CAC 40 aurait pu faire l’effort de lire entièrement les propos d’ATTALI : les déclarations péremptoires ne valent que pour les gogos.

 
Parce que STRAUSS-KAHN a été l’artisan de la création de la société EADS qui constitue un hold-up de la famille LAGARDèRE (lire note « Pour Jacques JULLIARD l’affaire EADS est trop compliquée pour indigner les foules » du 15 octobre 2007),

Parce que nous nous souvenons des factures antidatées du consultant STRAUSS-KAHN,

Parce que nous nous souvenons de la cassette MéRY laissée négligemment dans un coffre de sa voiture personnelle (sans l’avoir regardée, ne l’oublions pas …),

nous considérons que la désinvolture est la marque du Directeur du FMI.

 

Alexandre Anizy

Bernard ESAMBERT et son "capitalisme éclairé"

Publié le par Alexandre Anizy

Après avoir été un acteur émérite de la guerre économique des 40 dernières années, Bernard ESAMBERT dépose son armure pour réfléchir à l’avenir de l’Homme dans un article intitulé « plaidoyer pour un capitalisme éclairé » (Figaro 7 janvier 2008).

Curieusement, le mot « capitalisme » et l’expression « capitalisme éclairé » ne figurent pas dans le texte : alors ce plaidoyer est-il vraiment sérieux ?
Par contre, on trouve beaucoup de « libéralisme », et une fois l’expression « libéralisme éclairé ».

 
Bernard ESAMBERT fait le constat d’un monde matérialiste sans repères :

« (…) nous vivons désormais dans un monde de marchands produisant massivement du confort matériel, des services et des images. Le contexte est celui d’un combat économique qui a transformé la planète en champ de bataille, sans morale ni spiritualité. »

Bien sûr, il n’est pas question de remettre en cause le passé, puisque « sur le plan matériel, le libéralisme des temps modernes a apporté la satisfaction des besoins vitaux à des centaines de millions d’individus (…). »

Plutôt un ajustement : « Il s’agit dorénavant d’envisager un libéralisme éclairé prenant en considération la notion de solidarité au sein de l’espèce humaine. Sans oublier la justice (…) » « (…) le libéralisme. Il faut simplement le doter d’un code moral qui le rende acceptable (supportable ?) à la majorité. »

« (…) le monde devra passer à un degré supérieur d’organisation. Au moment même où les Etats érigent des murets de fortune pour se protéger de la globalisation. »

N’est-ce pas là, en fait, le véritable sujet de préoccupation de Bernard ESAMBERT ?

 

Pour réussir le nouveau plat libéral, le chef Bernard ESAMBERT rêve d’une équipe inspirée par « (…) un dialogue entre AVERROèS, MAÏMONIDE, saint THOMAS D’AQUIN et ARISTOTE qui réanimerait l’entrelacs des révélations et de la raison. » « Un code éthique élaboré par un tel cénacle consoliderait de jeunes démocraties (…), freinerait l’absentéisme du cœur qui accompagne souvent la concurrence sans frein. (…). Ce sont les notions de solidarité, de générosité, d’altruisme qui font de l’homme une espèce supérieure. »

Et enfin, l’apothéose : « Mais il n’est pas interdit de rêver au partage d’une authentique condition humaine. Il y a des « biens publics mondiaux » tels que la santé, l’eau, le maintien d’une planète habitable (…). »  
On croirait presque entendre un baba cool du plateau du Larzac, dans les années 70.
Mais ce ne doit être qu’une illusion.

 
Contre les coups de blues, il est généralement recommandé aux managers :

Un coach pour relaxation et bien-être ;

Un stage individuel de « re-motivation » ;

Une retraite spirituelle (destination à choisir sur catalogue).

 

Alexandre Anizy

Michel ROCARD et la prochaine crise mondiale

Publié le par Alexandre Anizy

Pour Michel ROCARD, la crise mondiale nous attend demain. En bon énarque, il apprécie les chiffres qui mettent en perspective son diagnostic et son jugement, et il sait les trouver.

 
Ainsi, la dette des Etats-Unis (ménages, entreprises et Etat) sur une longue période s’est envolée à partir de 1982 : « Lors de la crise de 1929, l’endettement américain –environ 130 % du produit national – était déjà au « cœur du système ». Aujourd’hui il atteint plus de 230 % ! Pour éviter la faillite, le système financier américain doit emprunter 2 Milliards de dollars par jour ! » (Michel ROCARD, Nouvel Observateur 13 décembre 2007)

De 1945 à 1980, le monde a connu des crises nationales. Mais la sphère financière ayant pris une grande importance à l’aube de l’ère mitterrandienne, nous avons connu des crises financières graves : les crises latino-américaines dans les années 80, la crise asiatique dans les années 90, la crise du système monétaire européen en 1992, l’éclatement de la bulle Internet en 2000. La financiarisation globale a permis de mutualiser les risques, ce qui in fine amortit la dureté et l’ampleur des chocs.

Et aujourd’hui, la dette américaine hors banque s’élève à 39.000 Milliards de dollars. Comment en arrive-t-on à cette situation inextricable ? Pour Michel Rocard, « ce passage d’un équilibre à un déséquilibre massif, généralisé, tient au changement de la répartition du produit national, entre les salaires (salaires et revenus de protection versés par la Sécurité sociale) et les profits (bénéfices industriels, honoraires des professions libérales, rémunérations directes sur le marché). (…) En gros, les salaires sont passés de 71 % du PIB en 1981 à 60 % en 2005. » (Michel ROCARD, idem) Pour être plus explicite, si le partage de 1981 s’était maintenu en France, les ménages auraient dépensé 130 Milliards de plus, ce qui auraient représenté 1 point supplémentaire de croissance chaque année : nous aurions 500.000 chômeurs de moins.

« Tout a changé dans les années 90 avec l’apparition des fonds et d’abord des fonds de pension. L’actionnaire (…) a exigé un retour sur investissement de plus en plus élevé. Corollaire : une pression de plus en plus forte sur les salaires (…). » (Michel ROCARD, ibidem)

« Avec une pauvreté de masse évaluée à 10 millions de personnes en Grande Bretagne et entre 5 et 6 millions en France, la part des salaires dans le PIB a évidemment reculé par rapport au profit réinvesti de manière spéculative. D’où, faute d’une demande suffisante, une croissance anémiée, incapable de contenir l’hémorragie des déficits et une dette de plus en plus difficile à rembourser. » (Michel ROCARD, ibid.)

 

Les pétrodollars, les excédents commerciaux chinois et japonais, représentent une masse abondante de liquidités. « Tous les banquiers vous le diront, malgré leur affinement, les politiques économiques ne peuvent rien sur l’usage et l’évolution de ces liquidités. Ce dysfonctionnement, culturel dans sa nature, structurel dans son résultat, est terrible. Personne ne sait comment ça peut finir, et j’ai la conviction que ça va bientôt exploser. (…) C’est le capitalisme dans sa forme mondialisée et financiarisée – non le marché dont je suis partisan – qui est en cause aujourd’hui.» (Michel ROCARD, ibidem)

 
Nous vous épargnons les considérations éthiques et les mesures techniques envisagées par l’énarque ROCARD.
Car pour lui, la clé du problème réside dans le statut juridique de l’entreprise : fin des apporteurs extérieurs de capitaux, vive la communauté oeuvrant pour le projet collectif.
« (…) une seule force capable de le mener à bien : la social-démocratie internationale. Il va falloir défendre tout ce qui produit contre tout ce qui spécule. C’est ça, la nouvelle lutte des classes. »
Vaste programme.

 

Alexandre Anizy

Pourquoi la Commission de Jacques ATTALI veut-elle de l'immigration ?

Publié le par Alexandre Anizy

Pour relancer la croissance, Jacques ATTALI et sa commission proposent un recours à l’immigration sélective.

Dans un pays où on arrange les chiffres du chômage pour ne pas mécontenter le ministre de tutelle (lire note du 19 novembre « les bidouillages de l’INSEE »), cela fait sourire.
Dans un pays où on impose un objectif quantitatif d’expulsion d’immigrés irréguliers au ministre en charge de ce dossier, on peut s’esclaffer sans retenue.

 
Cela dit, que penser de cette proposition ?

Si l’insuffisance de travail était vraiment le frein à la croissance dans l’économie française, alors le technocrate Jacques ATTALI, qui ne manque pas de bon sens (du moins nous le supposons), aurait dû préconiser ardemment, sans tenir compte des contingences politiciennes, les mesures suivantes par ordre de priorité :

  • Abrogation de la loi sur les 35 heures ;
  • Mesures facilitant le recours aux heures supplémentaires ;
  • Mesures facilitant le recours à l’intérim ;
  • Mesures plus contraignantes pour les chômeurs (objectif : un retour impératif à un emploi) ;
  • Possibilité pour les entreprises d’aller chercher à l’étranger le personnel qualifié si elle prouve la carence nationale.

En clair, remettre en cause toutes les mesures limitatives.
Constatons qu’on ne préconise pas une démarche logique et graduelle, puisqu’on fait le forcing sur « la dernière ressource potentielle ».

 
Que penser de cette solution d’immigration sélective ?

En bon technocrate, Jacques ATTALI (et sa commission) a-t-il pris en compte le coût de l’immigration actuelle pour estimer les bénéfices réels de cette proposition ? « L’immigration actuelle a déjà un coût réel qui est difficilement supportable pour la France, que mon collègue Jacques BICHOT a estimé à 24 Milliards d’euros par an. Il faudra y ajouter le coût de l’intégration inéluctable des immigrés déjà présents sur le territoire national, pour un montant que j’ai moi-même estimé à 12 Milliards d’euros par an. » Gérard LAFAY (Professeur à l’université Paris II ; Figaro 12 janvier 2008).

De plus, on doit s’interroger sur la cohérence économique de Jacques ATTALI. En effet, sélectionner et attirer les travailleurs qualifiés des pays pauvres, c’est priver de compétences les pays concernés et ipso facto les maintenir dans un état de dépendance vis-à-vis des pays riches : pour le continent africain (Maghreb et Afrique subsaharienne), ce serait désastreux. Il serait temps que Jacques ATTALI débogue son logiciel interne et qu’il mette sa « pendule politique » à l’heure : pour un intellectuel, la schizophrénie est particulièrement malsaine.

Donc, que ce soit d’un point de vue strictement national ou d’un point de vue plus global, l’immigration sélective est une fausse solution.

 

En définitive, quel est l’objectif réel de l’immigration sélective ?
Maintenir la pression à la baisse sur les salaires des emplois qualifiés, alors que les départs en retraite des baby-boomers vont créer une tension sur le marché du travail, si toutes les choses restent égales par ailleurs.
Ce qui va à l’encontre de la croissance.

 

Alexandre Anizy

Roger MARTIN DU GARD et son "Devenir !"

Publié le par Alexandre Anizy

Nous avons déjà eu l’occasion d’écrire tout le bien que nous pensions du chef d’œuvre de Roger MARTIN DU GARD « les Thibault ».

Dans la Pléiade, tome I, qu’Albert CAMUS préface, vous saurez toute l’importance de cet écrivain oublié qu’il place dans la lignée de TOLSTOï.

 
« Il n’a que 27 ans quand il écrit « Devenir ! » ; (…) restera fidèle toute sa vie à cette règle d’une vocation ascétique et à un jansénisme de l’art qui le fera fuir les effets et les parades pour tout sacrifier au labeur ininterrompu mis au service d’une œuvre qu’on veut durable. » Albert CAMUS, p. XII.

« Devenir ! » est le premier livre de Roger MARTIN DU GARD, et déjà tout y est. Mais bien sûr, auparavant, il faut lire « les Thibault », parce que c’est un roman moderne.
« La sexualité (…) a été abordée franchement par MARTIN DU GARD. Franchement mais pas crûment. Il n’a jamais cédé à cette tentation de la chiennerie qui rend tant de romans contemporains aussi ennuyeux que les manuels de bienséance. Il n’a pas décrit complaisamment de monotones débordements. Il a choisi plutôt de montrer l’importance de la vie sexuelle par son inopportunité. » Albert CAMUs, p.XIV.

 
CAMUS écrivait ces lignes en 1955. Concernant la production littéraire, la proposition est toujours d’actualité.

 

Alexandre Anizy

La BCE répond aux attentes allemandes

Publié le par Alexandre Anizy

La BCE vient de décider cette semaine de maintenir ses taux directeurs, ce qui n’est franchement pas une surprise. Mais elle se considère aussi « dans une position d’alerte absolue » contre toute flambée des prix.

Diantre ! Quelle sorte d’inflation cachée aurait-elle révélée ?

 
D’une part, nous avons déjà dit avec Patrick ARTUS qu’il n’y avait pas d’inflation dans la zone euro (lire la note économique du 11 décembre 2007) :« C’est un pur ajustement de l’économie réelle, lié à la rareté des matières premières ou à l’évolution de la productivité. L’inflation monétaire a été éradiquée par l’arrivée des pays émergents. »

D’autre part, nous avons aussi admis avec Patrick ARTUS que la BCE commettait une grave erreur d’analyse économique en se focalisant sur l’inflation totale, et non pas sur l’inflation sous-jacente (lire la note économique du 20 décembre 2007).

 
Alors, où est le danger inflationniste ?

Explication  de la BCE : « Nous vous [les décideurs] appelons à ne pas laisser s’enclencher la spirale de l’inflation résultant du pétrole, des matières premières … de l’alimentation et d’un certain nombre de décisions prises auparavant, y compris en matière de fiscalité indirecte. »
« Tout plan d’indexation des salaires nominaux sur les prix devrait être supprimé. (…). La BCE surveille les négociations salariales avec une attention particulière. »

En clair : nous ne voulons pas d’augmentation des salaires.

 
Quel pays a relevé de 3 points son taux de TVA en janvier 2007, ce qui ne pouvait être que néfaste pour l’inflation totale chère à la BCE ? L’Allemagne.

Dans quel pays a commencé le 10 janvier un cycle annuel de révision des salaires avec une demande de hausse de 8 % pour les fonctionnaires ? L’Allemagne.

 

Force est de constater que la BCE se soucie tout particulièrement des intérêts de l’économie allemande, prise globalement et selon ses critères, pour fixer sa politique monétaire.

A Francfort, les archaïques veillent à la santé de l’euromark.

 

Alexandre Anizy

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